La société Lubrizol France a été mise en examen par les magistrats instructeurs, informe le procureur de la République de Paris ce jeudi 27 février. D'une part, pour exploitation non conforme d'une installation classée (ICPE) ayant porté une atteinte grave à la santé, à la sécurité ou dégradé substantiellement la faune, la flore, la qualité de l'air, du sol ou de l'eau. Et, d'autre part, pour déversement de substances nuisibles dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer.
Suite à sa mise en examen, Lubrizol France a été placée sous contrôle judiciaire avec l'obligation de s'acquitter d'un cautionnement de 375 000 euros et l'obligation de constituer une sûreté à hauteur de 4 millions d'euros. « Cette mesure de sûreté a pour objectif de garantir les droits des victimes en permettant la réparation des dommages humains et environnementaux susceptibles d'avoir été causés par les infractions commises », indique le parquet.
La société Normandie Logistique, dont les entrepôts avaient brûlé en même temps que les installations du site Lubrizol le 26 septembre dernier, a, quant à elle, été placée sous statut de témoin assisté.
Indices graves ou concordants
La mise en examen de Lubrizol indique qu'il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable que l'industriel a pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions. Elle ne signifie pas, à ce stade, que la cause du sinistre est interne à son établissement, classé Seveso seuil haut. « Les investigations menées ne permettant pas de déterminer les causes de l'incendie, ni de localiser son origine », indique en effet le communiqué du procureur de la République.
Auditionné par la commission d'enquête du Sénat le mercredi 26 février, l'assureur de l'industriel a indiqué que certaines recommandations en matière de prévention incendie, faites dès 2008, n'avaient toujours pas été mises en œuvre à la veille de l'accident.
« En creux, la question de la responsabilité de l'État »
« La différence de statut entre Lubrizol et NL Logistique interpelle », réagit la société Lubrizol France dans un communiqué. Toutefois le statut de « mis en examen », explique-t-elle, lui permettra « d'exercer l'ensemble de ses moyens de défense afin de démontrer que la société a pleinement respecté ses obligations d'exploitant d'une installation classée et que ses installations et dispositifs de lutte contre l'incendie répondent aux exigences fixées par son arrêté d'exploitation et par la réglementation en vigueur ».
L'association Rouen Respire, qui a porté plainte contre l'industriel au côté de nombreuses victimes mais qui a échoué à stopper la réouverture partielle de l'usine, se félicite de cette mise en examen. Elle voit dans la constitution d'une sûreté un encouragement pour ceux qui ont demandé une indemnisation. « Le message est d'autant plus important que des fonds d'indemnisation ont été mis en place pour les agriculteurs et les commerçants, mais que rien de semblable n'existe pour les particuliers ».