Le déploiement mondial de l'agriculture biologique pourrait être limité par un manque d'azote, indique une équipe de recherche de l'Inrae et de Bordeaux Sciences Agro, dans une nouvelle étude dont les résultats ont été publiés le 13 mai dans la revue Nature Food. L'agriculture biologique exclut de fait les engrais azotés de synthèse. Or, l'azote est indispensable à la croissance et au développement des plantes. « La fourniture d'azote aux cultures en agriculture biologique repose essentiellement sur les fumiers issus de l'élevage et, dans une moindre mesure, sur la fixation de l'azote atmosphérique dans le sol, effectuée par les légumineuses. Cependant, ces deux sources ne sont pas infinies ni inépuisables », indiquent les chercheurs.
À l'aide de simulations sur la part de surfaces cultivées en agriculture bio au niveau mondial (20, 40, 100 %), ils ont estimé les déficits en azote. Et en tirent plusieurs conclusions : « L'élevage est indispensable au développement de l'agriculture biologique du fait de sa capacité à fournir de l'azote pour enrichir les sols grâce au fumier », soulignent-ils. Mais certains élevages, notamment porcins et aviaires, entrent en concurrence avec l'alimentation humaine. En revanche, les élevages de ruminants devraient être placés au plus près des cultures, notamment dans les prairies, « pour reconnecter productions végétales et animales et optimiser le recyclage de l'azote ».
Il faudrait en parallèle rééquilibrer la consommation alimentaire mondiale, trop riche aujourd'hui notamment en Europe et Amérique du Nord. Elle est estimée en moyenne à 2 890 kcal par personne et par jour, alors que 2200 kcal suffiraient. Enfin, le gaspillage alimentaire devrait être réduit de moitié.
En combinant ces trois leviers, « il serait possible d'augmenter la part de l'agriculture biologique mondiale jusqu'à 60 % au moins tout en répondant à la demande alimentaire mondiale ». L'augmentation de la part des cultures de légumineuses, qui fixent l'azote dans le sol, est un autre levier à explorer, indiquent les chercheurs.