Les résultats du premier appel d'offres français en faveur de l'éolien en mer issu du Grenelle ont été présentés vendredi 6 avril par le ministre de l'énergie Eric Besson. L'Etat n'a pas choisi de suivre les recommandations de la CRE qui conseillait de ne retenir que les projets d'EDF. Résultat, le consortium EDF Energies Nouvelles/Dong Energy Power/Alstom remporte trois parcs : ceux de Fécamp (498 MW), Courseulles-sur-Mer (450 MW) et Saint-Nazaire (480 MW). Le parc de Saint-Brieuc (500 MW) sera construit et exploité par le consortium Iberdrola/Eole-Res/Areva. Le site du Tréport (600 MW) a quant à lui été déclaré "sans suite". Un nouvel appel d'offres sera lancé dès le second semestre 2012 pour de nouvelles zones de développement éolien offshore, comprenant notamment la zone du Tréport et la zone de Noirmoutier.
Mise en place d'une filière industrielle
"Cette décision va conduire au développement d'une nouvelle filière industrielle à vocation mondiale, avec 10.000 emplois industriels créés, et positionner la France parmi les leaders mondiaux de l'industrie éolienne offshore", estime Eric Besson. La qualité du projet industriel et social représentant pour 40% de la note finale, les industriels ont en effet promis usines et emplois. Alstom a d'ailleurs confirmé l'implantation de 4 usines pour livrer son éolienne Haliade 150 au consortium EDF EN : les usines d'assemblage des nacelles et de fabrication des alternateurs seront à Saint-Nazaire. Elles emploieront 300 personnes. La production des pales, en partenariat avec LM Wind Power, ainsi que la fabrication des mâts se feront à Cherbourg, où les deux usines représenteront 500 emplois directs supplémentaires. 240 de ces éoliennes seront installées au large des côtes françaises. La mise en oeuvre de ce plan industriel débutera en 2013. Le démarrage de la production est prévu en 2014.
Le projet du consortium Iberdrola s'engage de son côté à mobiliser environ 2.000 emplois en France grâce à ce projet, dans les années à venir, principalement dans le Grand-ouest, dont une partie significative en Bretagne. "A titre d'exemple, la ferme éolienne permettra la création de 140 emplois directs dans la baie de Saint-Brieuc pendant toute la période d'exploitation, soit 20 ans au minimum", précise Iberdrola. La société Areva, partenaire prévu pour fournir les éoliennes a également confirmé la création de deux usines de production d'éoliennes offshore à l'entrée du port du Havre. Un site sera destiné à la fabrication de pales de 66 mètres de long, et le deuxième sera consacré à la production de turbines de 5 MW, d'un poids de 300 tonnes l'unité. Le groupe mise sur ce premier parc, les perspectives du second appel d'offres français et le marché britannique en particulier au sud de l'Angleterre pour faire tourner ses usines.
Pour les élus locaux ces promesses d'emplois sonnent comme une "formidable nouvelle" selon les propos de Jacques Auxiette, Président de la région Pays de la Loire : "la confirmation de l'implantation d'un tel donneur d'ordre [ndlr : Alstom] va générer un appel d'air pour l'implantation de nouvelles entreprises liées aux Energies Marines Renouvelables", estime-t-il. "Les énergies marines renouvelables représentent une diversification et un renforcement dans la continuité du tissu industriel local et, à un autre niveau, une contribution significative à l'évolution de la filière énergétique nationale", estime pour sa part Jean-Pierre Chalus, Président du Directoire du Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire.
GDF Suez victime de ces déboires avec la Compagnie du vent ?
Pour certains ces résultats sont une vraie douche froide. GDF Suez n'a remporté aucun projet et doit tirer une croix sur son parc des Deux-Côtes. "La zone du Tréport n'a pas fait l'objet d'une concurrence suffisante, présente le prix d'achat de l'électricité le plus élevé parmi les 5 zones, et entraîne à elle seule une surcharge de l'ordre de 500 millions d'euros pour la Contribution au Service Public de l'Electricité", a justifié le ministère de l'énergie. GDF Suez déclare "prendre acte de cette décision". "Nous avons mis en avant une longue expérience dans l'éolien terrestre et dans l'offshore notamment gazier et les prix proposés par le groupe étaient en ligne avec nos critères d'investissement et de rentabilité", se défend le groupe. Reste que le parc des Deux-Côtes lancé en 2004 et prévu à l'origine à 14 km au large du Tréport et dont le débat public s'est clos fin 2010 ne verra pas le jour.
Selon certains, le groupe a été victime des déboires juridiques en cours avec la Compagnie du Vent, société à l'origine du projet des Deux-Côtes racheté par GDF Suez en 2007. "La Compagnie du Vent disposait d'une antériorité et d'un savoir faire incontestables pour réaliser, dans les meilleures conditions techniques et financières cet ambitieux projet éolien offshore. Le montage coordonné par La Compagnie du Vent aurait permis d'obtenir une meilleure rentabilité du projet et un tarif de vente de l'électricité plus compétitif. En privilégiant un montage clé en mains, excluant le leadership d'une société spécialisée dans l'éolien, GDF Suez a choisi une autre stratégie se privant d'un véritable savoir-faire. Elle a finalement bâti un projet plus coûteux qui n'a pas su convaincre", commente Jean-Michel Germa PDG de Soper et ex-fondateur et président 20 ans durant de La Compagnie du Vent.