Mardi 23 novembre l'Autorité environnementale (Ae) a rendu son avis (1) sur le projet de cinquième plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) couvrant la période 2021-2025. L'autorité indépendante regrette, en particulier, que ce nouveau volet du PNGMDR ne prenne pas en compte certaines recommandations qu'elle avait formulées en 2016 à l'occasion de son avis sur le PNGMDR pour 2016-2018 (le plan couvrait alors trois ans, contre cinq dorénavant).
Les rejets dans l'eau et l'air laissés de côté
L'Ae formule plusieurs reproches à l'encontre du projet gouvernemental. Tout d'abord, elle estime que l'évaluation environnementale devrait être complétée par une étude des incidences sur l'environnement des choix du plan qui conduisent (ou pourraient conduire) à augmenter les rejets dans l'environnement. Le plan n'évoque pas les rejets dans l'eau, alors que « la gestion des matières et déchets radioactifs génère (…) des rejets importants », explique l'Ae. Même constat pour les rejets dans l'air qui sont passés sous silence.
À l'occasion de l'élaboration du précédent PNGMDR, les pouvoirs publics avaient annoncé que « l'opportunité » d'évaluer la cohérence des filières de gestion des matières et déchets radioactifs, notamment en matière de rejets, « sera à considérer dans la préparation de la prochaine évaluation environnementale stratégique du PNGMDR ». Et l'Ae de regretter que, cinq ans après, « aucune réponse n'[ait] été apportée à cette question ». Cette évaluation des rejets radioactifs devrait pourtant être réalisée « à l'échelle du plan dans son ensemble ainsi que de chaque filière », estime l'Ae.
Les différentes options possibles ne sont pas présentées
L'Ae estime aussi que, pour chaque matière et déchet, l'activité, la nocivité et leur évolution dans le temps devraient être précisées. Cette absence de caractérisation des matières et déchets ne permet pas au public d'appréhender la nature du risque encouru au cours du temps, fait-elle remarquer.
Dans le même esprit, et de façon plus globale, l'Ae considère que les pouvoirs publics devraient présenter les principaux choix du plan en comparant les incidences sur l'environnement des différentes options envisagées au cours de son élaboration. Ce sujet concerne en particulier deux sujets : la valorisation après fusion des déchets métalliques très faiblement contaminés et le fait de laisser les déchets spécifiques sans filière en dehors du plan. À chaque fois, le PNGMDR ne détaille pas les avantages et les inconvénients de ces choix.
Autre reproche : le PNGMDR n'est pas suffisamment précis concernant les volumes de déchets liés au démantèlement des installations nucléaires. L'Ae explique que la mise à l'arrêt de réacteurs nucléaires génèrera 2,2 millions de tonnes de déchets de très faible activité (TFA). Mais les solutions envisagées, au-delà de l'augmentation de la capacité du Centre industriel de regroupement d'entreposage et de stockage (Cires) de Morvilliers (Aube) à 0,9 million de tonnes, ne semblent pas suffisamment précises. Le PNGMDR évoque bien un nouveau centre, l'étude de solutions de stockage décentralisées près des centrales qui seront démantelées, ainsi que la fusion de 900 000 tonnes de déchets métalliques, mais il manque d'une vision globale. « Une stratégie d'ensemble est à mettre au point », estime l'Ae.
Le PNGMDR élude les enjeux financiers
Le second aspect financier concerne la transparence à propos des coûts de gestion des matières et déchets radioactifs, et leur financement. « Il a été observé par le passé que les coûts réels étaient, comme noté par la Cour des comptes, en général, supérieurs aux coûts prévus », explique l'Ae, jugeant qu'« une bonne estimation des coûts est essentielle pour crédibiliser l'analyse de rentabilité d'une filière énergétique ».