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Le Conseil économique, social et environnemental entame sa mue

L'Assemblée nationale a définitivement adopté le projet de loi qui réforme la troisième assemblée. Au menu : organisation de conventions citoyennes, traitement rénové des pétitions et composition remaniée.

Gouvernance  |    |  L. Radisson
Le Conseil économique, social et environnemental entame sa mue
Actu-Environnement le Mensuel N°410
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°410
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« Comme l'a annoncé le président de la République à l'issue du Grand débat, le projet de loi organique permettra au Cese de jouer un rôle dans le développement de la démocratie participative », avait expliqué le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, lors de la présentation du projet de loi organique en conseil des ministres le 7 juillet dernier.

La réforme proposée par le Gouvernement est passée sans trop d'encombre puisqu'elle a été adoptée en lecture définitive par l'Assemblée le 15 décembre par 418 pour et 62 contre. Mais ce score ne doit pas masquer l'échec de la commission mixte paritaire et le rejet du texte par le Sénat. Tout en s'accordant sur la nécessité de réformer cette institution qui s'autosaisit de près de 80 % de ses dossiers, la Chambre haute a dénoncé pêle-mêle le manque d'ambition de la réforme, la réduction des effectifs de l'institution, la légitimation du tirage au sort et l'appauvrissement des études d'impact.

Carrefour des consultations publiques

Les missions historiques du Conseil étaient d'éclairer les pouvoirs publics sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux, ainsi que de traiter les pétitions reçues. Il devient également « le carrefour des consultations publiques », se félicite le Cese. Ces consultations pourront être organisées de sa propre initiative, ou à la demande du Gouvernement ou du Parlement. Elles peuvent prendre différentes formes : conventions citoyennes, groupes de citoyens tirés au sort associés aux travaux d'une commission, ou plateforme numérique.

« Le Cese deviendra (…) la chambre des conventions citoyennes », n'avait pas hésité à vanter le garde des Sceaux lors de la présentation du projet de loi. Une envolée que le ministre n'aurait peut-être pas reprise aujourd'hui alors qu'Emmanuel Macron peine à honorer sa promesse de reprendre sans filtre les propositions formulées par la Convention citoyenne pour le climat.

Le procès en remise en cause de la démocratie représentative par les élus d'opposition rencontre d'ailleurs un certain écho. « Un certain nombre de collègues (…) ont le sentiment que ces jurys de citoyens, en fin de compte, viennent un peu bouleverser le jeu politique, surtout quand un président de la République sort par miracle d'une pochette-surprise le recours au référendum pour faire droit à ces demandes de citoyens », a expliqué le député LR Philippe Gosselin à l'occasion de la lecture définitive du projet de loi. « Il n'y a pas de confusion et encore moins de concurrence entre, d'une part, l'intérêt de recueillir l'avis de citoyens tirés au sort et, d'autre part, l'exercice de la souveraineté nationale par les représentants de la Nation élus au suffrage universel, qui, seuls, ont la légitimité démocratique », avait pourtant pris garde de préciser le ministre de la Justice en ouverture du débat.

« Je rappelle que le Cese recourt déjà à la participation citoyenne ainsi qu'au tirage au sort. Les inscrire ou non dans la loi n'y changera donc rien. En revanche, ce que nous faisons est très important : nous fixons des règles et nous sécurisons les conditions d'organisation », a expliqué le député Modem Erwan Balanant, rapporteur du projet de loi.

Seuil de pétition abaissé à 150 000 signatures

Le texte facilite par ailleurs la saisine du Conseil par voie de pétition. Le seuil permettant de déclencher la saisine est abaissé de 500 000 à 150 000 signatures. L'âge minimal pour soutenir une pétition est, quant à lui, abaissé de 18 à 16 ans. Enfin, les pétitions adressées par voie électronique deviennent recevables.

« Sénat et Assemblée nationale s'accordent sur la nécessité de redonner du sens à la saisine par voie de pétition du Cese, introduite dans la Constitution lors de la révision de 2008. En l'état, nous savons tous que cette saisine ne fonctionne pas (…) Plus qu'un signal, cette disposition très importante et innovante est une ambition de notre part afin de mieux associer les jeunes à notre démocratie. J'espère qu'ils seront nombreux à s'en saisir », a expliqué Erwan Balanant.

Dispense de consultations

La loi renforce par ailleurs la portée des avis du Cese. Elle prévoit en effet que lorsqu'il est consulté sur un projet de loi portant sur des questions à caractère économique, social ou environnemental, le Gouvernement ne procède plus aux autres consultations prévues par la loi ou le règlement. À l'exception toutefois de le consultation des assemblées des collectivités territoriales, des autorités administratives indépendantes ou des commissions statutaires dans la fonction publique. « Le Cese n'a pas les ressources pour se substituer à l'expertise de certaines instances consultatives », déplore toutefois la sénatrice LR Muriel Jourda au nom de la commission des lois.

« La démocratie participative est un défi permanent et multiforme, que nos institutions doivent porter haut et fort. Un rôle accru du Cese new-look sur les consultations publiques, oui, mais pas au détriment des dispositifs de participation du public », avait alerté l'ancien directeur au ministère de l'Environnement, Dominique Bidou, au moment de la présentation du projet de loi.

Dans le cadre de ses travaux, le Cese peut en revanche saisir une ou plusieurs instances consultatives placées auprès des collectivités territoriales. C'est en particulier le cas des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (Ceser). « Des pratiques déjà mises en œuvre par le Cese », tacle Muriel Jourda.

Révision de la composition et du fonctionnement

Le nombre de membres de l'assemblée passe de 233 à 175 selon la répartition suivante : 52 représentants de salariés, 52 représentants des entreprises, 45 représentants au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative (dont huit représentants des outre-mer), 26 représentants au titre de la protection de la nature et de l'environnement.

Le collège des personnes qualifiées est en effet supprimé au sein du Cese. L'objectif ? « Renouer avec sa vocation de représentation de la société civile », avait expliqué le garde des Sceaux. Et ce, alors que ces postes ont bien souvent été utilisés par les exécutifs successifs pour « recaser » certaines personnalités politiques. Des règles déontologiques sont fixées par le nouveau texte. « C'est en quelque sorte une norme ISO en déontologie que nous avons contribué à mettre en place », se félicite la députée socialiste Cécile Untermaier. Les sections sont par ailleurs remplacées par des commissions, permanentes ou temporaires, compétentes pour émettre des avis au même titre que l'assemblée plénière.

Si la réduction du nombre de membres est bien accueillie par certains, elle est toutefois loin de faire l'unanimité. « Prétendre renforcer une institution en diminuant le nombre de ses membres laisse toujours dubitatif », a ainsi réagi la sénatrice Muriel Jourda. « Cette décision satisfait des attentes populistes et conforte l'idée néfaste que nous sommes toujours trop nombreux à nous occuper de la chose publique. Une telle réduction n'apporte aucune garantie, ni du point de vue de la performance de la réflexion ni de celui de la qualité de la démocratie », a tenté de faire valoir Cécile Untermaier.

Le mode de désignation par voie réglementaire suscite d'autres critiques. « Nous souhaitons que ne soient pas exclues de cette représentation les fédérations de chasseurs ou les fédérations de pêche, qui, au même titre que d'autres associations, protègent la nature et l'environnement », a plaidé le député UDI Pascal Brindeau. L'insuffisante représentation des outre-mer est aussi contestée. « Nous avons combattu pour que l'outre-mer soit bien représenté en tant que tel ; il l'est désormais, me semble-t-il, par huit membres contre onze auparavant », pointe Cécile Untermaier.

« Avec cette réforme, une nouvelle ère s'ouvre pour le Cese, assure de son côté Erwan Balanant. Nous avons travaillé dans le cadre de la Constitution – en allant au plus près du bord. J'ai la conviction, comme certaines personnes parfois un peu frustrées par cette réforme, qu'il faudra aller plus loin (…). En attendant, le Cese dispose des outils pour continuer des expérimentations démocratiques vitales à l'amélioration de nos institutions ».

Réactions1 réaction à cet article

Le député MODEM du Finistère, Erwan Balanant, traduit fort bien les réactions mitigées et dubitatives que l'on peut avoir devant cette réforme: "Nous avons travaillé... en allant au plus près du bord. J'ai la conviction.... qu'il faudra aller plus loin". D'ici à ce que les essais de démocratie participative et "d'expérimentations démocratiques" basculent dans le fossé, il pourrait n'y avoir qu'un pas....

Pasisimple | 23 décembre 2020 à 10h23 Signaler un contenu inapproprié

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