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La garantie rurale peut-elle mettre en péril l'objectif ZAN ?

Une capacité de développement de 1 hectare est garantie pour chaque commune d'ici à 2031. Mais elle pourrait favoriser le mitage des constructions et remettre en cause les objectifs de la politique de lutte contre l'artificialisation.

Aménagement  |    |  L. Radisson
La garantie rurale peut-elle mettre en péril l'objectif ZAN ?
Actu-Environnement le Mensuel N°438
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°438
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« Un filet de sécurité pour nos villages de France. » C'est ainsi, pour reprendre les mots du député LR Thibault Bazin, que de nombreux élus locaux perçoivent la garantie rurale prévue par la loi visant à faciliter la mise en œuvre de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN), adoptée définitivement par le Parlement le 13 juillet.

Ce droit au projet, voulu par le Sénat, vise à garantir à chaque commune française une capacité de développement territorial de 1 hectare d'ici à 2031, à condition d'être couverte par un plan local d'urbanisme (PLU) ou un document en tenant lieu, prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026. Aucune condition de densité n'est prise en compte, contrairement à ce que préconisait initialement le Gouvernement. La loi prévoit la possibilité de mutualiser cette surface à l'échelle intercommunale à la demande des maires.

Le Sénat se réjouit des nombreux outils donnés aux maires par ce texte « pour leur permettre de faire face aux objectifs de réduction de l'artificialisation des sols ». De même, l'Association des maires de France (AMF) salue le compromis trouvé avec le Gouvernement qui « devrait permettre aux communes et aux intercommunalités de replacer leur projet de territoire au centre des débats ».

Contradiction avec les objectifs de sobriété foncière

Mais cette capacité d'artificialisation garantie aux communes suscite également de nombreuses critiques, y compris d'associations de collectivités. « Cette garantie universelle donne l'impression qu'on a jeté des confettis d'un hectare partout en France au détriment d'une véritable politique d'aménagement du territoire », a réagi Michel Heinrich, président de la Fédération des Scot, auprès de Localtis.

“ Cette garantie universelle donne l'impression qu'on a jeté des confettis d'un hectare partout en France ” Michel Heinrich, Fédération des Scot
De son côté, Intercommunalités de France regrette l'institution de ce dispositif qui, « dans l'esprit, est contradictoire avec les objectifs partagés de sobriété foncière, et, dans la lettre, risque de créer incertitudes et contentieux dans certains territoires du fait de la complexité du dispositif ». L'association de collectivités se console toutefois avec la possibilité de mutualisation qui est instituée et « appelle les élus locaux à se saisir largement » de celle-ci.

Même son de cloche du côté de France urbaine. L'association des métropoles, agglomérations et grandes villes dénonce cette disposition « basée sur un constat erroné (1) , contreproductive au regard de l'esprit du ZAN et contradictoire avec la nécessaire différenciation territoriale ».

Invitation à bétonner

Les associations de protection de l'environnement se montrent encore plus critiques sur le dispositif. Ainsi, France Nature Environnement (FNE) dénonce une inversion de la logique du ZAN, qui vient s'ajouter aux autres assouplissements apportés à l'objectif fixé par la loi Climat et résilience.

La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) fustige l'élargissement de la garantie rurale à toutes les communes. « Une partie d'entre elles, peu voire très peu denses, figurent pourtant parmi celles qui ont le plus artificialisé au cours des dernières décennies ! s'indigne l'association. Cette concession aux collectivités locales représente une invitation à bétonner toujours plus de terrains agricoles et d'espaces naturels au détriment d'un véritable changement dans l'aménagement du territoire. »

Le ministre de la Transition écologique lui-même avait critiqué cette « garantie universelle » avant de s'y rallier. En mars dernier, il avait déposé un amendement qui fixait un seuil de 1 % des surfaces urbanisées, et non 1 hectare forfaitaire par commune, et prenait en compte la densité des communes. En appliquant la version sénatoriale, avait-il expliqué, la garantie rurale représenterait 34 928 hectares alors que sa proposition représenterait 22 111 hectares. « Donner la même chose à tout le monde est moins juste, mais le 1 % était plus complexe à calculer », a expliqué Christophe Béchu pour justifier son ralliement à la proposition sénatoriale.

Une réforme de la fiscalité s'impose

Pour remédier au risque d'une poursuite soutenue de l'artificialisation, FNE préconise de « densifier l'habitat sans compromettre la qualité de vie », et de donner la priorité aux friches ainsi qu'aux bureaux et logements vacants. Ces préconisations sont partagées par des élus d'opposition. « Eu égard au plus de 170 000 hectares de friches industrielles et aux 900 000 logements vacants qui se trouvent en ruralité, notre priorité doit être de réhabiliter le bâti existant », a exhorté la députée LFI Catherine Couturier, lors de la discussion du texte à l'Assemblée. « C'est probablement le point cardinal, la condition sine qua non de l'atteinte de nos objectifs de non-artificialisation », a même estimé le député communiste Sébastien Jumel.

Mais, pour cela, beaucoup s'accordent à dire qu'une réforme de la fiscalité s'impose. « Il est généralement moins coûteux de construire des logements neufs sur des terres agricoles, plutôt que de reconstruire "la ville sur la ville" », rappelle FNE.

« Le montant de la DGF (dotation globale de fonctionnement), par exemple, est corrélé de manière directe à la croissance et au développement d'une collectivité : plus elle dispose d'infrastructures, de voirie, de services, plus elle perçoit de DGF, a rappelé le député Liot Jean-Félix Acquaviva. De la même manière, plus une commune possède de bâti, plus elle perçoit de taxe foncière. À ce jour, aucune mesure fiscale n'est prévue pour limiter en la matière les effets des évolutions en cours. C'est pourtant un sujet crucial. »

Un chantier que le ministre de la Transition écologique s'était dit, en septembre 2022, prêt à ouvrir mais qui n'a, pour l'heure, pas abouti. Le projet de loi de finances présenté à l'automne en offre de nouveau l'occasion.

1. Ce ne sont pas les grands territoires urbains qui ont le plus artificialisé selon l'association

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