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Relance de l'hydroélectricité : la filière est dans les starting blocks

Depuis plus de dix ans, l'optimisation du parc hydroélectrique est freinée par le contentieux européen sur les concessions. Pourtant, l'équipement ou le suréquipement de nombreux ouvrages permettraient des gains de production et la création de Step.

Energie  |    |  S. Fabrégat
Relance de l'hydroélectricité : la filière est dans les starting blocks
Actu-Environnement le Mensuel N°444
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°444
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Le Gouvernement a bon espoir de débloquer le contentieux européen sur l'ouverture à la concurrence des concessions hydroélectriques. Le projet de loi sur la souveraineté énergétique anticipe d'ailleurs cette issue positive et prévoit une ordonnance pour détailler le nouveau dispositif encadrant leur renouvellement.

Il faut dire que le sujet coince depuis 2010. Résultat : une quarantaine de concessions sont déjà échues et n'ont pas été renouvelées ; au total, 61 le seront fin 2025, indiquait la Cour des comptes dans un rapport publié en 2023. Ce qui a conduit au gel des investissements nécessaires au bon fonctionnement, mais aussi à l'optimisation des ouvrages.

Une dynamique freinée

« Il est important de trouver une solution qui permette de reprendre le développement », soulignait Emmanuelle Verger-Chabot, directrice d'EDF Hydro, lors d'une table-ronde avec les acteurs de l'hydroélectricité, organisée en 2023 au Sénat.

De nombreux autres énergéticiens sont dans les starting blocks et lorgnent sur les concessions d'EDF, qui représentent 80 % du parc concédé, espérant une réelle ouverture à la concurrence. « L'absence de visibilité quant au traitement à appliquer, en particulier aux concessions existantes, freine le dynamisme du secteur. (…) Elle empêche également une identification précise du potentiel de la filière, en particulier concernant les suréquipements, notamment dans la mesure où la majorité du parc hydroélectrique est détenue par un même opérateur », pointait ainsi Engie (actionnaire majoritaire de la Shem et de la CNR), dans sa contribution aux ateliers sur la future Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

La prochaine PPE, dont les grandes lignes ont été mises en consultation fin novembre, table sur une augmentation de puissance du parc hydroélectrique de 2,8 gigawatts (GW) d'ici à 2035, dont 1,7 GW de stations de transfert d'énergie par pompage (Step). Or, l'essentiel du gisement exploitable sans trop de contraintes se situerait aujourd'hui sur l'existant, ce qui explique l'impatience des acteurs.

Sites vierges : d'un gisement potentiel à un potentiel exploitable

La direction générale de l'Énergie et du Climat (DGEC) a publié, à l'automne dernier, une actualisation 2022 du potentiel hydroélectrique français en intégrant la prise en compte des enjeux environnementaux. Pour établir ce gisement exploitable, elle part d'un gisement brut (2 650 MW en sites vierges et 368 MW sur seuils existants) qui diminue au fur et à mesure de l'intégration des enjeux environnementaux : exclusion des cours d'eau de liste 1 (potentiel qui tombe à 1 653 MW sur sites vierges), des cours d'eau de liste 2, réservoir biologique, très bon état écologique, axe grand migrateur… En croisant plusieurs critères, le potentiel sur sites vierges tombe finalement de 2 650 à 384 MW…

“ Il est important de trouver une solution qui permette de reprendre le développement ” Emmanuelle Verger-Chabot, EDF Hydro
Et encore : « C'est un inventaire d'experts qui ne regarde que la géographie et les débits. Ce n'est pas parce que c'est identifié que c'est réalisable », souligne Jacques Pulou, représentant de France Nature Environnement (FNE). Selon lui, optimiser les installations existantes permettrait des gains de puissance suffisants, sans lancer de nouveaux projets néfastes à l'environnement. « On a déjà équipé 90 à 95 % de ce qui pouvait l'être. On est au bout du développement de l'hydroélectricité », estime-t-il.

D'autant que le lancement de nouveaux projets d'envergure se heurte à des enjeux d'acceptabilité, comme le montrent les débats actuels autour du projet Rhônergia porté par la CNR. Quant à la petite hydroélectricité, elle est décriée aussi, pour ses impacts environnementaux face à sa maigre contribution au mix électrique. « Une centaine de centrales de plus de 50 MW représente les trois quarts de la puissance hydraulique et fournit les deux tiers du productible français », rappellent ainsi les agences de l'eau dans leur contribution aux travaux sur la PPE. Celles-ci soulignent par ailleurs que la ressource en eau est déjà impactée par le changement climatique et est l'objet d'autres enjeux, comme le partage des usages. Elles plaident donc, elles aussi, pour une optimisation de l'existant.

Équiper, suréquiper et rehausser

L'idée ? Mettre en place des turbines plus performantes, augmenter les équipements existants lorsque c'est possible, ou encore aménager les barrages non équipés. Cette amélioration de l'existant permettrait d'augmenter la puissance du parc de plusieurs centaines de mégawatts, selon le gestionnaire de réseau RTE, 500 d'ici à 2030-2035 selon le chiffrage d'EDF, mais quasiment le double selon certains concurrents.

Une concession a été renouvelée récemment : celle du Rhône, jusqu'en 2041. Le cahier des charges arrêté en 2002 détaille les investissements futurs prévus par la CNR. Outre le projet Rhônergia sur site vierge, la compagnie prévoit d'installer six petites centrales hydroélectriques sur des barrages existants (1) entre 2031 et 2035, pour un gain de puissance de 5 à 10 MW. Dans les cartons également, la hausse de capacité de l'aménagement hydroélectrique de Montélimar, avec un changement de turbines mais aussi de hauteur d'eau, qui devrait faire gagner 100 MW de puissance à l'horizon 2035. Au total, sur les 500 gigawattheures (GWh) de production annuelles supplémentaires obtenus avec ces projets, Rhônergia ne représente « que » 140 GWh quand l'équipement ou l'optimisation de l'existant apporterait un gain de 360 GWh. La CNR a, par ailleurs, lancé une étude sur les potentiels de suréquipement des aménagements existants, afin d'envisager différentes solutions d'optimisation pour chaque ouvrage (hauteur de chute, débit d'équipement, rendement des machines…). Cette étude devrait aboutir à un premier rapport coût/gains de production.

De son côté, EDF envisage également de telles solutions pour augmenter la puissance hydroélectrique installée. Le groupe aurait également plusieurs projets de rehausse de barrage « sérieux », mais « pas encore programmés », pour augmenter la quantité d'eau stockée et donc le productible. Mais ces projets peuvent eux aussi poser des questions d'acceptabilité puisqu'ils agrandissent la surface immergée, précise Emmanuelle Verger-Chabot.

Et les Step ?

Pour les Step, la future PPE devrait viser 1,7 GW supplémentaire d'ici à 2035. Mais les projets d'envergure visant à créer une nouvelle retenue en amont ou en aval d'une retenue existante, comme sur le lac de Serre-Ponçon (Alpes-de-Haute-Provence) ou à Redenat (Corrèze), se heurtent, eux aussi, à des questions d'acceptabilité.

Finalement, travailler sur l'existant pourrait, là aussi, faciliter les projets. EDF a mené, ces dernières années, des travaux d'amélioration avec augmentation de la capacité de production sur deux des six Step actuellement en service : sur le site de la Coche (Savoie) et de Revin (Ardennes). Il serait également possible de suréquiper la principale Step française de Grand-Maison (1 800 MW) pour gagner 14 % de puissance.

EDF Hydro a d'autres projets dans les cartons, dans la vallée de la Truyère (Aveyron) pour 400 MW de stockage supplémentaire ou sur les lacs Blanc et Noir dans le Haut-Rhin (55 MW). Si le premier (2) semble relancé, les projets de rénovation, comme celui de la Truyère, sont gelés par le non-renouvellement des concessions.

Dans l'Ain, EDF envisage également d'améliorer le fonctionnement des ouvrages de Vouglans-Saut-Mortier, en équipant d'une pompe-turbine le barrage de Saut-Mortier, uniquement doté de turbines aujourd'hui. Cela permettrait de remonter l'eau pour la stocker et produire de l'électricité à la demande (140 GWh par an). Le nouvel équipement pourrait être mis en service en 2029, avec le soutien des associations environnementales comme FNE. « Beaucoup de réservoirs en France ne sont pas dotés de pompes », indique Jacques Pilou. En Isère, « sur le barrage de Chambon, il serait possible de créer une Step de 650 MW », estime le représentant de la Fédération.

1. Caderousse, Donzère, Charmes sur Rhône, La Roche de Glun, Arras, Saint Pierre de Bœuf2. Il s'agit de réhabiliter une installation exploitée par EDF jusqu'en 2002, reliant deux retenues d'eau séparées par un dénivelé d'une centaine de mètres. Une nouvelle concession devra être attribuée auparavant, pour une mise en service autour de 2030 pour une capacité de 55 MW

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