Avec la loi relative à l'industrie verte, promulguée le 23 octobre 2023, le Gouvernement avait affiché l'objectif de diviser par deux les délais d'implantation des usines en les faisant passer de dix-sept mois à moins de neuf mois. A cette fin, le ministère de la Transition écologique soumet à la consultation du public (1) jusqu'au 6 avril prochain un projet de décret (2) de 44 pages destiné à prendre les dispositions d'application de cette loi. Ce texte s'ajoute à un autre projet de décret, mis en consultation six jours plus tôt, visant à accélérer les procédures préalables à l'implantation des projets industriels stratégiques.
Ce nouveau texte comporte également des dispositions supplémentaires de simplification touchant diverses procédures environnementales, ainsi que des dispositions induites par la loi d'accélération de la production d'énergie renouvelables du 10 mars 2023. Outre des mesures portant sur la cessation d'activité des installations classées et l'action de l'État en cas de défaillance d'un exploitant, ce texte contient de nombreuses dispositions destinées à réformer les procédures de participation du public.
En premier lieu, le projet de décret prévoit des dispositions relatives à l'application de la convention d'Espoo sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontalier. Les dispositions prévues visent à anticiper la notification des incidences notables des projets aux États membres de l'UE ou aux États parties à la convention. Elles visent également à adapter cette notification à la nouvelle procédure de consultation du public que le décret prévoit par ailleurs de créer dans le cadre de l'autorisation environnementale.
Mutualisation de la participation du public en phase « amont »
La loi Industrie verte prévoit la possibilité d'organiser un débat public ou une concertation préalable global(e) lorsque plusieurs projets d'aménagement susceptibles de relever de l'obligation de saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) sont envisagés dans les huit ans à venir sur un même territoire délimité et homogène. Les projets faisant l'objet de ce débat ou de cette concertation global(e) sont dispensés de débat public ou de concertation préalable spécifique. Il en est de même « des projets envisagés ultérieurement sur ce même territoire et qui sont cohérents avec sa vocation », explique le ministère, avec la possibilité toutefois donnée à la CNDP de rattraper certains projets.
Ce décret devrait permettre de répondre à la demande de cette dernière. « Le projet de décret (…) vient notamment préciser les modalités de la saisine de la CNDP pour l'organisation d'un débat ou d'une concertation global(e) ainsi que les modalités de la clause de "rattrapage" de la CNDP pour les projets envisagés dès le stade du débat public global et les projets envisagés ultérieurement », explique le ministère.
Participation du public hybride
Le texte contient ensuite plusieurs dispositions destinées à pouvoir mener de front la participation du public, les diverses consultations et l'instruction des demandes d'autorisations environnementales. Il précise également les cas où une consultation publique conjointe peut être organisée si une telle consultation est exigée en même temps dans le cadre d'une demande d'autorisation d'urbanisme et d'une demande d'autorisation environnementale.
La nouvelle procédure, hybride, de participation du public prévue par la loi, baptisée « consultation parallélisée », consiste à remplacer l'enquête publique par une procédure de participation du public par voie électronique (PPVE) mais en conservant le rôle du commissaire enquêteur. « Elle permettra à chacun de connaître, au fur et à mesure de leur émission, les observations et propositions du public, les avis de toutes les instances consultées dans le cadre des procédures, des maires et de l'autorité environnementale », explique le ministère, ajoutant que la création d'une plateforme dématérialisée est prévue.
Cette nouvelle procédure sera applicable « aux projets relevant du champ de l'autorisation environnementale, soumis ou non à évaluation environnementale », indique le ministère. L'enquête publique et la participation du public par voie électronique ne s'appliqueront donc plus que dans des cas résiduels prévus à l'article L. 181-10 du code de l'environnement (3) .
Le projet de décret prévoit, par conséquent, des modalités particulières de saisine par le préfet du président du tribunal administratif en vue de la désignation du commissaire-enquêteur ou de la commission d'enquête. La saisine devra comporter la note de présentation non technique de la demande d'autorisation environnementale et, le cas échéant, le résumé non technique de l'évaluation environnementale.
Défaillance du commissaire enquêteur
Le texte anticipe par ailleurs les cas de défaillance du commissaire enquêteur, de manière à ce que les projets ne soient pas entravés. Une disposition prévoit ainsi la nomination par le président du tribunal administratif d'un suppléant en même temps que la désignation du commissaire-enquêteur, ce suppléant étant amené à prendre le relais en cas de défaillance de ce dernier. Par ailleurs, au cas où le commissaire-enquêteur ne publierait pas le rapport et les conclusions motivées de la consultation dans le délai de trois semaines suivant la clôture de la consultation, il est prévu que l'autorité décisionnaire publie elle-même une synthèse des observations du public et des réponses du porteur de projet.
La loi prévoit que la phase d'examen et de consultation démarre à compter de la réception d'un dossier complet et régulier. Ce qui établit de manière implicite une étape de vérification de la recevabilité du dossier, explique par ailleurs le ministère. Celui-ci annonce, en conséquence, une instruction aux services déconcentrés qui précisera le degré attendu de vérification par les services instructeurs « en fonction des enjeux des projets ». L'autorité administrative compétente pour autoriser le projet pourra demander des compléments sur les pièces déposées pendant la phase d'examen et de consultation du dossier de demande, ces informations complémentaires pouvant être transmises jusqu'à la date de la réunion de clôture de la consultation du public. « Les compléments seront pris en compte dans la mesure où ils ne remettent pas en cause l'économie générale du projet », précise le ministère.
Consultation des autorités et organismes
Le projet de décret adapte enfin les modalités de consultation des différentes autorités et organismes, ainsi que la prise en compte de leur avis. Ceci pour répondre à la loi qui prévoit que l'examen de la demande d'autorisation et les consultations ne forment plus qu'une seule et même phase dans la procédure d'autorisation environnementale. Les avis des organismes consultés sont mis à la disposition du public « à mesure qu'ils parviennent au cours de l'examen du dossier ». Ils sont transmis à l'autorité environnementale uniquement si la consultation du public prend la forme d'une enquête plubique. Les avis des services contributeurs sont pris en compte par les services instructeurs « jusqu'au jour de clôture de la consultation du public », indique, là-aussi, le ministère.
Le texte réduit le nombre de cas où le préfet est tenu de rejeter une demande d'autorisation environnementale. Il sera contraint de le faire uniquement en cas d'avis conforme défavorable d'une autorité consultée ou en cas d'incompatibilité entre le projet et le document d'urbanisme, et encore, dans ce dernier cas, uniquement si une procédure de révision de ce document n'est pas engagée. Est en revanche supprimée l'obligation de rejet de la demande par le préfet en cas de dossier incomplet ou irrégulier après demande de régularisation, ou lorsque l'autorisation ne pourrait être accordée dans le respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4 du code de l'environnement (4) .