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Planification écologique : une déclinaison territoriale participative, mais très encadrée

Officiellement lancée sous la forme de COP régionales, la territorialisation de la planification écologique prône le débat et la coopération avec le terrain. Mais les préfets gardent la main sur les conditions de sa mise en œuvre.

Gouvernance  |    |  N. Gorbatko
Planification écologique : une déclinaison territoriale participative, mais très encadrée

Si les modalités de la planification écologique peuvent susciter des désaccords, un point au moins faisait consensus : celui de sa nécessaire déclinaison territoriale, annoncée de longue date par le président de la République, Emmanuel Macron. Restait à en définir les contours. C'est désormais chose faite. Devant les présidents des régions de France, à Saint-Malo, jeudi 28 septembre, la Première ministre a matérialisé la démarche en lui donnant la forme de COP régionales, inspirées des conférences des parties des Nations unies. Leur objectif : définir, pour chacune de ces collectivités, les cibles à atteindre en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de biodiversité, ainsi que les leviers à mettre en œuvre, afin de respecter celles du pays pour 2030, en y intégrant la gestion durable des ressources et l'adaptation au changement climatique.

Le dispositif était détaillé dès le lendemain dans une circulaire aux préfets. La gouvernance de ces conférences reviendra conjointement aux préfets et aux présidents de régions, soutenus par les différents services et agences de l'État comme les Directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), l'Agence de la transition écologique (Ademe) ou l'Office français de la biodiversité (OFB), précise le document, en y associant « étroitement » les territoires et tous les niveaux de collectivités : Départements, pays, parc naturels régionaux, pôles d'équilibre territoriaux et ruraux...

Les préfets à la manœuvre

Une collaboration recherchée non seulement parce qu'une partie des leviers et des moyens nécessaires relève de leurs champs de compétences, mais aussi parce que nombre d'entre eux se sont déjà engagés dans ce type d'initiatives, explique la Première ministre. La démarche s'affiche aussi relativement coopérative. « En fonction des conditions locales », les préfets pourront ainsi faire participer aux débats les autres parties prenantes locales : entreprises, organismes consulaires, associations, jeunes… « Il est essentiel que les acteurs puissent collectivement s'approprier, au niveau de chaque territoire, les objectifs et les moyens de la planification écologique et les traduire à l'échelle du bassin de vie de chaque citoyen », indique Élisabeth Borne.

Une approche confirmée par le ministre de la Transition écologique, le 12 octobre, à Orléans, devant les élus des intercommunalités. « Nous ne ferons pas sans les territoires », a promis Christophe Béchu, en leur précisant qu'une latitude serait laissée aux méthodes et préférences locales. Mais derrière cette volonté de faire jouer le collectif, « sans tutelle, dans le respect de ses compétences », selon les propres termes d'Élisabeth Borne, un certain penchant pour l'encadrement se profile malgré tout. « En lien avec les attentes des exécutifs au sein du territoire régional », certes, c'est en effet bel et bien aux préfets que revient le soin d'organiser le déploiement de la planification territoriale et de conduire les débats, dont la forme est laissée à leur « appréciation », sur le diagnostic, les efforts à fournir et les leviers à actionner.

Une territorialisation à tiroirs

“ Il est essentiel que les acteurs puissent collectivement s'approprier, au niveau de chaque territoire, les objectifs et les moyens de la planification écologique et les traduire à l'échelle du bassin de vie de chaque citoyen ” Élisabeth Borne
Secteur par secteur, un tableau de bord établi par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) leur précise le panorama des leviers d'action, pas moins de 43, et, à titre « illustratif », les objectifs déclinés pour chaque région. La planification devra par ailleurs intégrer les volets déjà engagés, comme le Plan eau, la rénovation des écoles ou les zones d'accélération des énergies renouvelables. Les préfets auront également la responsabilité d'inciter les organisations infrarégionales à décliner cette feuille de route à leur échelle, afin d'améliorer son articulation avec les leviers identifiés au niveau des départements, des intercommunalités et des communes.

Dans ce but, s'ils l'estiment pertinent, ils pourront ainsi organiser des COP à l'échelle départementale afin de permettre aux élus concernés de mieux s'approprier les sujets. Une étape essentielle, jugent certains sénateurs dans leur rapport d'information, publié le 9 novembre dernier (« Engager et réussir la transition environnementale de sa collectivité »), « pour ne pas prescrire directement des solutions qui risquent d'être insatisfaisantes ou inadaptées ». La capacité à s'inscrire en coopération avec les autres acteurs n'est pas seulement une modalité d'action pertinente, analysent-ils, « mais bien une condition essentielle de réussite d'une politique de transition ». Ces derniers encouragent également la réalisation d'un diagnostic « solide et consolidé », avec l'aide, si possible, de groupements régionaux d'experts sur le climat (Grec).

Une contractualisation en bout de ligne

Bénéficiant d'une gouvernance renforcée et rebaptisés « contrats de réussite pour la transition écologique », les anciens contrats de relance et de transition écologique (CRTE) deviendront l'outil de mise en œuvre « au niveau le plus fin », dans les bassins de vie, de cette planification territoriale. Ils bénéficieront d'un engagement pluriannuel de l'État. Une mesure qui satisfera peut-être, là encore, les sénateurs adeptes d'une « contractualisation locale » avec « un état stratège ». Pour pallier la difficile mobilisation de certains maires, les élus de Chambre haute recommandent toutefois de commencer par des projets concrets, « qui engagent une dynamique vertueuse ».

À titre d'exemple, ils citent les actions susceptibles de générer des économies, d'améliorer le cadre de vie ou de profiter à la population, et finalement de fabriquer « de la confiance, de la coopération et des alliances », comme la fourniture d'arbres fruitiers, la gratuité des transports en commun, l'aide à l'achat de vélos ou le don de composteurs. La feuille de route régionale sera établie, pour finir, sur la base de tous ces engagements. Les opérations seront menées tambour battant : alors que la planification nationale aura mis un an pour sortir des limbes, celle des territoires devra être bouclée « d'ici à mai 2024 et au plus tard d'ici à l'été ». Les diagnostics, quant à eux, devront être achevés avant la fin du mois de décembre 2023 et les débats cinq mois plus tard.

Lancement officiel et initiatives volontaires

Afin d'engager la dynamique, Christophe Béchu a officiellement lancé « l'ouverture des COP », à Metz, mardi 14 novembre, en prenant pour exemple la démarche de la Région Grand Est, inaugurée en juillet 2023. « L'État et le conseil régional avancent conjointement sur l'ensemble des sujets ayant trait à la transition écologique et au développement économique, qu'il s'agisse des schémas régionaux, de la proposition de dispositifs d'aide ou encore de l'accompagnement commun des collectivités du territoire, avec notamment le coportage des CRTE », explique le Gouvernement. L'initiative mobilise aujourd'hui quelque 200 personnes (élus, associations, entreprises, fédérations, syndicats…), dans sept groupes de travail coprésidés par les membres du conseil régional et les sous-préfets. Un premier diagnostic des trajectoires a d'ores et déjà été établi. Les actions et autres travaux régionaux lancés précédemment seront intégrés au format COP.

Bien que qualifié de « première » par Christophe Béchu, la démarche de la Région Grand Est a cependant connu quelques précédents. De son propre chef, la métropole de Rouen teste en effet le concept depuis 2018, avec quelque 70 communes. Les Régions Centre-Val de Loire et Nouvelle-Aquitaine s'y emploient depuis 2019. Les résultats s'avèrent probants.

Citoyens, entreprises, collectivités territoriales, agences publiques, établissements financiers… En Centre-Val de Loire, un maximum d'acteurs ont été mobilisés « dans toute leur diversité ». Ensemble, ils ont défini cinq leviers d‘action : protection des milieux naturels et de la biodiversité, rénovation et une approche durable du bâti, transformation de la mobilité et des transports, durabilité de l'agriculture et des modes de consommation, action sur les procédés industriels, la gestion des déchets et l'économie circulaire. « Tous les deux ans, un retour est fait sur les résultats de la période, de nouveaux objectifs sont définis, avec une stratégie et des moyens concrets pour y répondre. À l'issue de ce travail, un nouvel accord COP est rédigé et signé par la Région et ses partenaires », explique l'exécutif centro-ligérien sur le site qu'il a réservé au sujet. Du côté de la métropole rouennaise, plus de 1 100 engagements ont été pris.

Les finances seront-elles à la hauteur ?

Si la méthode COP semble séduire les intéressés – avec plus ou moins de réserves quant aux modalités de son application, reste à savoir si les finances suivront pour des collectivités territoriales aux capacités d'autofinancement en baisse. Pour atteindre la neutralité carbone, ces dernières devront investir au moins 12 milliards euros chaque année jusqu'en 2030. Or, elles n'y consacrent aujourd'hui que 5,5 milliards par an, rappellent les sénateurs. Ces parlementaires stigmatisent notamment la rigidité de la séparation entre les dépenses d'investissement et les dépenses de fonctionnement, l'encadrement de ces dernières imposé par l'État, une fiscalité locale rarement incitative et des fonds de compensation de la TVA aux effets contreproductifs.

« D'un côté, la stratégie nationale bas carbone mise très gros sur des investissements massifs et rapides des collectivités locales dans de nombreux secteurs, comme les transports collectifs, les infrastructures cyclables ou encore la rénovation des écoles et autres bâtiments publics. Mais de l'autre, personne ou presque ne cherche véritablement à savoir si elles ont les moyens de faire ce qu'on attend d'elles », remarque François Thomazeau, chercheur de l'institut I4CE, dans un éditorial du 10 novembre dernier. Pour celui-ci, aucune feuille de route climatique ne sera traduite en actions si elle ne repose pas sur une évaluation préalable de sa faisabilité financière par les collectivités. Selon trois scénarios sur quatre élaborés par l'institut, le niveau total des dépenses d'équipement devrait atteindre 80 milliards d'euros en 2030, au lieu de près de 55 milliards aujourd'hui.

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