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“Les compétences du maire en matière d'environnement sont variées”

Alors que les nouveaux conseils municipaux issus des urnes vont élire leur maire, Philippe Billet, Professeur agrégé de droit public, détaille pour Actu-environnement les compétences du maire et du conseil municipal dans le domaine de l'environnement.

Interview  |  Gouvernance  |    |  L. Radisson
   
“Les compétences du maire en matière d'environnement sont variées”
Philippe Billet
Professeur agrégé de droit public (Université Jean Moulin - Lyon 3), Directeur de l'Institut de droit de l'environnement de Lyon
   

Actu-Environnement.com : Rappelez-nous quelles sont les principales compétences du maire en matière d'environnement ?

Philippe Billet : Ses compétences sont variées, avec des fondements juridiques divers. Elles se partagent essentiellement entre police générale de l'ordre public et polices spéciales. Au titre de la première, le maire doit veiller à la sécurité et à la tranquillité publiques, ce qui implique notamment de prévenir par les précautions convenables et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux calamiteux tels que avalanches, inondations, incendies, pollutions…. Le maire est seul titulaire de ce pouvoir, qu'il ne peut pas déléguer. Les mesures qu'il prend dans ce cadre, si elles ont des incidences matérielles (construction d'un mur paravalanche…), sont à la charge de la commune. Le maire peut aussi, dans le cadre de ce pouvoir de police, suppléer la carence du préfet, comme en matière d'installations classées, mais seulement en cas d'urgence justifiée par un péril grave et imminent, et à condition que sa mesure reste temporaire. Ce pouvoir de substitution ne l'autorise cependant pas à intervenir en matière d'OGM ou d'antennes téléphoniques, comme l'a précisé la jurisprudence, même au nom du principe de précaution.

AE : Et au titre de ses pouvoirs de police spéciale ?

Ph. B. : A ce titre, il est notamment compétent pour régler le régime de la collecte des déchets ménagers, mobiliser des sanctions administratives pour imposer la remise en état des terrains pollués par des déchets abandonnés illégalement, réglementer la circulation des véhicules 4X4 dans les espaces naturels. Il peut déléguer ses compétences dans ce cadre, pour autant que la réglementation le prévoit. Ce qui est le cas pour la collecte des déchets ménagers dont il peut déléguer le pouvoir de police au président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en ce domaine. Il reste alors informé des mesures adoptées. Il a un rôle plus dynamique en matière de risques : il arrête et met en œuvre le plan communal de sauvegarde et, si la compétence d'établissement de ce plan devient intercommunale, il reste compétent pour sa mise en œuvre sur le territoire de sa commune.

Il exerce également des pouvoirs importants en matière d'urbanisme puisqu'il est compétent de plein droit pour délivrer les autorisations d'occuper le sol, compétence qu'il peut déléguer à un adjoint ou au président de l'EPCI compétent.

Il ne faut, enfin, pas oublier que le maire est également officier de police judiciaire et qu'il peut, à ce titre, dresser procès-verbal de constat d'infraction en matière de pollution de l'eau et des milieux aquatiques, d'abandon illégal de déchets, ou encore en matière d'air ou d'espaces et de patrimoine naturels.

AE : Quelles sont les compétences qui relèvent en propre du maire et celles qui relèvent du conseil municipal ?

Ph. B. : Les compétences du maire ne doivent pas être confondues avec celles du conseil municipal, dont il exécute les décisions. A aucun moment, le conseil municipal ne peut s'immiscer dans les pouvoirs de police du maire. C'est, par exemple, le conseil municipal qui approuve le plan local d'urbanisme et le plan climat-énergie territorial pour les communes de plus de 50.000 habitants, ou qui décide de la mise en œuvre des dispositions combinées du code rural et du code de l'environnement lui permettant d'intervenir pour réaliser des travaux de prévention de certains risques naturels ou d'entretien de cours d'eau, ou d'organiser le service public de gestion des eaux pluviales.

AE : La commune a-t-elle tendance à perdre ou à gagner de nouvelles compétences en matière d'environnement ?

Ph. B. : La reconfiguration des intercommunalités lui fait sans doute perdre fonctionnellement une partie de ses compétences, mais cette redistribution tend à rationnaliser leur exercice dans des domaines où une approche territoriale plus large que le territoire communal s'impose presque naturellement. La protection et la mise en valeur de l'environnement, comme l'assainissement, restent des compétences optionnelles pour les communautés de communes et d'agglomération, mais elles deviennent obligatoires pour les communautés urbaines, au même titre que la contribution à la transition énergétique ou la gestion des déchets ménagers et assimilés. La métropole, dernière née, exerce de plein droit des compétences environnementales à la mesure de son territoire.

AE : Ces compétences évoluent-elles du fait de l'adoption de nouveaux textes ?

Ph. B. : L'évolution de la réglementation n'a pas fondamentalement modifié ce jeu de compétences et leur répartition institutionnelle. La loi du 7 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Mapam) donne ainsi compétence à la métropole du Grand Paris en matière de lutte contre la pollution de l'air et les nuisances sonores, soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie, élaboration et adoption du plan climat-énergie territorial ainsi que de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations. Ces compétences, à quelques nuances près, sont également celles de la métropole de Lyon, qui sont ainsi confortées par rapport au schéma précédemment retenu pour la Communauté urbaine de Lyon, étant "rajoutés" la création et l'entretien des infrastructures de charge nécessaires à l'usage des véhicules électriques ou hybrides rechargeables, comme pour la métropole Aix-Marseille-Provence, l'eurométropole de Strasbourg ou la métropole européenne de Lille. Les seules véritables nouveautés concernant les communes et intercommunalités sont relatives à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, l'extension de la compétence en matière de véhicules électriques et hybrides rechargeables, et la réduction de la congestion urbaine et des pollutions et nuisances affectant l'environnement. De son coté, plus modestement, la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) évoque à peine les communes, et autorités associées, pour imposer l'avis des maires des communes (ou présidents des EPCI) sur le territoire desquelles sont situés les projets de secteur d'information sur les sols.

AE : Quels sont les services qui peuvent être délégués à des opérateurs privés ? Quelle est la tendance actuelle ?

Ph. B. : La compétence des communes et intercommunalités pour gérer certains services publics liés de près ou de loin à l'environnement (distribution d'eau potable, assainissement, gestion des déchets ménagers et assimilés, transports en commun…) n'est pas nécessairement exercée en régie directe et repose le plus souvent sur une délégation à des structures privées. On peut cependant relever, dans le cadre de certaines structures intercommunales, une inversion du mouvement qui avait conduit au tout-délégation, par une reprise en main des compétences. Ceci peut s'expliquer par des raisons financières et un besoin d'autonomie, mais aussi un renforcement des compétences humaines et techniques de ces collectivités du fait du jeu de l'intercommunalité. C'est le mouvement inverse qui affecte l'Etat et qui peut expliquer certaines nouvelles compétences locales, comme l'illustre le transfert de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations, qui rejoint le transfert progressif du domaine public fluvial. L'Etat n'a plus les moyens techniques et financiers d'assurer cette mission traditionnellement régalienne et se défausse sur les communes et intercommunalités, y compris en ce qui concerne la responsabilité juridique en cas de dommages.

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