Alors que les projets de power to gas se multiplient en France, les professionnels attendent un coup de pouce des pouvoirs publics pour lancer cette technologie de stockage de l'électricité par le gaz. Un club professionnel vient d'être lancé.
Le développement massif des énergies renouvelables devrait engendrer des besoins croissants en stockage, afin de mettre en adéquation cette production d'électricité verte avec les périodes de forte demande. Aujourd'hui, les filières du stockage électrique et du power to gas sont en pleine ébullition. "Le power to gas n'est pas destiné à la réserve primaire, expliquait Laurent Bedel, du CEA-Liten, lors du colloque dédié au stockage organisé par l'Association technique énergie environnement (Atee), les 22 et 23 novembre. Il permet de stocker de grandes quantités d'énergie sur du moyen terme. Il n'y a donc pas de compétition entre les technologies, elles sont complémentaires". Un point de vue partagé par Bertrand Amelot, DGA commerce et marketing chez McPhy : "Le Lithium ion, c'est pour quelques heures de stockage. L'hydrogène est destiné à un stockage plus long". Pour la mobilité, idem. Si les batteries peuvent être pertinentes pour les véhicules, Alstom planche notamment sur des trains fonctionnant à l'hydrogène…
Lancement du club Power to gas
L'Atee a lancé officiellement, le 22 novembre en marge de son colloque, un club professionnel Power to gas, afin de structurer la filière et d'identifier les leviers nécessaires à l'émergence des projets. "Des groupes de travail réservés aux membres du Club permettront de favoriser la mise en commun d'expériences et d'études, de fédérer les acteurs de la filière susceptibles de faire naître de nouveaux projets ou encore d'établir les conditions réglementaires et économiques pertinentes pour assurer le développement de la technologie", explique l'Atee, qui précise que le club pourrait rapidement compter une trentaine d'adhérents, parmi les acteurs de la filière en France.
Aujourd'hui, plusieurs projets pilotes de power to gas sont dans les cartons en France. Mais alors que le marché n'existe pas encore, les professionnels de cette filière demandent un soutien de l'Etat, afin d'encourager le développement de cette technologie.
Les projets se multiplient et les applications aussi
Les différents projets en cours de développement permettront d'expérimenter plusieurs applications de la technologie : injection dans le réseau de distribution ou de transport de gaz, stockage souterrain, alimentation de véhicules …
Le plus ancien, le projet Myrte, a été lancé en Corse en 2012. Expérimental, il vise à transformer l'électricité produite par une centrale photovoltaïque en gaz. Une pile à combustible est couplée au réseau électrique afin de l'alimenter lors des périodes de pics de consommation. Ici, l'idée est de faire du power to power.
Le projet Grhyd, démarré à Dunkerque (Hauts-de-France) en 2013, vise quant à lui à produire de l'hydrogène à partir de l'électricité produite par des éoliennes et à l'injecter dans le réseau de distribution de gaz d'un écoquartier (20%). Un mélange hydrogène-gaz naturel (hythane) alimentera également une flotte de bus.
Storengy, avec le projet Methycentre, souhaite valoriser une production éolienne et photovoltaïque et le CO2 produit par un site de méthanisation sur le site de stockage de Céré-la-Ronde (Centre-Val-de-Loire). Le méthane produit pourra être injecté dans le réseau ou dans le site de stockage et/ou utilisé pour des usages domestiques ou de mobilité. L'hydrogène produit alimentera des véhicules ou des deux roues. "Notre objectif est de pouvoir répliquer ce pilote partout où il y a à la fois un réseau électrique et gaz", explique Yannick Bonin, chef de projet chez Storengy. La société porte d'autres projets, comme Hygreen Provence, du côté de Manosque, qui vise à valoriser l'électricité d'un territoire qui a l'ambition de devenir 100% énergies renouvelables, en stockant l'hydrogène en cavité saline. L'étude de faisabilité est en cours. En Bourgogne-Franche Comté, la société planche avec TGIF sur un projet d'injection d'hydrogène dans un stockage aquifère.
Enfin, le projet Jupiter 1000, qui devrait être mis en service à Fos-sur-Mer (PACA) en 2018, transformera l'électricité d'origine éolienne en hydrogène et/ou méthane de synthèse, afin de l'injecter dans le réseau de transport de gaz.
Des mécanismes de soutien pour créer les marchés de demain
Les horizons de développement du power to gas ne sont pas immédiats. "Nous avons néanmoins besoin de pilotes soutenus, même s'il n'existe pas encore de marché en France", souligne Bruno Langlois, directeur du développement d'Atmostat. Selon lui, les marchés du power to gas ont un horizon 2020-2030 pour les sites isolés, les îles, les régions enclavées, les pays émergents, pour des besoins inférieurs à 500 kW. En France et en Europe, les marchés devraient émerger sur la période 2030-2050, pour des applications de stockage et de services réseau et des besoins supérieurs à 5 MW.
"Nous avons besoin d'un coup de pouce pour que ça démarre", confirme Yannick Bonin, de Storengy. Pour l'hydrogène pur, ce pourrait être une obligation de part verte dans la consommation industrielle d'hydrogène, un système de garanties d'origine ou encore des services systèmes dédiés au power to gas. Un système de garanties d'origine ainsi que la mise en place d'un mécanisme de soutien pour l'injection, comme c'est le cas pour le biogaz, pourraient favoriser les projets visant la production de méthane de synthèse.
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