Alors que le projet de nouveau code minier doit être remis demain à Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, et à Philippe Martin, ministre de l'Ecologie, l'avocat Arnaud Gossement a publié sur son blog la version en date du 5 décembre. Une version qui présente encore certains points à trancher à partir d'options présentées entre crochets dans le document.
Le groupe de travail réuni autour du conseiller d'Etat Thierry Tuot s'apprête à remettre un projet de quelque 90 pages divisé en neuf livres thématiques : principes, exploration et exploitation, travaux miniers, police des mines et responsabilité, santé et sécurité au travail, autres dispositions sociales, territoires, milieux et usages, outre-mer et, enfin, fiscalité.
A noter, cependant, que le livre traitant de l'outre-mer est vide, le groupe de travail n'ayant pas abordé la question. Le sujet avait donné lieu à de fortes tensions entre l'Etat, les élus locaux et les associations écologistes, en prélude au remplacement de Nicole Bricq par Delphine Batho au ministère de l'Ecologie.
Preuve que l'option est sérieusement étudiée, le projet présenté par Thierry Tuot prévoit que certains points seront précisés une fois l'ordonnance adoptée.
Le renforcement de la consultation du public constitue l'une des attentes majeures de la refonte du code minier. En l'occurrence, le texte prévoit une information, une consultation et une participation "proportionnées" du public et des collectivités territoriales selon deux axes : l'objet de la décision et son incidence sur l'environnement. Pour certaines situations, le projet de code établit une "procédure renforcée d'information, de participation et de consultation du public" et présente des options plus précises.
Cependant, il ne s'agit pas d'une règle générale et l'application de la procédure renforcée est soumise au pouvoir discrétionnaire de l'administration. Les services administratifs peuvent, "à titre dérogatoire et exceptionnel", soumettre l'octroi d'un titre minier ou d'une autorisation de travaux miniers à la procédure renforcée, indique le texte. Une option, présentée entre crochets, donc non retenue, consisterait à soumettre à cette procédure les décisions suscitant une opposition majeure de la part du public ou nécessitant la mise en œuvre de procédés techniques nouveaux. Les hydrocarbures non-conventionnels ne seront donc concernés que si l'administration le juge opportun.
Lorsque la procédure est ouverte, l'administration crée "un groupement momentané d'enquête qui associe l'ensemble des parties prenantes intéressées du périmètre géographique visé". Il est doté de la personnalité morale, présidé et administré par le préfet de département ou son délégué, doté de moyens financiers. Pour son enquête, il peut demander au porteur du projet des documents complémentaires de ceux fournis dans le dossier initial et engager des expertises.
"Les conclusions du groupement momentané d'enquête, qui sont rendues publiques, formulent une recommandation motivée à l'autorité administrative sur le sens de la décision à prendre", stipule le projet, ajoutant que "l'autorité administrative statue sur la demande dans un délai de deux mois après la publication des conclusions du groupement momentané d'enquête".
Les permis d'exploration accordés sous trois mois
En dehors de la procédure renforcée, l'attribution d'un permis minier se fait après information des collectivités territoriales susceptibles d'être impactées et après mise en concurrence. Mais, attention, "en cas de silence gardé par l'autorité administrative pendant plus de trois mois sur une demande à compter du début de la procédure de mise à disposition du public, le permis sollicité est réputé implicitement accordé à compter de la date à laquelle le dossier de demande a été déclaré complet", prévoit le document provisoire. Seul un décret en Conseil d'Etat peut instituer un délai différent compris entre 2 mois et 2 ans.
Quant aux travaux miniers, le texte les soumet aux règles des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Les travaux miniers, qui seront définis dans une liste établie par décret en Conseil d'Etat, après avis du Haut conseil des mines et du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, seront soumis "à autorisation, à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, ou à déclaration suivant la gravité des dangers ou des inconvénients que peut présenter leur mise en œuvre". D'autres critères seront pris en compte, tels que la nature de la substance visée, l'usage du sous-sol, la manière de procéder aux opérations ou encore la sensibilité environnementale des zones susceptibles d'être affectées par le projet. Quant à la procédure administrative encadrant les autorisations de travaux, elle est identique à celle qui régit les ICPE puisqu'elle s'appuie sur les articles L. 512-1 et suivants du code de l'environnement.
Une stratégie minière indicative ou prescriptive ?
Parmi les innovations figure la création d'un "schéma national minier de valorisation et de préservation du sous-sol" dont le statut n'est pas encore arrêté. Certains acteurs l'envisagent comme "un forum national de discussion" (option principale retenue dans la rédaction) alors que d'autres souhaiteraient qu'il soit prescriptif (option présentée entre crochets). D'ailleurs, la compatibilité des décisions administratives avec le schéma n'est envisagée qu'à titre optionnel.
En d'autres termes, il pourrait "décrire", ou "[définir]", "les conditions dans lesquelles l'exploration et l'exploitation des substances et des usages du sous-sol (…) peuvent être [doivent être] conciliées avec la protection de l'environnement, de la santé publique et de celle des travailleurs du secteur".
Ce schéma décrira ou définira les orientations nationales de valorisation des ressources, "les priorités, les techniques et les limites" de l'exploration ou de l'exploitation au regard des exigences environnementales et de santé publique, un état des lieux des ressources connues ou estimées du sous-sol français, l'impact de l'exploitation des ressources du sous-sol sur les masses d'eau souterraines, un plan pluriannuel de prospection des ressources du sous-sol, ainsi que la présentation, par une cartographie, des enjeux nationaux mis en évidence. Bref, le schéma devra fixer un cap.
Il sera élaboré par les services administratifs, après avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et du Haut conseil des mines, une instance créée par ce projet de code minier dont l'objet est de rassembler les parties prenantes afin de conseiller le ministre chargé des mines. Le projet de code minier envisage d'appliquer au schéma les dispositions relatives à l'évaluation environnementale prévues par le code de l'environnement, mais il ne s'agit que d'une option entre crochets.