
Mercredi 1er juin 2011, un groupe d'experts de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a rendu un rapport préliminaire louant la réponse apportée par Tepco, l'opérateur de la centrale de Fukushima, et les autorités japonaises, suite à la catastrophe. Cependant les spécialistes issus de 12 pays jugent que l'évaluation et la prévention des risques ainsi que l'indépendance des autorités de sûreté doivent être améliorées.
Le groupe, formé par l'AIEA et chargé "de tirer les enseignements de l'accident susceptibles d'aider à améliorer la sûreté nucléaire partout dans le monde", s'est rendu au japon du 22 au 30 mai avec en point d'orgue une visite de la centrale accidentée.
Le pré-rapport passe en revue les premières leçons de la catastrophe dans trois domaines : les risques extérieurs, la gestion des accidents sévères et la préparation visant à faire face aux crises. La version finale sera remise lors de la Conférence ministérielle sur la sûreté nucléaire qui se tiendra du 20 au 24 juin à Vienne (Autriche) au siège de l'Agence.
Une réponse "exemplaire"
La première conclusion est sans appel : "la réponse sur le site [de la centrale] a été exemplaire et a abouti à la meilleure approche pour assurer la sécurité." Cette exemplarité est "particulièrement illustrée par l'équipe dévouée, déterminée et compétente."
Par ailleurs "les dispositions prises à long terme pour protéger le public, y compris l'évacuation de la zone autour des réacteurs accidentés, ont été impressionnantes et extrêmement bien organisées." En particulier, le programme de stabilisation proposé par Tepco est validé par l'Agence au regard de la situation actuelle, même s'"il nécessitera des modifications dès lors que de nouvelles informations seront disponibles."
À plus long terme, un plan plus large visant la restauration des zones contaminées en dehors du site et le retour des populations évacuées doit "démontrer au monde ce qui peut être atteint en termes de réponse pour de tels événements nucléaires extrêmes."
L'AIEA ne valide pas les critiques faite aux autorités
Ce faisant, l'AIEA rejette les critiques formulées par certains experts qui doutent de l'efficacité des mesures de stabilisation entreprises par l'opérateur Tepco.
De même, elle ne souscrit pas aux critiques, concernant l'évaluation des rejets radioactifs et l'étendue de la contamination au Japon, formulées par la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (Criirad), l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'Ouest (Acro) et Greenpeace s'agissant de la contamination marine.
L'AIEA concède néanmoins qu'"un programme, approprié et établi au moment opportun, de suivi de l'exposition du public et des travailleurs et de surveillance sanitaire serait bénéfique."
À l'origine, le site est une falaise de 30 mètres qui a été creusée pour installer les réacteurs à sept mètres au dessus du niveau de l'océan.
"Le fait d'avoir abaissé artificiellement de plus de 20 mètres l'ensemble du relief préexistant pour descendre les réacteurs, pour bien évidemment économiser la hauteur nécessaire pour aspirer l'eau de mer et refroidir le système, aura été, si je devais conclure en une seule phrase, la raison principale de l'accident dans la mesure ou si on avait laissé ça dix mètres plus haut ou sur la terrasse à 30 mètres cela aurait coûté le prix de faire monter l'eau mais il n'y aurait eu aucun accident", a-t-il estimé.
Par contre les conclusions de l'AIEA concernant l'évaluation des risques et l'organisation de la filière nucléaire japonaise sont moins favorables.
"Le risque de tsunami a été sous-estimé" jugent les experts de l'AIEA, ajoutant que "les concepteurs et les opérateurs de centrales nucléaires devraient évaluer correctement les dangers naturels pour protéger les installations, ainsi que mettre à jour périodiquement ces estimations et leurs méthodes d'évaluation."
Sur le plan technique, ils recommandent "une défense en profondeur, des séparations physiques, des exigences diversifiées et redondantes face aux événements extérieurs et en particulier [...] les inondations extrêmes."
L'indépendance de la NISA mise en cause
Enfin, s'agissant des autorités de sûreté nucléaire, les spécialistes préconisent qu'elles "tiennent compte des événements extérieurs extrêmes de façon adéquate, y compris lors de leurs inspections périodiques." Par ailleurs elles "devraient s'assurer que l'indépendance de l'activité de régulation et la clarté des rôles soient préservées en toutes circonstances, comme le préconisent les Standards de sûreté de l'AIEA."
Ces remarques, remettant en cause à demi mots le sérieux et l'indépendance des autorités japonaises vis-à-vis des opérateurs, forment probablement la principale critique formulée à l'encontre de l'organisation générale de la filière nucléaire japonaise et de l'Agence de sûreté nucléaire japonaise (NISA) en particulier.