Mercredi 21 décembre, les députés ont adopté en première lecture le projet de loi de ratification des ordonnances du 27 juillet portant sur l'autoconsommation et du 3 août 2016 adaptant certaines dispositions relatives aux énergies renouvelables et aux réseaux d'électricité et de gaz. Neuf amendements ont été adoptés en séance.
Les principaux concernent la mise en place d'un dispositif de vente aux enchères par l'Etat des garanties d'origine et la création d'une nouvelle exonération de contribution au service public de l'électricité (CSPE) au bénéfice de certains autoconsommateurs. Le projet de loi doit encore être validé par le Sénat. Il devrait être débattu le 24 janvier par la commission des affaires économiques de la chambre haute.
Retour des garanties d'origine pour les installations de plus de 100 kW
L'une des principales modifications apportées au projet concerne la suppression des garanties d'origine pour les énergies renouvelables soutenues par une obligation d'achat ou un complément de rémunération. Dans l'esprit du gouvernement, cette suppression vise notamment à éviter une double rémunération des producteurs qui bénéficient de ces dispositifs de soutien et vendent par ailleurs des garanties d'origine. Mais ce principe de non-cumul est très critiqué et Emmanuelle Cosse, ministre du Logement, a tenté de le défendre en introduction des débats. Il "est indispensable pour sécuriser juridiquement les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables", a-t-elle expliqué, ajoutant que "si la valorisation des garanties d'origine de l'électricité bénéficiant de dispositifs de soutien était autorisée, il serait alors nécessaire de notifier [à la Commission européenne] à nouveau l'ensemble des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables".
La ministre a toutefois ouvert la porte à des aménagements pour assurer la traçabilité de l'électricité verte. "Le Gouvernement y est sensible", a-t-elle expliqué. Béatrice Santais (Savoie, PS), rapporteur du texte, a donc proposé une "solution adaptée pour empêcher le cumul d'aides tout en garantissant la traçabilitéde l'électricité". Selon la rapporteur, le dispositif combine trois avantages : assurer la traçabilité de l'électricité verte, empêcher le cumul d'aides et réduire la facture des consommateurs.
Concrètement, l'amendement adopté permet aux producteurs d'électricité verte bénéficiant d'un mécanisme de soutien d'émettre des garanties d'origine. Celles-ci sont inscrites sur un registre et vendues aux enchères par l'Etat aux fournisseurs qui proposent des offres d'électricité verte. Pour simplifier la gestion du dispositif, il ne devrait concerner que les installations de plus de 100 kilowatts (kW). "Si l'émission de garanties d'origine pour les installations bénéficiant d'un dispositif de soutien était rendue obligatoire pour toutes, cela obligerait les toutes petites installations (y compris celles détenues par les particuliers) à s'inscrire sur le registre, soit près de 400.000 installations pour la seule filière photovoltaïque", justifie l'exposé des motifs.
Les enchères seront assorties d'un prix minimum, pour éviter de tirer vers le bas le prix des garanties d'origine. Le revenu des enchères permettra de diminuer la CSPE. Un décret doit préciser les modalités d'application du dispositif, en particulier les conditions de mise aux enchères des garanties d'origine.
Exonération de CSPE pour certains autoconsommateurs
Par ailleurs, les députés ont introduit un nouveau régime d'exonération de CSPE dédié à l'autoconsommation. Pour l'instant, la règlementation exonère de CSPE les petits producteurs d'électricité qui "consomment intégralement l'électricité qu'ils produisent" pour les besoins de leur activité. Par "petit producteur", la loi entend ceux dont la production atteint jusqu'à 240 gigawattheures par an et par site de production. Ce niveau est élevé, mais le dispositif est défavorable au développement de l'autoconsommation à partir d'énergies renouvelables, puisque les producteurs d'électricité renouvelable sont rarement en mesure de consommer l'ensemble de l'électricité qu'ils produisent, explique l'exposé des motifs (1) . L'amendement adopté prévoit d'exonérer de CSPE l'électricité autoconsommée par les producteurs exploitant des installations de production à partir des renouvelables dont la puissance installée est inférieure à 1 mégawatt (MW) et réinjectent une part de l'énergie produite dans le réseau. Le seuil fixé à 1 MW permet d'assurer que les autoconsommateurs qui en bénéficient exploitent des installations de taille modeste. "Il s'agit d'éviter les effets d'aubaine", a expliqué Béatrice Santais.
Les dispositions relatives au raccordement des installations de production renouvelables ont aussi été modifiées. Un amendement a été adopté afin de différencier le niveau de prise en charge du coût de raccordement par l'opérateur de réseau. Le projet de loi prévoit que le ministre de l'Energie fixe, après consultation de la CRE, le taux de financement du coût du raccordement pris en charge par le gestionnaire de réseau. Ce taux peut aller jusqu'à 50% dans le projet de loi du gouvernement. Les députés ont souhaité que ce taux soit différencié selon le niveau de puissance de l'installation et selon la source d'énergie. La modification "vise à distinguer les petits producteurs locaux, qui sont ceux qui ont le plus besoin d'un soutien financier, et les gros producteurs qui intègrent ce coût dans leur business-model dès le lancement du projet", a expliqué Laurent Furst (Bas-Rhin, Les Républicains). Enfin, un dispositif de prise en charge similaire a été introduit pour le raccordement des installations de biométhane. Il s'appliquera au raccordement des installations de biogaz dans les zones de plus de 100.000 clients bénéficiant d'un tarif péréqué.