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Géothermie : utiliser le sous-sol pour stocker les surplus de chaleur entre les saisons

Le stockage est indispensable pour augmenter le recours à la chaleur renouvelable et pallier son intermittence. En Gironde, Absolar veut montrer l'efficacité du stockage souterrain haute température et sa réplicabilité dans de nombreux contextes.

TECHNIQUE  |  Energie  |    |  S. Fabrégat
Géothermie : utiliser le sous-sol pour stocker les surplus de chaleur entre les saisons
Environnement & Technique N°394
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°394
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De la géothermie, on connaît surtout l'exploitation de la chaleur du sous-sol pour alimenter des bâtiments ou des réseaux de chaleur. On connaît moins l'utilisation du potentiel calorifique des roches souterraines pour stocker la chaleur. Depuis l'été 2022, un prototype de « batterie souterraine » est en test en Gironde. Il a été inauguré un an après son entrée en service par le Haut-Commissaire au plan, François Bayrou, en mai dernier.

Une centrale solaire et deux capacités de stockage

Un lotissement neuf de 67 logements, situé à Cadaujac, a été doté d'une centrale solaire thermique de 950 m2, couplée à un stockage de court terme (100 m3) et à un stockage thermique souterrain (10 000 m3). En été et pendant les intersaisons, la chaleur solaire couvre directement les besoins en eau chaude (« free heating »). Le surplus est conservé dans la capacité de stockage à court terme. Lorsque ce volume est plein, ce surplus est envoyé vers le stockage souterrain, à une température entre 80 et 90 °C.

En hiver, lorsque la production de la centrale solaire est insuffisante pour couvrir les besoins en eau chaude et en chauffage du lotissement, la chaleur conservée dans le sous-sol est utilisée. Le fluide présent dans les sondes est chauffé avec la chaleur du sous-sol et vient alimenter une pompe à chaleur à haute température. Finalement, le réseau de chaleur local est desservi avec une eau à 55 °C.

Un cylindre de 18 mètres de diamètre

Pour réaliser ce stockage intersaisonnier, 60 forages de 32 mètres de profondeur, espacés de 2,50 mètres, ont été réalisés. « En géothermie, on a tendance à espacer les forages pour qu'ils ne se contrarient pas entre eux. Ici, c'est l'inverse : on densifie les forages pour constituer un bulbe de chaleur homogène et limiter l'empreinte au sol. Ils représentent l'équivalent d'un cylindre de 18 mètres de diamètre », explique Hervé Lautrette, l'ingénieur à l'origine du démonstrateur et cofondateur de la société Absolar. La profondeur du forage est, quant à elle, déterminée par le contexte géologique local et la quantité de chaleur à stocker.

Concrètement, ce champ de sondes verticales, dans lesquelles circule un fluide calorifique, va venir monter en température les roches en boucle fermée. Il n'y a pas d'échange physique avec le milieu, hormis de la chaleur. Pourtant, c'est l'une des principales craintes liées à cette technique : qu'elle ait un impact, notamment sur les nappes d'eaux souterraines. Crainte qu'Hervé Lautrette balaie d'un revers de main : « La géothermie, on connaît. En cherchant des couches géologiques adaptées, il est possible de ne pas interférer avec les nappes phréatiques. Près de 95 % du territoire est exploitable, sous réserve de valider la faisabilité environnementale de la technique, au même titre que la géothermie de surface. » Le démonstrateur a été soumis à étude environnementale et à autorisation, au titre du code minier.

Les types de stockage thermique

Quand on parle de stockage thermique, il faut d'abord distinguer le stockage journalier de l'intersaisonnier. De plus en plus de réseaux de chaleur sont dotés de capacités de stockage journalières, pour pallier l'intermittence de la production de chaleur. Il peut s'agir de cuves thermoclines, d'immenses réservoirs isolés, installés en aérien ou en souterrain, de stockage par chaleur sensible (eau surchauffée dans des cuves) ou par chaleur latente (par fusion-solidification d'un matériau au contact de la chaleur). Ces deux derniers types de stockage peuvent également être utilisés pour des besoins intersaisonniers, mais ils nécessitent des cuves de grande dimension, comme le stockage de Boras (Suède) qui représente une tour d'une capacité de 37 000 m3.
Le stockage thermique souterrain est, quant à lui, réservé à l'intersaison. Il peut être réalisé en boucle ouverte, c'est-à-dire par remplissage d'un aquifère (réalisations en Allemagne et en Suède), d'anciennes mines (mis en œuvre aux Pays-Bas) ou encore dans des fosses-bassines (au Danemark). En boucle fermée, il repose sur le principe des forages géothermiques. Plusieurs installations existent déjà en Suisse et aux États-Unis.

Pallier l'intermittence des ENR et récupérer la chaleur fatale

Le stockage permet de s'affranchir de l'intermittence du solaire thermique et d'assurer la continuité de fourniture de chaleur l'hiver, lorsque la production est moindre. Ainsi, le solaire thermique couvre la totalité des besoins du quartier.

Cette technique serait ainsi l'occasion de valoriser d'autres types d'énergie, comme la chaleur fatale. « Le gisement en France est énorme. La chaleur fatale représente 140 térawattheures (TWh) non valorisés aujourd'hui », souligne l'ingénieur, qui rêverait de capturer la chaleur qui s'échappe des industries, des incinérateurs, des centres de données, mais aussi des centrales nucléaires. Et pourquoi pas produire de l'électricité grâce à cette chaleur récupérée (jusqu'à 250 °C) et stockée ?

Mais avant cela, il va falloir faire la preuve de cette technologie qui peine à convaincre. Absolar s'apprête à lancer des études pour valoriser la chaleur fatale d'un industriel dans un réseau de chaleur. Celui-ci est aujourd'hui alimenté par un incinérateur, de la biomasse et du gaz. « Cela représenterait plusieurs millions de mètres cubes de stockage, en essayant de minimiser l'emprise foncière », souligne l'ingénieur. Et de se passer de l'énergie fossile pour assurer l'ensemble des besoins du réseau. Autre projet dans les cartons : décarboner une usine qui fonctionne aujourd'hui au gaz, pour des besoins annuels de plus de 2 gigawattheures (GWh) à 120 °C.

La société espère pouvoir présenter ses premières solutions commerciales en 2024. « On prépare une petite révolution, non sans mal », conclut Hervé Lautrette.

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