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Actu-Environnement

Politique agricole commune : Bruxelles veut assouplir la conditionnalité environnementale

Pour calmer la grogne des agriculteurs et sortir de la crise politique générée, la Commission européenne propose d'alléger quatre des neuf normes environnementales conditionnant la plupart des aides de la PAC. Un recul qui fait débat.

Agroécologie  |    |  F. Gouty

« L'Europe avance au service des agriculteurs », s'est réjoui le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau. Le vendredi 15 mars, la Commission européenne a présenté une proposition de règlement (1) révisant la Politique agricole commune (PAC) décidée pour la période 2023-2027. Celle-ci vise « à réduire les charges administratives pesant sur les agriculteurs et à renforcer l'équité dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire » et, en conséquence, à « offrir une plus grande souplesse aux États-membres pour atteindre les objectifs de la PAC », notamment sur le plan environnemental, esquisse le Polonais Janusz Wojciechowski, le commissaire européen à l'agriculture. La réponse de Bruxelles à la forte mobilisation agricole observée depuis le début de l'année dans de nombreux pays de l'Union, y compris la France.

Recul sur quatre des neuf normes environnementales

Concrètement, la Commission européenne propose principalement au Parlement européen et au Conseil de l'Union européenne de modifier quatre des neuf normes dites de « bonnes conditions agricoles et environnementales » (BCAE). Celles-là même qui ouvrent à la plupart des aides perçues par les agriculteurs. D'abord, Bruxelles veut offrir plus de flexibilité aux États-membres dans la définition des « périodes sensibles » de l'année durant lesquelles les agriculteurs sont soumis à la couverture des sols de leur parcelle (BCAE 6). Elle souhaite ensuite effacer le respect strict de la rotation des cultures (BCAE 7), au profit d'une option de diversification des espèces cultivées simultanément. S'agissant de l'obligation de conserver un minimum de terres en jachères (BCAE 8), la Commission européenne veut, là encore, ouvrir la voie au volontariat, laissant à la place le choix aux agriculteurs de planter des haies ou des arbres (choix qui sera alors financé par un nouveau programme d'aides). Pour rappel, Bruxelles permet déjà aux agriculteurs européens de déroger à cette « obligation jachères » pour l'année en cours. Enfin, elle recommande de permettre le labourage sur au moins une partie des prairies permanentes de sites classés Natura 2000 (BCAE 9), si la pression des prédateurs ou d'espèces exotiques envahissantes s'avèrent trop fortes.

La proposition de règlement prévoit également d'exempter les petites exploitations (moins de dix hectares) de contrôle et de sanction relatifs au respect de ces normes, d'introduire des dérogations temporaires face à des « conditions météorologiques défavorables » et de doubler le nombre de modifications qu'un État-membre peut apporter chaque année à son Plan stratégique nationale (PSN), sa propre déclinaison de la PAC. « Il est désormais de la plus haute importance que les colégislateurs parviennent en temps utile à un accord sur la proposition législative présentée aujourd'hui afin de rassurer les agriculteurs sur le fait que ces nouvelles mesures peuvent s'appliquer dès que possible », insiste la Commission.

Des mesures à l'encontre des paysans ?

Pour Bruxelles, ces reculs sont « soigneusement calibrés et ciblés afin de maintenir un niveau élevé d'ambition environnementale et climatique dans la PAC actuelle ». Conclusion à laquelle la Confédération paysanne n'adhère pas : « Les aides directes de la PAC pourront donc être versées à des bénéficiaires qui détruisent massivement les sols, la qualité de l'eau et la biodiversité ». Pour le syndicat agricole, les révisions proposées par la Commission européenne risquent « d'engendrer monocultures, surproductions, baisse des prix agricoles », d'un côté, et de mettre en danger, de l'autre, les « éleveurs, céréaliers en zones intermédiaires, maraîchers et apiculteurs » qui subissent les « dérives agricoles [en matière d'environnement] les plus destructrices ». En somme, « la proposition de la Commission européenne ne garantit même pas une incitation réelle à la transition agroécologique : ni bâton ni carotte sur les pratiques agroenvironnementales, ce qui renforce l'agriculture productiviste ».

Deux organisations environnementales, le collectif Nourrir et l'ONG britannique ClientEarth, ont par ailleurs déjà attaqué l'approbation par Bruxelles du PSN français, et en écho le modèle de la PAC actuelle, pour des raisons similaires. La plainte, déposée en juillet 2023 devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), doit encore être discutée d'ici à la fin de l'année.

1. Télécharger la proposition de règlement
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43691-proposition-reglement-revision-pac-2023-2027.pdf

Réactions6 réactions à cet article

Il faut revenir sur la séquence... Les manifs paysannes ont d'abord et avant tout été pilotées par les syndicats, eux-mêmes bras armé de l'agro-business. Il ne s'agissait là que de saborder le Green-Deal, empêcheur de faire de juteuses affaires sur le dos des consommateurs et de l'environnement. Et le lobbying a parfaitement fonctionné, on le voit à ces mesures qui signent une régression terrible car signifiant que les affaires sont toujours plus importantes que les gens (paysans y inclus) et l'environnement. On vote bientôt pour élire ces gens-là...

dmg | 19 mars 2024 à 09h37 Signaler un contenu inapproprié

on peut nourrir la planète avec des sols vivants et donc l'agriculture de conservation des sols, mais on ne pourra JAMAIS sauver les campagnes sans mettre AUX NORMES les villes !!! en France les recyclages de l'eau et de la matière organique sont inexistants !! Les stations d'épuration sont des armes de désertification massive ! non seulement l'eau est jetée en rivières pollue TOUTES les rivières mais TOUTE la fertilité des sols ( la matière organique) disparait dans des incinérateurs ou des décharges !

laurent | 19 mars 2024 à 11h23 Signaler un contenu inapproprié

Guerre de la Russie contre l'Ukraine, hausse des prix à la consommation (générant de méga bénéfices des majors de l'agroalimentaire, de la distribution et des pétroles), manif des agriculteurs (récupérées et manipulées par l'agrobusiness) : tous les feux sont verts pour que les ultra libéraux de la Commission européenne profitent de cette fenêtre de tir pour s'acharner à dégommer en plein vol le Green Deal et plomber toute amélioration de l'environnement et de la santé des européens.
Il y a certes bientôt des élections, les électeurs devront faire un choix. Mais celui-ci sera-t-il bien libre et éclairé alors que la plupart des gens s'abreuve de désinformation propagée par les réseaux (a)sociaux et des groupes de chaînes de TV détenues par des milliardaires d’extrême droite et cathos intégristes ?

Pégase | 20 mars 2024 à 09h06 Signaler un contenu inapproprié

Désolé Laurent, mais toutes les boues ne partent pas en incinération.
Par le passé, on les utilisait comme engrais, mais il y a une vingtaine d'années on s'est rendu compte qu'elles contenaient des quantités non négligeables de métaux lourds, provenant certainement de petits ateliers, etc.
Elles sont souvent épandues, mais pas en fertilisant. Il suffit de faire un tour à Conflans Ste Honorine, ou ça sent bon tout le temps !
Puis les eaux sont bien contrôlées, surtout en DBO (demande biologique en oxygène).
Je ne suis donc, pas d'accord avec vous. Nos cours d'eau ne sont certes pas propre à la consommation directe, mais ils sont bien plus propres qu'il y a 50 ou 60 ans ! Et ceci est en grande partie due aux stations d'épuration modernes.

Erikk | 02 avril 2024 à 17h00 Signaler un contenu inapproprié

Vous avez parfaitement raison Erikk.
Le crédo de laurent est d'espérer nous faire détourner les yeux des pollutions d'origines agricoles, massives, généralisées et de plus en plus incontrôlables (c'est l'un des gains du dernier coup de force - presque d’État ! - de l'agrobusiness avec les manifs agricoles récupérées en façade par ses faux-nez FNSEA et JA) avec ce sempiternel écran de fumée (même s'il faut rester exigeants et vigilants vis-à-vis des l'efficacité des STEP, pour lesquelles les collectivités investissent massivement en amélioration des process).

Pégase | 03 avril 2024 à 13h49 Signaler un contenu inapproprié

80% des pollutions maritimes proviennent des rejets urbains via les rivières (cf enquête parlementaire sur la chaine LCP) ! les milieux aquatiques sont les milieux les plus fragiles !
On peut recycler à 100% l'eau et la matière organique dans des champs de biomasse à croissance rapide et cycles courts ( donc arrêter à 100% de polluer les rivières et de perdre la fertilité des sols agricoles ...), actuellement le recyclage est à moins de 1% en ville ... cf au Québec Des saules pour valoriser les eaux usées

laurent | 04 avril 2024 à 11h06 Signaler un contenu inapproprié

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