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Dans ce rapport de synthèse intitulé ''Les espèces sauvages dans un monde en mutation'' publié tous les 4 ans, sur les 44.838 espèces menacées figurant sur la Liste rouge de l'UICN, 16.928 espèces d'animaux ou de plantes sont menacées d'extinction. Un chiffre ''considérablement sous-estimé'', souligne l'UICN, l'analyse ne portant que sur 2,7% des 1,8 million d'espèces décrites.
Un oiseau sur huit, un mammifère sur quatre, un amphibien sur trois
Selon l'UICN, 20% des 5.487 mammifères de la planète sont aujourd'hui menacés d'extinction. A titre de comparaison depuis l'année 1500, seules 76 espèces se sont éteintes. De plus, la situation pourrait s'avérer pire car l'UICN estime qu'elle manque de données pour plus de 800 espèces. Le nombre de mammifères menacés pourrait atteindre 36 %, a indiqué Jan Schipper, expert de l'UICN.
Plus de la moitié des amphibiens (59 %) et 42 % des reptiles d'Europe sont également en déclin. Pour 23 % des amphibiens et 21 % des reptiles, la situation est si grave qu'ils sont classés comme espèces menacées sur la liste rouge européenne. De plus, chez les amphibiens, la chytridiomycose, une maladie infectieuse provoquée par un champignon, touche un nombre croissant d'espèces et complique les actions de conservation, ajoute l'UICN.
Pour certaines catégories de plantes, comme les conifères et les cycadacées, la situation est encore ''plus préoccupante'', avec 28% et 52% d'espèces menacées respectivement.
La menace croissante du changement climatique
Dans tous ces cas, la principale menace est la destruction des habitats, en raison de l'agriculture, des aménagements ou encore de l'exploitation forestière. La destruction et la dégradation des habitats touchent 40% des mammifères tandis que le changement climatique et la déforestation accélérée par le développement des agrocarburants contribuent à la disparition des espèces d'oiseaux, avec l'introduction d'espèces exotiques envahissantes.
Dans les océans, la situation est tout aussi alarmante, une grande variété d'espèces marines étant menacée par la surpêche, le changement climatique, les espèces envahissantes, l'urbanisation du littoral et la pollution. Au moins 17% des 1.045 espèces de requins et de raies, 12,4% des mérous et six espèces de tortues marines sur sept sont menacés d'extinction. 27% des 845 espèces de coraux sont également menacées et 27,5% des oiseaux marins sont déclarés en danger d'extinction.
Si aujourd'hui une part importante des espèces non menacées d'extinction sont sensibles au changement climatique (30% des oiseaux, 51% des coraux et 41% des amphibiens), le réchauffement pourrait à l'avenir toucher gravement un plus grand nombre d'espèces sauvages.
Imaginez la pêche sans poissons, l'exploitation forestière sans arbres, le tourisme sans récifs coralliens ni autres espèces sauvages, les cultures sans pollinisateurs, souligne Jean-Christophe Vié, Directeur adjoint du Programme de l'UICN pour les espèces et auteur principal du rapport. Tous les animaux et les plantes qui constituent la trame extraordinaire de la vie sur la planète ont un rôle spécifique et assurent des biens essentiels : nourriture, médicaments, oxygène, eau salubre, pollinisation des cultures, stockage du carbone et fertilisation des sols, rappelle-t-il.
Imaginez les dommages pour nos économies et nos sociétés si tout cela était perdu, poursuit-il alors que le rapport de l'économiste indien Pavan Sukhdev souligne que la perte de la biodiversité coûterait 3.100 milliards € par an à l'échelle mondiale, soit 6% du PIB mondial en 2050.
Redoubler d'efforts
Sebastian Winkler, responsable international pour le Count-Down 2010 au sein de l'UICN, recommande de mobiliser tous les acteurs (gouvernements, organisations internationales, ONG, entreprises..) pour stopper l'érosion de la biodiversité. Il faut demander des actions concrètes au niveau local (agendas 21, etc.) et ne pas négliger les petites actions autour, a-t-il souligné en janvier dernier à Paris à l'occasion de la signature par une dizaine de collectivités franciliennes de la Déclaration du ''Compte-à-rebours 2010'' qui s'engageaient à enrayer la perte de la biodiversité.
Aux côtés de la lutte contre le changement climatique, la biodiversité est notre plus grand défi, a indiqué M. Winkler. Ce dernier préconise de s'aligner sur les objectifs fixés par le protocole de Kyoto pour empêcher la destruction des ressources végétales et animales et appelle à la création d'un GIEC de la biodiversité.
Les négociations ont déjà débuté pour l'après 2010 avec l'idée de mettre en place des mesures plus concrètes, comme la lutte contre les espèces invasives, selon Sebastian Winkler, qui pourraient être décidées lors de la prochaine Conférence de la Convention sur la diversité biologique qui aura lieu du 18 au 29 octobre 2010 au Japon.