La Commission européenne a présenté sa proposition de renouvellement de l'approbation du glyphosate pour dix ans. Cette proposition doit désormais être examinée en comité permanent par les représentants des États membres, afin d'obtenir une décision avant le 15 décembre, date d'échéance de l'approbation actuelle. Un premier vote devrait être organisé le 13 octobre, à la majorité qualifiée.
La proposition de la Commission se base sur l'avis de l'autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), publié en juillet dernier. L'Efsa n'a pas identifié « de domaine de préoccupation critique » pour la santé ou l'environnement. De son côté, l'Agence européenne des produits chimiques (Echa), consultée également, n'a proposé aucun changement dans la classification des dangers du glyphosate par rapport à son avis de 2017, date du précédent renouvellement de la substance active.
Concrètement, la Commission propose un renouvellement, pour dix ans, du glyphosate en tant que substance herbicide utilisée par les agriculteurs avant la récolte. L'approbation ne concerne donc pas les usages non agricoles. Elle n'est pas valable non plus pour des usages de dessication (ou déshydratation) de plantes porte-graines.
Pour rappel, l'approbation de cette substance active n'absout pas d'autorisation chaque produit phytosanitaire en contenant. Autrement dit, les États membres seront chargés d'évaluer et d'autoriser (ou non) chaque produit contenant du glyphosate et chaque utilisation, en s'appuyant sur les critères d'approbation de la substance.
Coformulants, eaux souterraines et effets indirects sur la biodiversité
La proposition de la Commission fixe notamment des teneurs maximales pour cinq impuretés retrouvées dans le matériel technique (comme le formaldéhyde ou la triméthylamine). Elle précise par ailleurs que les États membres devront apporter une attention particulière, lors des évaluations, aux coformulants, aux résidus dans les cultures suivantes lors des rotations, à la protection des eaux souterraines susceptibles d'être exposées par infiltration (en particulier celles destinées à un usage d'eau potable) et aux petits mammifères herbivores. Lorsqu'ils le jugent nécessaire, les États membres pourront imposer des mesures d'atténuation des risques et des restrictions d'utilisation (nombre de doses, d'applications, délais…).
Les États membres devront également, lors des procédures d'autorisation, prendre des mesures pour atténuer les risques d'exposition des plantes terrestres et aquatiques non ciblées lors des pulvérisations. Ils devront également veiller à réduire les effets indirects sur la biodiversité, notamment sur les pollinisateurs ou les organismes herbivores, lorsque de tels effets sont constatés. L'Efsa devra, de son côté, rédiger des lignes directrices sur l'évaluation de ces effets indirects sur la biodiversité.
La Commission rappelle que des mesures d'atténuation des risques doivent accompagner les conditions d'utilisation des produits contenant du glyphosate, comme l'utilisation de buses de réduction de la dérive d'au moins 75 % ou la mise en place de bandes tampons de cinq à dix mètres au minimum. Ces mesures peuvent en revanche être levées ou réduites si l'évaluation des risques conclut qu'elles ne sont pas nécessaires ou peuvent être abaissées pour une utilisation spécifique. De même, l'utilisation de ces produits dans les zones accessibles au public doit être réduite au minimum, voire interdite.
Enfin, l'exécutif européen rappelle que les méthodes de lutte alternatives (biologiques, physiques…) doivent être privilégiées et que l'usage des produits phytosanitaires doit être limité au strict nécessaire.
La France défend une position intermédiaire
Selon une source proche du ministère de l'Agriculture, la France, qui a choisi de maintenir les autorisations uniquement pour les usages ne disposant pas d'une alternative viable, souhaiterait que cette approche soit adoptée à l'échelle européenne, par souci d'harmonisation.
De leur côté, les associations, à l'instar d'Agir pour l'environnement ou de Greenpeace, appellent le Gouvernement à s'opposer clairement à ce renouvellement, afin de « garantir un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l'environnement ». Générations futures dénonce aussi cette position, alors que les effets du glyphosate sur la biodiversité sont encore peu documentés et que le caractère probable de perturbateur endocrinien de cette substance a été récemment pointé du doigt par une expertise collective, menée par l'Inserm. « La position de la France dans le dossier du glyphosate n'est absolument pas sérieuse, puisqu'elle consiste uniquement à demander des restrictions d'utilisation à certains usages, comme c'est le cas en France actuellement », estime François Veillerette, le porte-parole de l'association.