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Valeur du carbone et transition écologique : l'Ademe relance le débat

Comment concilier la nécessaire prise en compte de la valeur carbone et la préservation, non moins cruciale, des équilibres sociaux-économiques du pays ? C'est la question à laquelle tente de répondre l'Ademe, dans une note d'analyse.

Gouvernance  |    |  N. Gorbatko
Valeur du carbone et transition écologique : l'Ademe relance le débat
Actu-Environnement le Mensuel N°428
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°428
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Depuis la crise des Gilets jaunes de 2018, le concept de taxe carbone a tendance à donner des sueurs froides à la plupart des décideurs publics français. C'est donc à un immense tabou que s'attaque l'Agence de la transition écologique (Ademe), en publiant, cet été, sa note d'analyse « Pour un contrat social de transition. Propositions pour une réforme équitable de la valeur du carbone ». Une synthèse issue de multiples échanges menés, entre décembre 2020 et décembre 2021, avec plus de 200 chercheurs, parlementaires, collaborateurs des administrations et des ministères, membres de laboratoires d'idées et représentants de la société civile, complété d'un rapport technique (1) , lui-même publié en juillet 2021.

Au-delà de la nécessaire gestion de crise et des réponses immédiates, par ailleurs très onéreuses, « il est crucial d'accroître au plus vite les efforts de décarbonation de nos sociétés, pour prévenir et atténuer l'amplitude de chocs de toute nature, géopolitiques, économiques, écologiques », argumentent les analystes de l'Agence. Ces derniers soulignent l'importance de donner le bon « signal prix », en favorisant « une montée en puissance » des outils qui pénalisent les émissions de gaz à effet de serre : taxes, mais aussi normes et soutiens ciblés. « Il existe au niveau international un solide consensus académique sur cette question », assure l'Ademe. Or, s'il est difficile de mesurer précisément cette valeur, en France, elle reste, de toute façon, très en deçà du niveau requis pour prétendre atteindre la neutralité carbone en 2050.

Restaurer la confiance

Mais pour faire bouger les lignes, les obstacles sont nombreux : méfiance envers le gouvernement et les politiques publiques, fiscalité jugée opaque et injuste, manque de cohérence de l'instrument, efficacité environnementale pénalisée par des exonérations… Les recettes de la Contribution Climat Énergie ne financent par exemple aucun projet particulier et ne permettent pas d'en suivre précisément ses usages. Cette taxe carbone serait ainsi considérée, par 43 % des personnes interrogées en 2021 par les deux économistes Thomas Douenne et Adrien Fabre, comme un prétexte pour augmenter les impôts.

“ Il est crucial d'accroître au plus vite les efforts de décarbonation de nos sociétés, pour prévenir et atténuer l'amplitude de chocs géopolitiques, économiques, écologiques ” Ademe
La note de l'Ademe insiste donc tout particulièrement sur la nécessité de restaurer la confiance des citoyens, en proposant une programmation des finances publiques de long terme et compatible avec le respect des objectifs climatiques, accompagnée de précisions sur les mesures complémentaires à prendre pour accroître le financement de la transition. Elle suggère, par ailleurs, la création d'une instance indépendante chargée de rendre compte annuellement de l'évaluation des actions menées et de la mobilisation effective des budgets consacrés à la politique de transition.

Privilégier l'équité

En parallèle, l'Agence de la transition écologique met aussi l'accent sur une indispensable équité en matière de répartition de l'effort. Dans ce domaine, ménages et entreprises ne sont, en effet, pas logés à la même enseigne. À l'origine d'une part importante des émissions carbone, de nombreux secteurs d'activité et produits fossiles bénéficient de taux réduits, de remboursements partiels, voire d'une exemption totale de fiscalité énergétique et/ou carbone. Une sortie progressive des régimes dérogatoires et autres « niches fiscales » devrait ainsi s'engager. Mais, même au sein des ménages, le poids de la fiscalité carbone se répartit inégalement entre les plus riches et les plus modestes, qui consacrent une part non négligeable de leur budget aux dépenses énergétiques. De préférence aux redistributions monétaires, des modalités d'accompagnement spécifique pourraient alors être définies afin de les aider à trouver des solutions alternatives : crédits d'impôts ou prêts à taux avantageux pour des travaux de rénovation thermique, primes à l'achat de véhicules propres, etc. En cas d'augmentation excessive du cours du pétrole et du gaz, un prix abordable devrait aussi leur être garanti pour leurs besoins de base en énergie.

Viser l'efficacité, mais aussi une autre gouvernance

La revalorisation de la valeur carbone ne doit toutefois pas mettre en péril l'équilibre économique du pays. Sans négliger les besoins de financement des services publics et de la protection sociale, les analystes de l'Ademe suggèrent donc également, après évaluation des différentes options, des baisses des prélèvements obligatoires sur les ménages et sur les entreprises, notamment ceux qui reposent sur leurs coûts de production. « Fixée au bon niveau, la valeur du carbone crée un environnement économique favorable à une action à la hauteur de l'enjeu, sans opter pour des choix trop coûteux », argumentent-ils.

Une définition de la valeur carbone

Les impacts des émissions de gaz à effet de serre sur le bien-être des populations relèvent des externalités négatives générées par l'action des acteurs économiques (ménages, entreprises, collectivités, etc.), sans que ces derniers en supportent le coût. Le coût social de l'émission d'une tonne de CO2 est ainsi supérieur au coût privé payé par ces acteurs économiques pour réaliser leurs actions. Afin d'y remédier et d'inciter ces acteurs à réduire leurs émissions de CO2, une valeur économique doit y être associée.
Enfin, ils insistent sur l'importance de mettre en œuvre une meilleure gouvernance en matière de valorisation du carbone. Sous la forme d'un débat public, d'une convention citoyenne ou de négociations multipartites, celle-ci pourrait, par exemple, passer par l'organisation d'échanges à l'échelle nationale sur les différentes options de politique publique à retenir pour valoriser les actions en faveur du climat et de l'indépendance vis-à-vis des énergies fossiles. En contribuant à clarifier les enjeux, un meilleur partage des connaissances disponibles sur la question de la valorisation du carbone pourrait, en outre, renforcer les conditions de l'adhésion collective aux futures décisions. Associer État, collectivités, partenaires sociaux et acteurs sociaux permettrait, par ailleurs, d'améliorer le ciblage des aides en faveur des plus vulnérables.

Un nouveau contrat social

Pour les analystes de l'Ademe, la question de la valorisation du carbone ne se réduit pas à un choix d'instruments, taxe ou marché de quotas versus réglementations, subventions, obligations. Elle renvoie « à des enjeux plus larges de cohérence climatique des politiques publiques, d'efficacité et d'équité, donc à la construction de compromis politiques ». Autrement dit, à « la fondation d'un nouveau contrat social articulé à la question climatique ».

Des éléments qui pourront utilement alimenter la réflexion de l'exécutif, alors que se profile la préparation d'une loi de programmation énergie-climat, prévue pour 2023, d'où découleront les feuilles de route de la Stratégie nationale bas carbone et les plans d'adaptation au changement climatique.

1. « Analyse des conditions de reprise d'une valeur du carbone équitable. État des lieux des arguments et examen comparé des options de politiques publiques »

Réactions1 réaction à cet article

La confiance n'est pas au rendez vous. L'ADEME a "vendu" qu'il était bon de "brûler du bois ( même de forêts) dans les chaudières bois" pour "économiser le CO2", comment faire confiance à ces ingénieurs qui ont d'abord imposé une Densité Thermique de 3 GWh / km pour un réseau chaleur , et puis a délivré ensuite des fonds chaleur, pour des réseaux de Densité T 2,5, et même 2. Les clients ne se précipitant pas pour se raccorder aux réseaux chaleur, ce raccordement peut être imposé. Eh oui, les réseaux chaleur coûtent cher en investissements, il faut donc une assiette plus large pour rentabiliser.. ou encore : " Qui veut se raccorder à notre réseau pour faire diminuer nos charges ? , mortel ! Favoriser la chèvre, et le chou, et le boucher, on n'en sort pas sans respecter les "contrats"

J Cl M 44 | 22 août 2022 à 12h03 Signaler un contenu inapproprié

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