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Changement climatique : améliorer la résilience des infrastructures pour éviter d'en payer le prix fort

Attendu pour bientôt, le nouveau Plan national d'adaptation au changement climatique permettra-t-il de préparer les infrastructures routières et ferroviaires aux bouleversements du climat ? Rien n'est assuré. Pourtant, les enjeux sont de taille.

Transport  |    |  N. Gorbatko
Changement climatique : améliorer la résilience des infrastructures pour éviter d'en payer le prix fort
Actu-Environnement le Mensuel N°440
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°440
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Octobre 2020 : la tempête Alex s'abat sur l'arrière-pays niçois, provoquant de fortes crues torrentielles et de gros dégâts. Une centaine de kilomètres de routes, plus de cinquante kilomètres de réseaux électriques, quelque soixante ouvrages d'art, dont une trentaine de ponts, sont hors d'usage, détruits ou gravement endommagés. De nombreuses communes se retrouvent sans eau ni électricité, sans liaisons routières et ferroviaires. La vallée de la Roya, l'une des plus touchées, restera isolée pendant plus de trois mois. L'épisode aura même bouleversé la topographie locale, par des apports sédimentaires massifs, des reculs de berges ou de versants.

Juin-juillet-août 2022 : la France vit son deuxième été le plus chaud jamais enregistré dans le pays, marqué par trois épisodes caniculaires, trente-trois jours de grosse chaleur et des températures moyennes dépassant les normales de 2,3 °C. Le trafic ferroviaire est très perturbé, de nombreuses rames roulent au ralenti. Mardi 19 juillet, privé d'électricité, un Thalys est immobilisé en gare de Saint-Denis. Le train affichera finalement douze heures de retard, dont plus de quatre passées avec des passagers enfermés dans les rames, par 40 °C.

Un avant-goût des prochaines décennies

Autant d'événements amenés à se répéter, voire à s'intensifier, en raison du changement climatique. Car, malgré les efforts des pays, le monde se rapproche à grande vitesse de la barre du 1,5 °C supplémentaire par rapport à l'ère préindustrielle, fixée par l'Accord de Paris pour… la fin du siècle. Pour les neufs premiers mois de cette année, l'observatoire européen Copernicus a ainsi enregistré des températures moyennes mondiales plafonnant déjà à 1,4 °C au-dessus de la normale. Dans les décennies à venir, la durée de ces vagues de chaleur pourrait doubler, voire être multipliée par dix, selon Météo-France. La Ville de Paris se prépare, quant à elle, à affronter entre 10 et 25 canicules par an, ainsi qu'une augmentation des pluies extrêmes, crues et inondations « éclairs ». Les deux tiers des communes françaises seraient d'ailleurs exposées à au moins un risque naturel.

“ Aucun véritable plan structurel d'ensemble d'adaptation des infrastructures n'existe ” Conseil d'orientation des infrastructures
Au-delà des inconforts et des drames humains, les répercussions de ces aléas sont nombreuses sur les infrastructures routières et ferroviaires : incendies, encombrement des voies, glissements de terrain, inondations, submersions, surchauffe des composants électroniques et électriques, dilatation des rails, déformation des chaussées, dégradation des équipements, ralentissement de la maintenance… Si l'on y ajoute l'arrêt ou la perturbation des activités économiques, la facture pourrait s'avérer particulièrement lourde.

Une addition salée

Le cabinet Carbone 4 évalue à 3 milliards d'euros par an le coût actuel des dommages climatiques aux équipements de transport, en Europe, contre 600 000 euros avant 2010. Pour la période 2041 à 2070, l'addition passerait à 6 milliards. Pour les seuls risques d'inondations affectant le réseau ferroviaire métropolitain, en cas de réchauffement entre + 1,5 °C et + 3 °C , France Stratégie prévoit des surcoûts annuels de plus d'un milliard d'euros. L'enjeu est d'autant plus important que les différents réseaux se caractérisent par une forte interdépendance, avec un risque de retombées en cascade. La défaillance des infrastructures de transport d'électricité peut notamment se répercuter sur le ferroviaire, électrifié pour 80 % du trafic, et sur la coordination des interventions.

Dans la vallée de la Roya, les inondations ont aussi embarqué des routes sous lesquelles étaient enterrés les réseaux de câbles : électriques, fibre et cuivre (le réseau historique de télécommunications). Faute de voies de transport fonctionnelles pour y accéder, les réparations se sont révélées difficiles. Selon l'Institut des risques majeurs, à plus de 9 mètres de hauteur, une crue majeure de la Seine, de la Marne, de l'Oise et du Loing impacterait plusieurs millions d'habitants, à travers les dysfonctionnements de l'ensemble des réseaux, dont les routes et voies ferrées. Le coût pourrait atteindre 58 milliards d'euros en cas d'arrêt complet ou partiel des activités et de la propagation des impacts.

Viser la résilience

Face à ces risques, il est toutefois possible de chercher à s'adapter, à éviter une coûteuse maladaptation et à développer la résilience des équipements. Les autorités publiques françaises en ont déjà pris acte. Au mois de mai dernier, les membres du Conseil national de la transition écologique (CNTE) ont ainsi validé le principe d'une trajectoire d'adaptation du pays à un réchauffement de + 4 °C. Celle-ci sera intégrée au nouveau Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), qui devrait être présenté avant la fin de l'année. Le document devrait notamment généraliser la mise à jour des différents référentiels utilisés pour anticiper les effets des évolutions du climat et mettre en œuvre un plan d'accompagnement des collectivités locales ainsi que des études de vulnérabilité par activité économique. Portée par la direction générale des Infrastructures, des Transports et des Mobilités (DGITM), l'une de ces études relatives aux infrastructures de transport serait d'ailleurs en cours.

En attendant d'en savoir plus sur le Pnacc, l'institut I4CE a analysé le projet de loi de finances 2024 sous le prisme de l'adaptation. Malgré « certaines avancées », à commencer par la prise en compte d'un réchauffement à + 4°C, « le compte n'y est toujours pas », estiment ses experts. En effet, si le projet rehausse les crédits pour la modernisation des infrastructures de transport ferroviaire, par exemple, la question de leur résilience n'est pas vraiment posée. Au début de l'année, le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) avait pourtant lui-même reconnu un manque d'estimation des besoins. « Aucun véritable plan structurel d'ensemble d'adaptation des infrastructures n'existe », avait-il précisé.

Un chantier encore à travailler

Autre critique : le Fonds vert destiné aux collectivités subventionnent peu d'actions d'adaptation. « Il conviendra de surveiller de près si les investissements financés par ce fonds à l'avenir tiennent bien compte de l'évolution du climat, si besoin en établissant des critères d'attribution », remarque Guillaume Dolques. À la vue de l'ampleur des besoins, ce chercheur de l'I4CE note également l'insuffisance des moyens humains et d'ingénierie prévus pour aider les opérateurs publics et les collectivités à se préparer, à mieux intégrer l'adaptation dans leurs plan climat-air-énergie territorial (PCAET) et leurs schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet) notamment. « Les avancées présentées sont encore trop réactives, visant principalement la gestion de crise, et laissent de côté les premières étapes vers des transformations plus systémiques », estime aussi Guillaume Dolques.

Alors que France Stratégie préconise de faire de la question de l'interdépendance des réseaux « un axe de travail pour la puissance publique », soulignant dans le cas du réseau routier, « la multiplicité des gestionnaires, une connaissance de l'état du réseau limitée et atomisée », la mise en place d'une instance de coordination des gestionnaires d'infrastructures se fait également attendre. Mais l'idée fait sans doute son chemin...

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