"Face aux phénomènes littoraux contemporains, ce sont les collectivités locales qui sont en première ligne, à commencer par les communes, constate Philippe Grosvalet, président du Conseil général de Loire-Atlantique, dans son rapport (1) présenté le 20 juin lors d'une journée de restitution à Saint-Nazaire. A leurs côtés, les départements, forts de leurs moyens opérationnels, répondent présents quand il s'agit de réparer une digue dans l'urgence, de procéder au nettoyage de plages souillées, ou bien encore de préserver et d'ouvrir au public les espaces naturels côtiers".
Ce territoire s'avère aujourd'hui confronté à différentes pressions environnementales : artificialisation continue des sols (2) , dégradation des ressources naturelles (paysages, espaces naturels, qualité des masses d'eaux côtières, habitats naturels côtiers et maritimes, etc.), et accélération de l'évolution de son trait de côte.
Afin de renforcer leurs capacités opérationnelles de proximité, notamment sur ces questions, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, a en effet confié une mission "Mer et littoral" à Philippe Grosvalet, le 29 novembre 2012.
Les 31 départements littoraux de France se sont réunis pour mener une réflexion dans cette optique. Le document en résultant détaille 144 propositions d'actions concrètes pour les départements et verse 13 contributions au débat national pour renforcer l'action publique en faveur de la mer et du littoral.
Une gestion intégrée des zones côtières réaffirmée
La mission "Mer et littoral" a identifié cinq principes sur lesquels doivent reposer les politiques publiques : la prise en compte de la complexité de la mer et du littoral, le renforcement de l'action publique de proximité, l'anticipation, la solidarité, sociale et territoriale, et l'adaptation à la mobilité du littoral. Elle souhaite notamment qu'ils soient traduits à travers le déploiement d'une gestion intégrée des zones côtières (GIZC).
"La GIZC doit être réaffirmée aujourd'hui comme une méthode pertinente pour que la mer et le littoral demeurent des atouts, assure Philippe Grosvalet, dans son rapport. Les départements sont appelés à y tenir, tour à tour ou simultanément, un triple rôle".
Ils seront ainsi mobilisés en tant que maître d'ouvrage, animateur des territoires (schémas et plans d'actions) et force d'ingénierie territoriale.
Pour ce qui concerne plus particulièrement l'environnement, le rapport préconise un aménagement stratège qui anticipe les évolutions sur le long terme. Sur ces questions, la mission a relevé des oppositions entre la loi Littoral et les perspectives d'adaptation.
Ainsi, face au changement climatique, des relocalisations, dites "stratégiques", des populations et des activités seront engagées. "Ce recul de l'urbanisation pourrait s'avérer cependant bloqué par la loi Littoral, au regard du principe de continuité de l'urbanisation (encadrement de l'extension de l'urbanisation – article L. 146-4 du code l'urbanisme)", déplore le rapport.
Pour anticiper l'élévation du niveau de la mer, certains espaces non urbanisés pourraient devenir des zones tampons par création de marais maritimes, afin d'en protéger d'autres, plus vulnérables.
"Cependant, les dispositions de la loi Littoral (article L. 146-6 du code de l' urbanisme relatif aux espaces remarquables) viendraient à bloquer ces processus, comme par exemple les opérations de dépoldérisation (3) maîtrisée", poursuit le rapport qui appelle à une réflexion à l'échelle nationale.
Treize contributions au débat national
Le rapport développe treize contributions au débat national pour renforcer l'action publique en faveur de la mer et du littoral. Tout d'abord, il incite à associer l'Assemblée des départements de France dans l'élaboration, le suivi et l'évaluation des documents réglementaires, législatifs, financiers, stratégiques et de planification en lien avec la mer et le littoral.
Il souhaite, notamment à travers l'élaboration de conventions et de chartes, clarifier l'action foncière et la gestion des espaces naturels en zone littorale.
Le rapport préconise également une réflexion nationale sur l'évolution du contenu et la mise en œuvre des volets maritimes des schémas de cohérence territoriale (Scot) afin de faciliter leur élaboration mais également de rendre obligatoire l'élaboration des volets maritimes des Scot littoraux. Il propose de permettre l'inclusion des espaces naturels littoraux situés sur le domaine public maritime émergé au sein des périmètres des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN).
Concernant le trait de côte, le rapport souhaite que l'État s'engage sur l'accompagnement des territoires, en inscrivant les enjeux liés aux risques littoraux et aux effets du changement climatique dans les contrats de plan État-régions, en collaboration avec les départements.
"Dans l'objectif de ne pas créer de nouveaux outils, facteur de complexification des procédures et de l'efficacité de l'action publique, une évolution des dispositions de création des zones d'aménagement différé (ZAD) permettrait d'avoir un outil adapté à disposition des collectivités compétentes pour mettre en œuvre une stratégie d'intervention sur le long terme", propose également la mission.
Toujours dans une optique de relocalisation stratégique, elle souhaiterait une évolution juridique pour que les départements disposent d'un droit de préemption urbain.
Considérant que l'accroissement de l'activité des structures de plongée a un impact sur les zones protégées, elle préconise, comme c'est le cas pour le transport de passagers, d'intégrer ces dernières parmi les contribuables de la taxe due par les entreprises de transport public maritime. Elle souhaite élargir le champ d'affectation de la taxe d'aménagement au titre des espaces naturels sensibles aux études, à l'aménagement et à la gestion des terrains concernés par le périmètre de protection des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN).
Elle propose que soit généralisée aux agences de l'eau de Seine-Normandie et d'Artois-Picardie la création de commissions littorales au sein des comités de bassin "afin de renforcer une action publique de gestion intégrée de l'eau et la prise en compte des enjeux côtiers, de favoriser l'articulation entre la directive cadre sur l'eau et la directive cadre stratégie pour le milieu marin, la mission "Mer et littoral"".
Elle appelle à l'instauration d'une éco-participation à l'achat de bateaux pour contribuer au développement d'une filière de déconstruction des épaves.
Enfin, elle propose le lancement d'un appel à projets "ports durables", dans la suite des initiatives "ports exemplaires", voilier du futur et navire du futur".