Mardi 21 février 2012, le Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc) a fait état d'une étude sur l'évaluation des perturbateurs endocriniens (PE) réalisée à la demande de la Direction générale Environnement de la Commission européenne. Celle-ci "[met] en lumière les lacunes inquiétantes dans l'évaluation [des composés chimiques perturbateurs endocriniens] avant leur utilisation dans des produits de consommation". Le Beuc considère que "suite à la publication de cette étude, il est devenu évident que la réglementation européenne des produits chimiques doit être soumise à une refonte complète".
L'étude, intitulée "Etat de l'art de l'évaluation des perturbateurs endocriniens (1) " et commandée par la Commission en 2009, visait trois objectifs : passer en revue les articles scientifiques publiés depuis 10 ans, présenter les systèmes d'évaluation des PE de certains Etats membres, des principales économies hors-UE et des organisations internationales, et formuler des recommandations relatives aux problèmes soulevés. Elle pourrait ouvrir la voie à la révision du règlement relatif à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et du règlement Reach.
L'effet cocktail reconnu
Le document explique qu'il y a "de bons arguments" pour affirmer que les mélanges de PE peuvent avoir des effets qui dépassent ceux attendus des produits chimiques concernés pris séparément, "en particulier lorsqu'ils ont des effets similaires". Cet "effet cocktail" peut apparaître avec des doses inférieures à celles pour lesquelles chaque PE est censé avoir un impact négatif.
Sur le plan réglementaire, le rapport estime que le recensement de l'ensemble des PE présents selon divers scénarios d'exposition est de "la plus haute importance". L'information "fragmentée" actuellement disponible conduit probablement à sous-estimer les risques des PE.
En premier lieu, le rapport constate que les méthodes d'identification des PE acceptées et validées au niveau international "ne prennent en compte qu'une gamme limitée des effets connus des PE" et qu'il existe en particulier "des lacunes considérables" concernant les impacts subis par la faune sauvage. En conséquence, "il est pour l'instant impossible de déterminer de possibles effets néfastes" à partir des méthodes actuelles.
Pire, "pour une large gamme de perturbations, aucune méthode consensuelle et validée n'existe", déplore le document, ajoutant que "dans bien des cas, même les modèles de recherche scientifique pouvant servir de base pour des tests manquent". De telles lacunes "introduisent des incertitudes considérables qui négligent vraisemblablement des effets dangereux pour les humains et la faune". Faute de tests efficaces, le rapport estime qu'il faut se baser sur des études épidémiologiques afin d'identifier de potentiels risques.
Des tests européens incomplets et obsolètes
Concernant la réglementation européenne, les obligations de test et d'information prévues par certains textes "ne couvrent par l'étendue des perturbations endocriniennes qu'il est possible de contrôler" avec les méthodes internationalement reconnues. De même, le rapport déplore que les tests conduits en Europe n'utilisent pas les méthodes les plus sensibles et les mieux adaptées.
Par ailleurs, les valeurs seuils définies conformément au règlement CLP "sont largement arbitraires et sans justification scientifique", et sont "controversées".
Dans ce contexte, le rapport soumet une série de propositions à l'exécutif européen. Parmi ces recommandations figure notamment "la création d'une classe règlementaire spécifique aux PE". En matière d'application des règlements européens, le document recommande d'appliquer les toutes dernières méthodes internationalement reconnues. Quant à l'évaluation des PE, des modifications méthodologiques sont proposées, telle que l'évaluation de certains critères en parallèle plutôt que de façon séquentielle, afin de ne pas exclure certains PE potentiels.