Petit à petit, les briques de la
De son côté, la Métropole a lancé, en mars dernier, sa propre stratégie pour mieux cerner l'ampleur de la contamination et les possibles solutions de traitement.
Concernant l'eau, la question des PFAS se pose de manière accrue dans quatre communes : Givors, Grigny, Solaize et Marcy-l'Étoile. Celles-ci sont alimentées par les captages de Grigny et de Ternay, dont les analyses montrent une concentration de PFAS supérieure au seuil à ne pas dépasser pour l'eau de consommation, de 0,1 microgramme par litre. « La Métropole étudie le prolongement de canalisations pour venir diluer l'eau, pour un coût de 40 millions d'euros », a souligné Pierre Athanaze, vice-président de la Métropole du Grand-Lyon chargé de l'environnement, à l'occasion de la Conférence eau et santé organisée, le 15 novembre, par le Groupe de recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures et l'eau (Graie). Autre option envisagée cette fois par le syndicat Rhône-Sud : un traitement au charbon actif dans l'usine de production d'eau potable.
Recensement des sites potentiellement contaminés
La métropole a également entrepris un travail de recensement des zones de production et d'utilisation des PFAS, ainsi que des sites d'entraînement des pompiers. Car les mousses anti-incendie utilisée par ces derniers contiennent des PFAS. « Les pompiers de la métropole ont arrêté à 80 % l'utilisation des mousses contenant des PFAS, a précisé Pierre Athanaze. Des stocks de produits et des véhicules équipés sont néanmoins conservés en cas d'incendie d'hydrocarbures. » Le territoire est toutefois déjà marqué par des pollutions historiques, comme l'explosion dans un dépôt pétrolier du port Édouard-Herriot en 1987, avait déclenché un important incendie. « Le port Édouard-Herriot a largement été arrosé par des mousses ; on retrouve les PFAS dans la nappe d'accompagnement du Rhône », a regretté Pierre Athanaze.
Outre les incendies, la contamination peut arriver par les activités du quotidien. La métropole s'intéresse aux prélèvements en amont et en aval des stations d'épuration, mais également aux analyses des fumées et des cendres des incinérateurs (Gerland et Rilleux). Concernant le suivi des polluants atmosphériques qui pourraient toucher les sites en amont de Pierre-Bénite, des travaux sont également lancés avec l'Observatoire Atmo Auvergne-Rhône-Alpes, la plateforme de diagnostic territorial de la qualité de l'air. « Pour l'instant, nous ne disposons pas d'éléments normés », a noté Pierre Athanaze.
La contamination pourrait également venir de l'eau pompée dans le Rhône pour irriguer les champs. La question agricole est néanmoins sensible et pose la question de l'indemnisation des éventuelles denrées contaminées. L'Agence européenne de sécurité des aliments (Efsa) a fixé un seuil de sécurité pour les principaux PFAS présents dans les aliments. « Dans certaines communes, il est déconseillé de manger les œufs ou des poissons pêchés, y compris sur des secteurs comme le Garon aval [un affluent direct du Rhône], a indiqué Pierre Athanaze. Nous avons également identifié des problèmes sur de la mâche en dehors de la zone, sur le plateau mornantais. »
À propos de l'activité industrielle, en parallèle des suivis complémentaires demandés, la métropole compte sur un arrêté technique de l'usine d'Arkema pour voir si les taux de PFAS évoluent. « Pour l'instant, sur la nappe, nous observons les mêmes taux ; en revanche, ils diminuent dans le Rhône », a détaillé Pierre Athanaze. La métropole mise également sur l'évolution des pratiques des industriels, à travers un accompagnement avec le pôle de compétitivité Axelera dans la mise en place de techniques alternatives, mais aussi un engagement dans le « Manifeste pour une industrie qui se transforme ».
Une étude d'imprégnation de la population de longue haleine
La métropole lyonnaise participe également à des études pour comprendre les conséquences sur la santé de l'exposition à ces polluants. « Les Dreal font un travail énorme, mais il y a un manque de moyens pour réaliser un suivi sanitaire, notamment des pollutions chroniques », regrette Pierre Athanaze.
Deux études lancées pour la période 2023 à 2027 sont portées par l'Institut écocitoyen : l'une, « Matisse », va travailler sur des méthodes de prélèvements et réaliser des mesures environnementales à Lyon et à Fos-sur-Mer. « La population témoin de Fos-sur-Mer est également exposée à une pollution industrielle, mais pas de PFAS », a précisé Pierre Athanaze. L'autre, « Perle », vise à déterminer les sources possibles et à comparer l'imprégnation d'une population exposée. « Les initiatives avancent lentement, car nous avons des temps administratifs, a souligné Pierre Athanaze. Dans les études d'imprégnation, certaines questions sont intrusives sur les modes de vie et nous avons dû passer par quatre comités d'éthiques : cela a pris un an. Les premières prises de sang débuteront en 2025. »
Autre piste explorée : dans le cadre d'appel à manifestation d'intérêt 2023-2026, le Cancéropôle Lyon-Auvergne-Rhône-Alpes se penchera sur les liens entre perfluorés et cancers dans la bibliographie scientifique, tandis que les Hospices civils de Lyon meneront une étude sur les personnes atteintes de cancer.
Sur le plan national, une étude d'imprégnation de la population française aux PFAS sera lancée en 2024. « Ces valeurs pourront utilement éclairer les résultats de l'étude de biosurveillance locale portée par la Métropole de Lyon et l'Institut écocitoyen de Fos-sur-Mer. Santé publique France s'est rapprochée de ces acteurs pour partager les méthodologies scientifiques et assurer in fine la compatibilité des résultats », a indiqué la préfecture du Rhône dans un communiqué.