Par une ordonnance du 23 décembre 2021, la Haute Juridiction administrative a rejeté la requête en référé des organisations professionnelles de la filière solaire (Solidarités renouvelables, Enerplan, Syndicat des énergies renouvelables) visant à suspendre les textes de révision de certains tarifs d'achat solaires.
Les syndicats professionnels avaient déposé, fin novembre, un recours en référé, doublé d'un recours au fond, visant à suspendre, puis annuler, le décret et l'arrêté du 26 octobre 2021. Pris en application d'une disposition de la loi de finances pour 2021, ces deux textes révisent à la baisse les tarifs d'achat d'environ 850 contrats signés entre 2006 et 2010 et portant sur des installations photovoltaïques d'une puissance supérieure à 250 kilowatts crêtes (kWc). Le gouvernement estimait la rentabilité de ces installations « hors de proportion avec une rémunération normale des capitaux investis » et avait annoncé vouloir récupérer entre 300 et 400 millions d'euros par an.
Les requérants avaient mis en avant l'urgence à suspendre ces textes, entrés en vigueur le 1er décembre dernier, qui remettent en cause « la pérennité économique de l'activité des producteurs ». Ils avaient également fait valoir toute une série d'arguments qui, à leurs yeux, créaient un doute sur la légalité de ces textes : méconnaissance du principe de sécurité juridique, méconnaissance du principe de clarté et d'intelligibilité de la norme, réatroactivité illégale, utilisation d'une méthode surestimant la rentabilité réelle, méconnaissance de la directive communautaire sur les énergies renouvelables, etc.
Le Conseil d'État balaie l'ensemble de ces moyens, sans se prononcer sur la condition d'urgence, en se fondant sur la décision du Conseil constitutionnel du 28 décembre 2020. Ce dernier avait déclaré conforme à la Constitution l'article contesté de la loi de finances pour 2021. « Signés alors que, dans le même temps, les coûts d'installation des centrales ont été divisés par quatre, ces contrats conclus en général pour une durée de vingt ans reposent sur des tarifs de rachat générant pour les distributeurs d'électricité, acheteurs obligés, des surcoûts intégralement compensés par l'État (…) ainsi que, pour "certains producteurs", des "effets d'aubaine" "au détriment du bon usage des deniers publics et de intérêts financiers de l'État" », pointe le Conseil d'État.
Et d'enfoncer le clou : « Il résulte de l'instruction que la baisse tarifaire n'était pas imprévisible pour un opérateur économique prudent et avisé, notamment pour des producteurs professionnels tels que ceux concernés par la réforme. » Reste maintenant au Conseil d'État à se prononcer sur la requête au fond. Attendue d'ici quelques mois, son issue ne fait guère de doute compte tenu de la teneur de cette décision.