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Baisse des prélèvements en eau : quelle répartition entre les usagers du bassin Seine-Normandie ?

Le comité de bassin Seine-Normandie a décliné pour chaque usager l'objectif du Plan eau de réduction des prélèvements de 10 % en 2030. Sa stratégie d'adaptation révisée propose aussi des outils pour une meilleure appropriation par les acteurs.

Eau  |    |  D. Laperche
Baisse des prélèvements en eau : quelle répartition entre les usagers du bassin Seine-Normandie ?

« Le changement climatique (1) est le défi environnemental de notre siècle, nous devons le relever ensemble. Il exige de concevoir nos activités autrement », ont assuré en ouverture de la stratégie d'adaptation au changement climatique révisé du bassin Seine-Normandie (2) , Marc Guillaume, son préfet, et Nicolas Juillet, président du comité de bassin. Une première version du document avait été arrêtée en décembre 2016. Sept ans plus tard, cette stratégie actualisée s'insère dans un contexte de fréquence accrue des événements extrêmes. Elle a été adoptée à l'unanimité, le 5 octobre dernier.

Cette révision a été l'occasion de répondre à la demande du Gouvernement de décliner, par usager, à l'échelle du bassin, l'objectif de 10 % de réduction des prélèvements d'eau fixé par le Plan eau pour 2030. Pour mémoire, sur ce bassin, les prélèvements les plus importants servent aux canaux (1,6 milliard de mètres cubes en 2019) et pour l'alimentation en eau potable (1,4 milliard de mètres cubes). Viennent ensuite, à part égale, le refroidissement industriel ainsi que les autres usages économiques (0,4 milliard de mètres cubes). L'irrigation représente, quant à elle, 0,2 milliard de mètres cubes.

Une réduction de 14 % visée pour l'eau potable

Le choix a été fait de cibler en priorité les prélèvements pour l'eau potable. « Pour l'alimentation en eau potable, levier principal et incontournable sur le bassin compte tenu du caractère très majoritaire de cet usage, une réduction de 14 % est visée », fixe la stratégie. Un objectif ambitieux au vu du rythme de réduction observé ces dix dernières années (6 %) pour une augmentation de population de 4 % et des prévisions de croissance du nombre d'habitants de 10 % d'ici à 2040 et dans un contexte de vagues de chaleur plus fréquentes.  En regard, les leviers envisagés sont la réduction des fuites sur le réseau (avec un gain modeste d'entre un et trois points selon la stratégie), la sensibilisation de la population ainsi que des acteurs des activités non domestiques (commerces, bureaux, arrosage de voirie ou bâtiments publics).

Les huit objectifs de la stratégie d'adaptation du bassin

- Réduire la dépendance à l'eau et assurer un développement humain moins consommateur d'eau ;
- Préserver la qualité de l'eau ;
- Protéger la biodiversité et les services écosystémiques ;
- Prévenir les risques d'inondations (et coulées de boue) ;
- Anticiper les conséquences de l'élévation du niveau de la mer ;
- Favoriser la recharge naturelle des nappes ;
- Lutter contre la vulnérabilité aux vagues de chaleur ;
- Accompagner les acteurs pour des changements de comportement profonds.

Pour les prélèvements industriels, hors refroidissement, la baisse attendue, au regard des dossiers d'aide passés de l'agence, est de 4 %. Cela « suppose une accélération forte des projets et demandes d'aide pour réduction des prélèvements industriels. Par le passé, les prélèvements sont restés stables, malgré les améliorations mises en place », note toutefois la stratégie.

Concernant l'agriculture, le mot d'ordre fixé sur le plan national est une « sobriété à l'hectare ». L'idée, derrière cette notion, est que les surfaces irriguées vont augmenter, notamment avec l'arrivée de nouveaux agriculteurs, mais que grâce au choix des pratiques culturales, à la restauration de la qualité des sols et à l'amélioration des techniques d'irrigation, les prélèvements vont se stabiliser.

Dans le même esprit, le refroidissement et l'alimentation des canaux devraient être traités à l'échelle nationale et ne sont pas abordés dans cette déclinaison locale de l'objectif de 10 %. « Les prélèvements pour alimentation des canaux sont (…) restés stables sur la décennie, avec quelques variations annuelles, mais la perspective du canal Seine-Nord-Europe est un facteur d'augmentation prochaine, souligne toutefois la stratégie. Les nouveaux besoins de refroidissement (développement du programme nucléaire, développement du réseau de froid de Paris…), ainsi que les nouveaux besoins pour alimenter le futur canal Seine-Nord (…) devront donc s'inscrire dans la trajectoire de baisse globale. »

Les canaux, un enjeu en Seine-amont

Premier préleveur à l'échelle du bassin, les canaux représentent en effet un enjeu local fort, notamment sur le territoire de la Seine-amont, avec les canaux du bassin de l'Armançon, et le canal de Bourgogne. « L'adaptation au changement climatique nécessite une collaboration plus étroite avec Voies navigables de France (VNF) dans ces zones, estime la stratégie. Les grands lacs de Seine du territoire risquent de voir leur efficacité en termes de soutien d'étiage ou de réduction des risques inondation à l'aval, se réduire avec le changement climatique. » Un stockage inférieur à 80 % de leur capacité pourrait ainsi entraîner de graves répercussions. « Ce possible manque d'eau questionne également la capacité de refroidissement de la centrale de Nogent-sur-Seine et la volonté de certains élus locaux d'y construire un EPR », pointe la stratégie.

Une vigilance est également de mise à propos de l'approvisionnement en eau potable. Outre la sécheresse, les aires d'alimentation de captage sont également menacées par des pollutions agricoles diffuses. De son côté, l'agriculture devra faire face à la baisse des ressources. « Autour de Troyes, les conflits autour de la ressource s'accentuent à mesure que les forages agricoles se multiplient, constate la stratégie. La trajectoire agricole de certains territoires doit donc être questionnée pour assurer une pratique sobre et durable ».

Les vignobles et les zones karstiques sont particulièrement concernés par le risque de ruissellement-érosion. Ce phénomène peut être limité par la plantation d'arbres. Avec une réflexion à mener sur les espèces adaptées au climat de demain. Car les écosystèmes souffriront également de cette tension hydrique. « Le changement climatique pose la question de redéfinir les seuils de volumes prélevables pour garantir des débits minimaux, souligne la stratégie. Malgré une bonne connaissance des zones humides, les moyens manquent parfois pour les protéger. Une montée en compétences de tous les acteurs est nécessaire. »

Une dilution moindre des rejets

Dans la Seine francilienne, un des points d'attention est la baisse du débit des cours d'eau et, par conséquent, la moindre dilution des rejets, par exemple de certaines stations d'épuration. Pour la Seine, dont le débit (3) ramené à l'habitant est déjà faible, la question se pose de façon marquée : « Si son débit est aujourd'hui soutenu par les grands lacs de Seine, ce soutien pourrait ne plus être suffisant à l'avenir, d'autant plus si la population continue à croître, note la stratégie. Cet enjeu questionne également la croissance de la population urbaine. Les plans de développement urbain devraient être en adéquation avec la ressource en eau du territoire, tant en termes d'eau potable que de capacité de dilution des milieux. » Autre risque : les inondations et leurs conséquences. « Infiltrer les eaux pluviales à la source, partout où c'est possible, permettrait de réduire cette pression, souligne la stratégie. Mais il manque des moyens humains pour sensibiliser élus, acteurs de l'aménagement et services techniques des villes, proactifs une fois inclus dans les discussions. De plus, il n'existe pas de déclinaison territoriale. »

Du côté de la Normandie, les risques se situent à plusieurs niveaux : les sols et les nappes pourraient être touchés de façon accrue par la montée du biseau salé. Le territoire doit également faire face aux pollutions diffuses, aux ruissellements, mais aussi aux tensions quantitatives. « Le cas de Chartres, dont certains captages ont dû être suspendus du fait d'une baisse sous leur seuil de prélèvement liée à l'irrigation, conduit à vouloir améliorer la connaissance des prélèvements agricoles, illustre la stratégie. Cela éviterait également les discordances constatées entre les données recueillies par les DDT et celles recueillies par l'agence de l'eau. »

Menaces sur le rôle de château d'eau de la Haute-Marne

Concernant le sous-bassin des vallées de Marne, les tensions quantitatives risquent aussi de s'accentuer, notamment sur la nappe de la craie. Le rôle de « château d'eau » de la Haute-Marne pourrait être remis en question. « Comme sur l'ensemble du bassin, l'imperméabilisation, et de manière plus globale l'artificialisation des terres, réduit les capacités d'infiltration des sols », constate la stratégie. À ce risque s'ajoutent des questions qualitatives, ainsi que l'accroissement des ruissellements et des inondations « Le Département de l'Aube fait partie du projet d'un collectif européen pour devenir un pôle de la culture du chanvre, qui nécessite peu d'eau et autres intrants, met en avant la stratégie. Cette culture se développe également bien dans la Marne. »

L'ensemble de ces difficultés se retrouve également dans les vallées d'Oise, où seulement 24 % des masses d'eau étaient en bon état en 2019 et où une préoccupation sur les quantités disponibles existe, y compris pour l'alimentation des populations.

Pour réduire l'ensemble de ces risques, les acteurs locaux sont invités à décliner la stratégie dans les différents schémas, programmes et plans d'aménagement du territoire. Pour les aider, elle fournit des fiches de réponses opérationnelles, où sont indentifiés les acteurs clefs à impliquer pour chaque enjeu. Un suivi de la mise en œuvre est également prévu : un bilan des outils de planification devrait être réalisé par les instances de bassin et des indicateurs de suivi devraient être présentés tous les deux ans au comité de bassin.

1. Lire Comment se préparer aux futures sécheresse<br /><br />
https://www.actu-environnement.com/dossier-actu/-secheresse-retenues-substitutions-plan-actions-chantier-planification-ecologique-eau-96
2. Télécharger la version révision de la stratégie d'adaptation au changement climatique du bassin Seine Normandie
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43059-strategie-adaptation-changement-climatique-bassin-seine-normandie-revisee-2023-plan-eau.pdf
3. Le pouvoir de dilution de la Seine est de seulement de 700 L/jour/habitant quand celui du Rhône est de 17000 L/jour/habitant

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