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COP 27 : une première semaine mitigée pour les ONG

À l'issue de la première semaine à la COP 27, les chefs d'État ont appelé à renforcer et réformer le financement international du climat. Les ONG du RAC se montrent critiques et jugent que les pays n'ont quasiment rien apporté de nouveau sur la table.

Gouvernance  |    |  R. Boughriet
COP 27 : une première semaine mitigée pour les ONG

Après une semaine de discussions, la Conférence mondiale sur le climat (COP 27), qui se tient à Charm el-Cheikh, en Égypte, est à mi-chemin et connaît quelques avancées. Les dirigeants de la planète ont été nombreux à appeler à un renforcement et une réforme du financement international du climat. Et à réitérer les demandes aux pays développés de débloquer les 100 milliards de dollars de finance climat par an en faveur des pays du Sud.

De nouveaux engagements pour financer l'adaptation des pays du Sud

À l'instar des chefs d'État britannique, français ou américain, qui se sont notamment engagés à renforcer leurs financements pour l'adaptation des pays en développement au changement climatique. Ainsi, le Royaume-Uni, hôte de la COP 26 l'an dernier, promet 11,6 milliards de livres sterling en cinq ans en faveur du financement international du climat, tout en triplant son financement pour l'adaptation, à 1,5 milliard de livres sterling d'ici à 2025, a déclaré le nouveau Premier ministre britannique Rishi Sunak, à la tribune de la COP 27. Le président Emmanuel Macron a aussi annoncé une enveloppe de 6 milliards d'euros chaque année, jusqu'en 2025, en faveur de l'action climatique dans les pays en développement, dont un tiers, soit 2 milliards, pour l'adaptation. « Ce qui est notre juste part de ces efforts conformes à nos engagements de Copenhague et de Paris », a-t-il assuré.

De son côté, les États-Unis, deuxième plus gros pollueur mondial après la Chine, prévoient une enveloppe de 100 millions de dollars sur plusieurs années pour l'adaptation des pays les plus pauvres (soit le double de son financement actuel). En parallèle, le président Joe Biden veut aussi débloquer 150 millions de dollars spécialement pour des projets d'adaptation et de résilience en Afrique. Il a également parlé de l'utilisation des finances publiques pour débloquer des milliards d'investissements privés par le biais de l'initiative Climate Finance + pour aider les pays du Sud à émettre des obligations vertes.

De même, Joe Biden a assuré que les États-Unis tiendraient leur objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50 à 52 % en 2030, par rapport aux niveaux de 2005. Mais pour Jeff Ordower, directeur de l'ONG 350.org en Amérique du Nord, le pays devrait aller encore plus loin dans ses engagements climatiques : « Le président Biden doit renforcer son leadership dans le domaine de l'environnement, en bloquant l'approbation par les autorités fédérales de tous les nouveaux projets de combustibles fossiles qui menacent les populations américaines dans tous les États-Unis et contribuent au chaos climatique dans le monde entier. »

Un bouclier contre les risques climatiques

Le président américain a aussi affirmé son soutien au Bouclier mondial du G7 contre les risques climatiques, lancé le 14 novembre à la COP 27, avec une soixantaine de pays vulnérables, membres du V20. Ce dispositif vise, en particulier, à élargir l'accès aux systèmes d'assurance contre les risques climatiques pour les pays les plus vulnérables. L'Allemagne, le Canada, le Danemark, les États-Unis, la France et l'Irlande y contribueront ensemble à hauteur de 210 millions d'euros. La France y injectera notamment 20 millions d'euros, en subventions, en 2023. L'initiative « soutiendra la conception et le déploiement de solutions de protection sociale et d'assurance pour les communautés locales, les entreprises et les ménages, afin de fournir un financement rapide et fiable lorsque les catastrophes se produisent, à l'image des systèmes d'assurance qui peuvent exister dans les pays développés. Le bouclier permettra ainsi de renforcer la résilience des communautés et soutenir le développement économique et social », explique le ministère français de l'Économie. Le Bangladesh, le Costa Rica, les Fidji, le Ghana, le Pakistan, les Philippines et le Sénégal feront partie des premiers pays à bénéficier du dispositif.

Le bouclier ne peut se substituer aux financements des « pertes et dommages »

Toutefois, les ONG environnementales critiquent l'ambition de ce bouclier et la série d'annonces financières faites à la COP 27, dont celles qu'elles réclamaient pourtant sur l'indemnisation des « pertes et dommages ».

« Que ce soit sur l'adaptation au changement climatique, la finance climat, les pertes et dommages ou la réduction des émissions, les pays n'ont quasiment rien apporté de nouveau sur la table pour donner une impulsion aux négociations », dénoncent les ONG du Réseau action climat (RAC).

“ Le Bouclier mondial contre les risques climatiques ne peut se substituer à la création, dès cette COP, d'un instrument financier dédié aux pertes et dommages  ” ONG du RAC
Huit gouvernements, dont l'Autriche, l'Écosse, la Belgique, le Danemark et l'Allemagne, se seraient engagés à la COP 27 à verser des financements supplémentaires, afin d'aider les pays en développement à faire face aux effets dévastateurs et inévitables de la crise climatique. L'Allemagne a par exemple annoncé 170 millions de dollars pour les pertes et dommages, et la Belgique 2,5 millions d'euros, spécifiquement au Mozambique, qui a subi de terribles pertes l'année dernière en raison de pluies extrêmes. L'Autriche a également annoncé 50 millions de dollars pour les pertes et dommages, et l'Écosse a promis 5 millions de livres supplémentaires.

Or, l'Allemagne prévoirait de mettre des fonds à disposition sur la base de son régime d'assurance du Bouclier mondial contre les risques climatiques, pointe du doigt l'ONG 350.org. « Bien que le système assurantiel puisse avoir un rôle à jouer dans le financement de certaines dépenses liées au climat, les pertes et préjudices nécessitent un financement durable issu de sources fiables. Entre autres problèmes, les cotisations élevées peuvent créer d'importants écarts en matière de couverture, et des études ont démontré que les pays les plus pauvres en bénéficiaient moins. »

Les gouvernements mettent sur la table « quelques centaines de millions », quand les besoins économiques pour répondre aux pertes et dommages pourraient atteindre jusqu'à 580 milliards par an d'ici 2030, et ce uniquement pour les pays du Sud, déplorent aussi les ONG du RAC.  « Le bouclier ne peut en aucun cas se substituer à la création, dès cette COP, d'un instrument financier dédié aux pertes et dommages sous l'égide de la Ccnucc, à travers lequel les pays du Nord devraient s'acquitter de leur dette climatique envers les pays du Sud », prévient Fanny Petitbon, responsable plaidoyer de l'association humanitaire Care France. « Pour la plupart des pays, cet argent n'est pas nouveau. Initialement destiné à aider les pays du Sud à réduire leurs émissions et à s'adapter, il a été redirigé vers les pertes et dommages », regrette-t-elle.

La France soutient, en outre, l'appel d'António Guterres, secrétaire général des Nations unies « à généraliser les systèmes d'alerte précoces » au cours des cinq prochaines années. L'Hexagone doublera à partir de 2023 sa contribution à l'Initiative pour les systèmes d'alerte précoces face aux risques climatiques (Crews), pour la porter à 8 millions d'euros par an. L'ONU demande, quant à elle, de mobiliser 3,1 milliards de dollars pour ces systèmes d'ici à 2027. Ce chiffre « représente une petite fraction - environ 6 % - des 50 milliards de dollars requis pour le financement de l'adaptation, selon l'Organisation météorologique mondiale (OMM) », souligne l'ONU. Dépenser seulement 800 millions de dollars pour ces systèmes d'alerte dans les pays en développement permettrait d'éviter des pertes de 3 à 16 milliards de dollars par an, chiffre la Commission mondiale sur l'adaptation.

Peu de pays ont mis à jour leurs engagements à réduire les émissions

Autre critique des ONG : la plupart des pays du G20, qui représentent à eux seuls 80 % du PIB mondial, n'ont pas soumis de nouveaux objectifs pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, alors qu'ils sont loin d'être sur la bonne trajectoire pour respecter l'Accord de Paris. Seuls 29 États, bientôt rejoints par la Turquie et le Mexique, ont mis à jour leurs engagements à la veille de la COP 27, indique Pierre Cannet, directeur du plaidoyer au WWF France. « L'ambition climatique progresse toujours moins vite que le réchauffement lui-même », déplore-t-il.

Certains pays, comme les États-Unis, prônent également « la compensation via des marchés carbone non régulés pour financer la transition énergétique des pays en développement. Pourtant, certains projets de compensation ont des effets néfastes sur la biodiversité et les droits humains (plantations de monocultures, accaparement de terres et expropriation auprès de communautés locales) », fustige le Réseau action climat. Lancée à la COP 27, l'initiative Africa Carbon Markets (Marchés carbone Afrique) vise à élargir la participation de l'Afrique aux marchés volontaires du carbone, donc non régulés.

En revanche, le WWF salue l'engagement de plusieurs pays, comme la France, les États-Unis, le Ghana, le Gabon, la Colombie ou les Philippines, à la COP 27, à protéger les forêts et les écosystèmes (zones humides, mangroves, tourbières ou fonds marins), avant la Conférence mondiale sur la biodiversité (COP 15), en décembre, à Montréal.

« On ressort de cette première semaine avec un sentiment mitigé. Celui d'un petit sursaut, avec de nouvelles annonces pour la nature - comme l'interdiction soutenue par la France d'exploitation des fonds marins - ou encore d'annonce de financements - comme celle des États-Unis. Et en même temps, le sentiment d'inachevé quant au niveau d'ambition. Chacun semble attendre maintenant des autres, en se regardant en chien de faïence, estimant avoir fait sa part... sans réaliser que chacun devra faire plus pour éviter collectivement la catastrophe climatique », conclut Pierre Cannet, du WWF France. Les ONG appellent par conséquent les pays riches à concrétiser dès cette COP le financement des pertes et dommages et à engager les États à sortir de toutes les énergies fossiles.

Réactions1 réaction à cet article

Critiquer et juger sont les deux mamelles des activistes inactifs (ils confondent agitation et action), surtout les voyageurs intercontinentaux, touristes des COP.

Albatros | 18 novembre 2022 à 19h00 Signaler un contenu inapproprié

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