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Lutte contre l'artificialisation : comment le Gouvernement entend préserver les grands projets

L'objectif ZAN 2050 et celui de division par deux du rythme d'artificialisation d'ici à 2031 vont subir une série d'aménagements. Parmi ceux-ci la comptabilisation à l'échelle nationale des grands projets d'envergure nationale et d'industrie verte.

Aménagement  |    |  L. Radisson
Lutte contre l'artificialisation : comment le Gouvernement entend préserver les grands projets

Comment préserver les grands projets d'envergure nationale tout en maintenant les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et en laissant une capacité de développement aux collectivités territoriales ? C'est cette équation à plusieurs inconnues que le Gouvernement tente de résoudre en ce moment.

Les objectifs de diviser par deux le rythme de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) d'ici à 2031 et d'atteindre le zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050, tous deux inscrits dans la loi Climat et résilience du 22 août 2021, ne sont pas remis en cause, a confirmé le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, ce mercredi 21 juin devant la presse.

Mais le Gouvernement a prévu un certain nombre d'aménagements dans leur mise en œuvre afin de prendre en compte les craintes qu'ils suscitent toujours à l'échelon local, mais aussi de se préserver la capacité de mettre en œuvre de grands projets d'envergure nationale (GPEN) ou d'industrie verte (PIV).

L'exécutif a pour objectif de finaliser le dispositif juridique d'ici à la fin de l'été alors que plusieurs textes sont en cours d'adoption : la proposition de loi sénatoriale sur la mise en œuvre du ZAN actuellement en discussion à l'Assemblée nationale, le projet de loi relatif à l'industrie verte examiné en ce moment par les sénateurs, et les nouveaux décrets d'application ZAN soumis parallèlement à la consultation du public.

Enveloppe nationale de 15 000 hectares

Le principe retenu par le Gouvernement est celui, non d'exclure les grands projets du dispositif, mais de les comptabiliser à l'échelle nationale, afin qu'ils ne soient pas décomptés à l'échelle d'une région ou d'une commune. La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a suivi cette voie en précisant la liste des projets susceptibles d'être considérés comme d'envergure nationale, ou européenne, et en leur réservant une enveloppe nationale de 15 000 hectares. Il s'agit de projets présentant un intérêt général majeur qui feront l'objet d'un arrêté du ministre chargé de l'Urbanisme.

“ Un tel mécanisme de forfaitisation permet de s'assurer que ces projets ne soient pas imputés uniquement à leur territoire d'accueil ” Bastien Marchive, député Renaissance
Parmi ceux-ci figurent les opérations déclarées d'utilité publique, les lignes ferroviaires à grande vitesse, les projets industriels d'intérêt majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique, l'aménagement des grands ports maritimes de l'État, les opérations intéressant la défense, les établissements pénitentiaires ou encore les réacteurs nucléaires. Concernant ces derniers, on notera que la loi d'accélération du nucléaire en cours de promulgation les a exclus purement et simplement du décompte régional et local de l'artificialisation, et qu'elle autorise leur exclusion du décompte national par une future loi.

Le texte (1) de la proposition de loi ZAN issue de l'examen en commission prévoit que l'enveloppe de 15 000 hectares sera déduite de l'enveloppe globale d'artificialisation dont dispose la France pour la décennie 2021 à 2031. En d'autres termes, c'est une enveloppe d'artificialisation de 110 000 hectares qui sera finalement répartie entre les différentes régions françaises, et non plus de 125 000 hectares comme prévu initialement. « Un tel mécanisme de forfaitisation permet de s'assurer que ces projets, dont l'incidence foncière peut être considérable à l'échelle locale et régionale, ne soient pas imputés uniquement à leur territoire d'accueil, alors même qu'ils bénéficient à l'ensemble du territoire national », explique le rapport établi par le député Renaissance Bastien Marchive.

Revendications des Régions

Certaines Régions étaient en effet montées au créneau pour mettre en lumière une forme d'injustice. C'est le cas emblématique des Hauts-de-France, rappelle Christophe Béchu, qui, avec 10 400 hectares artificialisés par le projet de canal Seine-Nord Europe et les aménagements destinés à l'éolien marin à Dunkerque, avait déjà absorbé plus de 50 % de son enveloppe régionale par ces grands projets d'envergure nationale. C'est également le cas de la Région Occitanie qui a connu la construction de la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse.

La répartition de l'enveloppe entre Régions se fera par l'application d'un coefficient de péréquation « au plafond applicable aux régions couvertes par un Sraddet », selon la version actuelle de la proposition de loi. Mais cela pourrait susciter de nouvelles incompréhensions dans la mesure où ne seront pas prises en compte les spécificités de chacune d'entre elles.  « Tous les territoires ne sont pas égaux en matière de densité. Pourquoi alors fixer le même objectif pour tous ? réagit déjà Jean-Phiilppe Dugoin-Clément, vice-président de la Région Île-de-France. Certes, les règles pour l'Île-de-France, la Corse et les Outre-mer diffèrent légèrement du reste du territoire, mais il faudrait aller plus loin. Il est beaucoup plus simple de respecter les objectifs de la loi Climat et résilience lorsque l'on est dans une région en décroissance économique et démographique. De même, entre une région déjà très artificialisée et une autre qui l'est très peu, entre une région qui est sur une trajectoire vertueuse et une autre qui ne l'est pas, avoir le même objectif ZAN n'a pas beaucoup de sens. »

Priorité sur les friches

La rédaction retenue dans la proposition de loi sortie de la commission a été commune avec Bercy, indique en tout cas Christophe Béchu. « Concernant le ZAN, actuellement en cours de discussion à l'Assemblée nationale, je me réjouis de l'adoption de l'amendement permettant de compter à part les projets industriels majeurs ainsi que tous ceux qui contribuent aux chaînes de valeur de développement durable », s'est en effet félicité le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, lors de la discussion générale sur le projet de loi Industrie verte au Sénat.

Car le Gouvernement souhaite également intégrer dans cette enveloppe des 15 000 hectares les projets d'industrie verte (PIV) permis par la loi éponyme en cours de discussion. Et ce, malgré le vote en commission d'un amendement  (2) du rapporteur LR Laurent Somon qui a exclu du décompte du ZAN l'ensemble des projets industriels concourant à la transition écologique, ou essentiels pour la souveraineté nationale, de même que l'artificialisation induite par les besoins en logements liés à ces infrastructures ou le préaménagement par l'État de très grands sites d'accueil industriels. « Ce sera un des sujets de la commission mixte paritaire (CMP) », prévoit Christophe Béchu. Une commission mixte que l'exécutif escompte se voir réunir la deuxième ou troisième semaine de juillet.

Malgré la volonté de réindustrialisation affichée par le Gouvernement, le ministre estime, pour autant, que l'enveloppe de 15 000 hectares d'artificialisation ne devrait pas être utilisée dans sa totalité. En effet, l'exécutif se fixe également la priorité de recycler les 170 000 hectares de friches recensées en France, en mettant notamment en œuvre le Fonds friches qui permet de prendre en charge une partie des surcoûts pour les industriels ou aménageurs. « Il n'est pas sûr que ce recensement soit exhaustif », estime en outre M. Béchu, qui, avec son homologue de l'Industrie, a confié une mission au préfet Rollon Mouchel-Blaisot sur la mobilisation du foncier industriel. Les nouveaux projets industriels vont s'installer prioritairement sur les friches, mais aussi dans les ports maritimes, abonde un conseiller ministériel, estimant à 5 000 hectares les besoins d'artificialisation pour l'industrie au cours de la décennie.

1. Télécharger la proposition de loi issue de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42028-proposition-loi-zan-assemblee-commission.pdf
2. Consulter l'amendement adopté
https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/607/Amdt_COM-334.html

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