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Actu-Environnement

Les États doivent assurer une protection effective contre le changement climatique, selon la CEDH

MAJ le 09/04/2024

Dans une décision jugée historique en matière de justice climatique, la Cour européenne des droits de l'homme affirme le droit à une protection effective par les États contre les effets néfastes du changement climatique.

Gouvernance  |    |  L. Radisson
Les États doivent assurer une protection effective contre le changement climatique, selon la CEDH

Ce sont trois affaires ayant pour objet les changements climatiques, sur les douze pendantes devant elle, que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait à juger ce mardi 9 avril. La juridiction internationale fait grandement progresser la justice climatique en donnant raison aux requérantes dans l'affaire dite « des grands-mères suisses », tandis qu'elle déclare irrecevables la requête de six jeunes Portugais dirigée contre 33 États, de même que celle de Damien Carême contre l'État français. La première en raison du non-épuisement des voies de recours internes exigé par la Convention européenne des droits de l'homme. La seconde du fait que le requérant n'a pas la qualité de victime, n'ayant que des liens limités avec la commune de Grande-Synthe, et ce, bien qu'il en ait été le maire.

Dans l'affaire des grands-mères suisses, le contentieux avait été lancé par quatre femmes âgées et l'association Verein KlimaSeniorinnen Schweiz, qui reprochaient à l'État suisse de ne pas avoir pris des mesures suffisantes pour atténuer les conséquences du réchauffement climatique en dépit des obligations que lui impose la Convention européenne des droits de l'homme. L'audience s'était tenue le même jour que l'affaire Damien Carême, le 27 septembre 2023.

Violation du droit au respect de la vie privée et familiale

La CEDH juge qu'il y a eu violation de l'article 8 de la Convention qui affirme le droit relatif au respect de la vie privée et familiale. « L'article 8 de la Convention englobe un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l'État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie », pose la décision.

“ Le devoir primordial d'un État contractant est d'adopter, et d'appliquer concrètement, une réglementation et des mesures aptes à atténuer les effets actuels et futurs, potentiellement irréversibles, du changement climatique ” CEDH
Dans ce contexte, ajoute-t-elle, « le devoir primordial d'un État contractant est d'adopter, et d'appliquer concrètement, une réglementation et des mesures aptes à atténuer les effets actuels et futurs, potentiellement irréversibles, du changement climatique ». La Cour rappelle qu'elle n'est compétente que pour interpréter la Convention européenne des droits de l'homme et ses protocoles. Mais, eu égard aux engagements internationaux pris par les États parties à la Convention, en particulier à travers l'Accord de Paris, et aux informations scientifiques fournies par le Giec, « les États doivent mettre en place la réglementation et les mesures nécessaires pour prévenir une augmentation des concentrations de GES dans l'atmosphère terrestre et une élévation de la température moyenne de la planète à des niveaux qui pourraient avoir des répercussions graves et irréversibles sur les droits de l'homme protégés par l'article 8 ».

Pour cela, les États doivent prendre des mesures de réduction des GES afin « d'atteindre la neutralité nette, en principe au cours des trois prochaines décennies (…). À cet égard, il faut que les États mettent en place des objectifs et calendriers pertinents, lesquels doivent faire partie intégrante du cadre réglementaire interne et servir d'assise aux mesures d'atténuation », affirme la Cour.

Violation du droit à un procès équitable

Si cette dernière déclare les griefs des quatre personnes physiques irrecevables car elles ne remplissent pas la qualité de victime, elle accueille en revanche l'action de l'association requérante et conclut que la Confédération suisse a manqué aux obligations que la Convention lui imposait en matière d'action climatique. « Le processus de mise en place du cadre réglementaire interne pertinent a comporté de graves lacunes, notamment un manquement des autorités suisses à quantifier, au moyen d'un budget carbone ou d'une autre manière, les limites nationales applicables aux émissions de GES », juge la Cour, qui relève aussi que la Suisse n'a pas atteint ses objectifs passés de réduction des émissions de GES.

La CEDH juge également qu'il y a eu une violation par la Suisse de l'article 6, qui impose un droit à un procès équitable. Elle juge que « le rejet de l'action intentée par l'association requérante, d'abord par une autorité administrative (…), puis par des tribunaux internes, à deux niveaux de juridiction distincts, s'analyse en une atteinte au droit d'accès de l'intéressée à un tribunal ». Et rappelle « le rôle clé que les juridictions nationales jouent dans les litiges relatifs au changement climatique ». « Eu égard aux principes de responsabilité partagée et de subsidiarité, c'est au premier chef aux autorités nationales, notamment aux juridictions, qu'il incombe de veiller au respect des obligations découlant de la Convention », affirme la juridiction.

« Décision historique à la CEDH », réagit Corinne Lepage sur X. « Même si les règles de recevabilité restent sévères, la carence climat des États constitue une violation des droits humains et du droit à la santé », ajoute l'avocate de Damien Carême.

Pour l'avocat et professeur de droit Arnaud Gossement, avec cette décision, « le contentieux climatique va s'enrichir d'une nouvelle question : celle du respect de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ». « Mais le niveau d'exigence et de rigueur des requêtes devra être très élevé. Et le juge national devra d'abord être saisi », observe-t-il au regard de cette nouvelle jurisprudence.

Réactions3 réactions à cet article

bonjour,
dans les pays de la Loire nous sommes assez peu concernés par le changement climatique, tout au plus heritons du climat 400/500 km au sud.
Ça n'empêche pas d'être tous concernés et d'agir par nos comportements, une goutte d'eau sans doute mais ça fait beaucoup multiplié par 4 millions environ.
tout au plus montrer l'exemple car on subira encore des années la pollution francilienne par vent noroit, ou bétonnage hystérique de nos côtes.

pemmore | 10 avril 2024 à 10h53 Signaler un contenu inapproprié

Bjr , le message de Pemmore ressemble étrangement aux propos de Pierre Dac " En cas de guerre mondiale, je file à l'étranger"
Au regard du bouleversement climatique et de la montée du niveau des océans , comment peut on penser que le le monde du vivant, et donc l'humanité, puisse être à l'abri, partout où il se trouve?
Sur le jugement de la CEDH: il est particulièrement intéressant, car il ne se limite pas (plus) à l'appréciation des carences de protection des conséquences, mais plutôt , en grande partie, des carences en terme de prévention, c'est là un tournant fondamental pour la prise en compte de la responsabilisation des décideurs.

paco55 | 10 avril 2024 à 14h07 Signaler un contenu inapproprié

En France, que donnerait la condamnation d'un état ruiné ? Même s'il a signé inconsidérément un accord pour donner une victoire au triste quinquennat Hollande et qui a failli nobéliser Fabius (défense de rire).
Allez, courage à ceux qui travaillent !

Albatros | 10 avril 2024 à 16h31 Signaler un contenu inapproprié

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