Des investissements, de l'emploi, du chiffre d'affaires : après des années de gestation, la filière française de l'éolien en mer a, enfin, pris forme. Des résultats qui lui permettent d'espérer un développement conforme aux objectifs de l'État.
Le démarrage de la filière éolienne offshore française aura été poussif, mais le secteur commence à tenir ses promesses. Le parc de Saint-Nazaire vient d'injecter ses premiers kilowattheures (kWh) dans le réseau et trois nouvelles infrastructures sont en construction : à Saint-Brieuc, en Bretagne, à Fécamp et à Courseulles-sur-Mer, en Normandie. À différents stades, quatre appels à projets sont par ailleurs en phase d'instruction.
Des revenus et des emplois nouveaux
Selon le dernier rapport de l'Observatoire des énergies de la mer, publié mardi 14 juin, près de 2,6 milliards d'euros ont été investis dans cette énergie, en France, en 2021, dont 2,2 milliards par les développeurs exploitants, afin de financer la fabrication des composants des parcs, nacelles et pales notamment, ainsi que leur installation. Soit une augmentation de 82 % par rapport à 2020. De quoi assurer aux prestataires et autres fournisseurs de la chaîne de valeur, en attendant la mise en production de tous ces parcs, d'engranger un chiffre d'affaires de 1,3 milliard (+ 67 %). Cette manne bénéficie en partie aux entreprises françaises, celles des Pays de la Loire en tête, qui détiennent environ un tiers des capacités européennes en ce qui concerne les turbines, les pales et les sous-stations électriques, note le rapport. Mais en raison de leur solide expérience acquise en mer du Nord, la concurrence toujours possible des entreprises allemandes, danoises, néerlandaises ou britanniques n'est pas à négliger.
L'éolien offshore a par ailleurs permis à la filière de créer 4 859 emplois en 2021, dont près d'un tiers en Normandie, passant de 1 732 équivalents temps plein (ETP) à 6 591 (+ 36 %). Outre les entreprises chargées des chantiers, comme Bouygues, Eiffage ou Deme, les prestataires et fournisseurs, comme GE Renewable Energy (LM Wind Power), à Cherbourg, et Siemens Gamesa Renewable Energy (SGRE), au Havre, assurent une grande part des recrutements.
Encore des difficultés à surmonter
En marge des parcs eux-mêmes, l'activité éolienne génère aussi d'autres chantiers, dans les ports notamment : pour installer des bases de maintenance, comme à la Turballe (Saint-Nazaire) ou à Fécamp, ou pour développer de la logistique industrielle, polder digue et quais, comme au Havre, à Brest et à Port-la-Nouvelle. Autant d'emplois et de revenus supplémentaires. Autre source de création de richesse potentielle et à venir : l'éolien flottant, avec la construction de trois fermes pilotes, en Méditerranée et en Bretagne, et le lancement d'un appel d'offres en Bretagne-Sud.
Les premiers tours de turbine de l'hydrolien
Encore débutant, en France, l'hydrolien affiche des résultats bien plus modestes que l'éolien offshore : 3,9 millions d'euros investis, 7,1 millions de chiffre d'affaires, 143 emplois… Mais cette technologie attire les entreprises et des projets pilotes existent. Deux d'entre eux sont développés au raz Blanchard (Normandie), entre le cap de la Hague et l'île anglo-normande d'Aurigny, pour 12 et 17,5 MW. Un autre a été lancé au large de l'île d'Ouessant et un encore dans le golfe du Morbihan. Les compétences sont également disponibles chez des prestataires et sous-traitants, comme Hydroquest, Sabella, Normandie Hydroliennes, CDK Technologies, Efinorou Schneider Electric.
Ce dynamisme n'est cependant pas exempt de tensions : plus d'un tiers des entreprises déclarent faire face à des difficultés de recrutement de soudeurs, de chaudronniers, d'électriciens, de tuyauteurs, de techniciens de maintenance, notamment, mais aussi d'ingénieurs. D'où l'ouverture de plusieurs centres de formation, à l'automne dernier : au Havre, pour les opérateurs usines, à l'initiative de l'UIMM, de l'Afpa et de Siemens Gamesa ; à Saint-Nazaire, pour les monteurs-mécaniciens sous l'égide de l'UIMM et de GE Renewable Energy ; à Fécamp, Loudéac, Saint-Nazaire et Nîmes, pour les techniciens de maintenance.
Des perspectives plus claires
Ce volontarisme s'appuie, notamment, sur les perspectives ouvertes par le « pacte de l'éolien en mer », signé par la filière avec l'État, en mars dernier. Par cet accord, les pouvoirs publics confirment leur objectif de totaliser 40 GW installés en 2050, via un rythme annuel d'attribution minimale de 2 GW, planifié dans la prochaine PPE, et de réduire la durée des procédures administratives. Le secteur, pour sa part, s'engage à créer 20 000 emplois sur le territoire français d'ici à 2035 et à faire en sorte que la moitié des coûts des projets profite au tissu local. Une démarche confirmée par la signature d'une charte d'engagement par cinq clusters et groupements d'entreprises : Aquitaine Blue Energies, Bretagne Ocean Power, Neopolia, Normandie Maritime et Wind'Occ.
Pour atteindre ces objectifs, l'État devra traduire ses promesses en actes, en favorisant une planification simplifiée et plus ambitieuse, souligne Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président du Cluster maritime français, en préambule du rapport de l'Observatoire des énergies de la mer. Mais il devra aussi garantir « des prix et des cahiers des charges permettant un plus fort contenu local dans les projets. » Autrement dit, ne plus faire des coûts le critère dominant des appels d'offres. Surtout au moment où, selon la dernière étude du réseau REN21, « les prix des turbines ont atteint des niveaux jamais vus depuis 2015 ». En Europe, 3,3 GW d'éolien offshore ont été installés en 2021, majoritairement dans les eaux britanniques.
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