Par une décision rendue ce vendredi 24 novembre, le Conseil d'État condamne de nouveau l'État à payer une somme de 10 millions d'euros (M€) en raison d'une pollution de l'air persistante à Paris et Lyon sur la période courant de juillet 2022 à juillet 2023. Mais la situation s'améliore et le ministère de la Transition écologique tient à le faire savoir, même si des interrogations subsistent sur la mise en place des zones à faibles émissions, nécessaires pour poursuivre l'amélioration.
Par sa décision du 12 juillet 2017, la Haute juridiction avait enjoint à l'État d'adopter des plans permettant de ramener les concentrations en dioxyde d'azote (NO2) et en particules fines (PM10) en dessous des seuils réglementaires dans treize zones urbaines. En juillet 2020, elle avait prononcé une astreinte de 10 M€ par semestre de retard, à défaut pour le Gouvernement d'avoir exécuté ces mesures dans huit agglomérations françaises. Ce dernier n'étant pas parvenu à se mettre en conformité dans le délai fixé pour cinq zones, le Conseil d'État avait ordonné, en août 2021, le paiement de cette somme pour le premier semestre de retard, soit de janvier à juillet 2021. En octobre 2022, il avait de nouveau ordonné un paiement, de 20 M€ cette fois, correspondant au dépassement des seuils limites de pollution au NO2 dans quatre zones sur la période de juillet 2021 à juillet 2022.
Paris à la traîne
Avec cette nouvelle décision, le Conseil d'État a constaté qu'il n'y avait plus de dépassement du seuil de pollution pour les PM10 dans aucune zone urbaine et considère donc la décision du 12 juillet 2017 comme étant exécutée.
Concernant le NO2, il constate que les seuils sont désormais respectés dans les zones urbaines de Toulouse et Aix-Marseille, visées par sa décision précédente, même si la situation demeure fragile dans cette dernière. En revanche, les seuils restent dépassés de manière significative dans les zones de Lyon et Paris.
Compte tenu de la persistance de la pollution dans ces deux zones, mais aussi des améliorations constatées ailleurs, le Conseil d'État condamne l'État au paiement de deux astreintes minorées de moitié (5 M€) pour les deux semestres concernés. Ces astreintes sont de nouveau réparties entre Les Amis de la Terre (10 000 €), association à l'origine du contentieux, l'Ademe (3,3 M€), le Cerema (2,5 M€), l'Anses (2 M€) et l'Ineris (1 M€), Airparif et Atmo Auvergne-Rhône-Alpes (450 000 € chacune), Atmo Sud et Atmo Occitanie (145 000 € chacune). Le Conseil d'État réexaminera en 2024 les actions menées par l'État sur la période juillet 2023-janvier 2024.
Interrogation posée par la contestation des ZFE
« Pour la première fois depuis le début de ce contentieux, le Conseil d'Etat n'a pas condamné l'État au montant maximal d'astreinte qu'il avait fixé, tenant ainsi compte de l'amélioration de la qualité de l'air : absence de dépassement pour les particules fines, retour sous les valeurs limites dans plusieurs zones, diminution de la durée et de l'ampleur du dépassement des valeurs limites et diminution du nombre de personnes exposées à des dépassements pour les agglomérations au-dessus des valeurs limites (notamment pour les agglomérations parisienne et lyonnaise) », positive le ministère de la Transition écologique dans un communiqué.
Celui-ci met en avant les politiques engagées pour poursuivre l'amélioration de la qualité de l'air : adoption d'un nouveau plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prepa) en 2022, décliné au niveau local par les PPA ; soutien au déploiement de zones à faibles émissions (ZFE) par les collectivités ; aides au verdissement des véhicules et aux mobilités alternatives ; plan contre les émissions de particules fines liées au chauffage au bois domestique.
« Il est (…) possible que ce contentieux et sa médiatisation aient contribué à ce que l'Etat agisse plus fermement. Reste que certaines mesures prises - comme la création de ZFE - sont aujourd'hui contestées et pourraient donc à l'avenir être remises en cause », pointe l'avocat Arnaud Gossement dans un commentaire (1) de cette décision.