Les États membres sont finalement parvenus à un accord sur la réforme du marché de l'électricité. La France a obtenu que le nucléaire existant puisse bénéficier des contrats pour différence. Les discussions vont désormais s'ouvrir avec le Parlement.
Après d'âpres discussions, le Conseil de l'UE est finalement parvenu à un accord sur une proposition de réforme du marché de l'électricité. « Je salue cet accord qui, en un mot, protège les consommateurs, pose les jalons d'un investissement massif dans les renouvelables et assure la préservation de l'atout que constitue le nucléaire français », s'est réjouie Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique, se félicitant que le cadre validé respecte la souveraineté des États quant à la définition de leur mix énergétique.
Le texte arrêté par les États membres doit désormais être négocié avec le Parlement européen, dont la position diffère sur certains points, avant son adoption finale par les deux institutions, si possible d'ici à la fin de l'année.
Pour rappel, la Commission européenne a proposé, en mars dernier, cette réforme afin de mettre en place des mesures pérennes afin d'éviter qu'une nouvelle crise entraîne une forte volatilité des prix, de décorréler le prix de l'électricité du prix des énergies fossiles et de mieux protéger les consommateurs. L'objectif de ce texte est également d'encourager et d'accélérer les investissements dans les énergies renouvelables et/ou décarbonées.
Des aides pour le nucléaire et des dérogations pour les centrales thermiques
Le premier volet de ce texte vise donc à décorréler les prix de l'électricité des prix des énergies fossiles. Cela passe par le développement des marchés d'électricité à long terme, en s'appuyant sur les contrats d'achat direct entre consommateurs et producteurs (PPA) et les contrats pour différence (CFD). L'objectif de la réforme est de lever les obstacles à ces accords. Les États membres pourront notamment mettre en place des systèmes de garantie ou valider des garanties privées, ou encore faciliter les mécanismes permettant de mutualiser la demande pour conclure des PPA.
Je salue cet accord qui protège les consommateurs, pose les jalons d'un investissement massif dans les renouvelables et assure la préservation de l'atout que constitue le nucléaire français
Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique
Les contrats pour différence (CFD) deviendront, d'ici trois ans, le modèle obligatoire de soutien public. Ils donnent la possibilité aux pouvoirs publics de soutenir les investissements dans les moyens de production en s'engageant sur des contrats à long terme autour d'un prix de référence. Lorsque les prix de marché sont bas, l'État complète ce prix et, à l'inverse, les producteurs reversent une partie du trop-perçu lorsque les prix s'envolent sur le marché, comme le font les producteurs de renouvelables français bénéficiant du
complément de rémunération. Les recettes pourront être redistribuées aux clients finaux, pour financer les coûts du régime de soutien ou de nouveaux investissements.
L'accord prévoit que ces contrats pour différence s'appliquent aux investissements dans les nouvelles installations éoliennes, solaires, géothermiques, hydroélectriques (hors station de transfert d'énergie par pompage) et nucléaire, mais aussi sur la prolongation des installations existantes. C'est sur ce dernier point notamment que les États membres ont bataillé, une partie (notamment l'Allemagne et l'Espagne) s'opposant à l'ouverture de ces dispositifs au nucléaire.
L'accord prévoit également de supprimer le caractère temporaire de la mise en place de mécanismes de capacité et d'en simplifier la procédure. Ces dispositifs seront étendus aux solutions de flexibilité, comme l'effacement et le stockage, et leur accès devra être facilité pour les énergies renouvelables. La Commission devra faire rapidement des propositions en ce sens. Pour rappel, ces mécanismes permettent de rémunérer les moyens de production disponibles, afin de garantir la sécurité d'approvisionnement. Par ailleurs, l'accord prévoit finalement que les limites d'émissions de CO2 pour participer à ces mécanismes pourront être levées, dans des conditions strictes et à titre dérogatoire, jusqu'au 31 décembre 2028. Il s'agissait d'une demande des pays de l'Est, notamment de la Pologne, et du deuxième point de crispation lors des discussions.
Protection des consommateurs : des mesures en cas de crise
Pour protéger les consommateurs, la Commission mise sur une diversité de contrats de fourniture : prix fixes à durée déterminée, prix dynamiques… Le Conseil a validé la mise en place de règles plus strictes pour les fournisseurs afin de protéger les clients des variations des prix sur les marchés de gros. Les États membres ont également validé le principe de fournisseur de dernier recours pour protéger les plus vulnérables des risques de coupure.
De manière temporaire, des prix réglementés pourront être mis en place pour protéger les petites et moyennes entreprises de l'envolée des prix en temps de crise à l'échelle régionale ou européenne. Par ailleurs, jusqu'à la mi-2024, en cas de crise, les États membres pourront plafonner les revenus excessifs provenant de l'électricité produite à partir de moyens de production à coûts marginaux inférieurs, comme les renouvelables, le nucléaire et le lignite.
Directive ENR : la France gagne son bras de fer en faveur du nucléaire (article paru le 19/06/2023) Dans le cadre de l'adoption de la directive RED III, la France a une nouvelle fois réussi à intégrer son mix électrique nucléaire dans les objectifs d'hydrogène assignés à l'industrie. Le secteur de l'ammoniac pourra utiliser de l'hydrogène nucléaire. Lire la news
Marché de l'électricité : la commission industrie du Parlement européen arrête sa position (article paru le 20/07/2023) Contrats à long terme pour les énergies renouvelables, flexibilité, mesures de protection des consommateurs… Les députés de la commission industrie ont amendé la proposition de réforme du marché de l'électricité de la Commission européenne. Lire la news
Marché de l'électricité : les propositions de la Commission européenne (article paru le 15/03/2023) La Commission européenne a présenté ses propositions pour réformer le marché de l'électricité. Elles visent à protéger les consommateurs de l'envolée des prix et à soutenir les investissements dans les énergies renouvelables et la flexibilité. Lire la news
Énergie : quand la sémantique française glisse progressivement de « renouvelable » à « bas carbone » (article paru le 09/02/2023) Les notions de gaz bas carbone, et plus globalement d'énergies bas carbone, ont fait leur apparition dans le projet de loi relatif à l'accélération des énergies renouvelables, adopté définitivement... Lire la news
Éolien : les PPA, un marché en plein essor (article paru le 10/10/2023) L'instabilité des marchés de l'énergie a suscité un nouvel engouement pour les PPA. Mais face à la diversification de la demande, l'offre peine à suivre. La sécurisation des projets est également primordiale pour faire baisser les prix. Lire la news
PPA : un premier contrat couvert par le fonds de garantie de Bpifrance (article paru le 11/10/2023) Arkolia Énergies et le groupe agroalimentaire Bonduelle ont signé, pour vingt ans à partir de 2024, un contrat d'approvisionnement en électricité de long terme (PPA). Il porte sur une centrale photovoltaïque au sol de 10 mégawatts (MW) située en G... Lire la news
Énergies renouvelables : leur contribution au budget de l'État recule (article paru le 19/07/2023) Malgré un retour à la baisse des prix de marché, les énergies renouvelables continueront de reverser le trop-perçu de leurs aides publiques à l'État en 2023. La Commission de régulation de l'énergie chiffre le tout à 13,7 milliards d'euros. Lire la news
Flexibilité réseau : le marché français dépasse 5 GW (article paru le 30/03/2021) En 2020, les capacités certifiées ont dépassé 5 GW, estime Delta-EE. L'essentiel provient du secteur industriel. Le mécanisme de capacité et l'appel d'offre totalisent 3 GW, mais les objectifs de la PPE seront difficiles à atteindre. Lire la news
Effacement électrique : trouver de nouveaux gisements pour soulager le réseau (article paru le 04/10/2022) Plus que jamais, réduire les consommations aux heures de pointe est nécessaire pour assurer la sécurité électrique en hiver. De nombreux acteurs s'organisent pour exploiter de nouveaux gisements, dans le résidentiel, le tertiaire ou l'industrie. Lire la news
Mécanisme de capacité : règles pour les nouvelles installations et les capacités transfrontalières (article paru le 11/12/2019) Deux arrêtés du 5 décembre viennent modifier et compléter le cadre réglementaire relatif au mécanisme de capacité, approuvé en décembre 2018.
Le premier arrêté porte sur la participation des capac... Lire la newsArticle publié le 18 octobre 2023