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Objectif ZAN : l'Assemblée adopte la proposition de loi avec une majorité confortable

La lutte contre l'artificialisation des sols, sujet de tensions multiples, est-elle désormais plus consensuelle ? Le Palais Bourbon a en tout cas adopté la proposition de loi relative à sa mise en œuvre. Reste à trouver un terrain d'entente avec le Sénat.

Aménagement  |    |  L. Radisson
Objectif ZAN : l'Assemblée adopte la proposition de loi avec une majorité confortable

« Sans rien renier de nos ambitions climatiques, nous permettons aux maires d'agir. La transition écologique est un défi qui mérite bien que l'on dépasse les clivages, au service des Françaises et des Français », s'est félicité le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, mardi 27 juin au soir.

L'Assemblée nationale a en effet adopté en première lecture, par 437 voix pour, 94 abstentions et 4 voix contre, la proposition de loi (1) sénatoriale visant à faciliter la mise en œuvre de l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN). Un objectif inscrit, à l'horizon 2050, dans le corpus législatif français depuis la loi Climat et résilience d'août 2021, en même temps que l'objectif intermédiaire de diviser par deux la consommation d'espaces naturels et agricoles d'ici à 2031.

Mais de la facilitation au détricotage, la frontière est mince et le Sénat l'avait franchie en adoptant, le 16 mars dernier, une version du texte qui remettait en cause plusieurs lignes rouges qu'avait tracées le ministre. Après le vote de l'Assemblée, ce dernier se félicite d'un « texte de compromis écrit avec les territoires, dans le respect du travail des sénateurs et de la loi Climat et résilience ». Toutes les critiques ne sont pas éteintes pour autant, tant du côté de ceux qui dénoncent des assouplissements que de ceux qui trouvent le dispositif encore trop rigide.

« Le ZAN en discussion à l'Assemblée nationale montre que son application arithmétique conduit à une crise des territoires et de la dynamique de l'activité économique et démographique. C'est le contenu de l'usage du sol qui l'artificialise et non sa surface ou son affectation : il y a des usages agricoles qui artificialisent et des usages urbains qui font la place à la biodiversité et à la résilience climatique », critiquait encore l'Union des aménageurs (Unam) à l'issue des débats en commission, le 15 juin.

Marges d'amélioration

En clôture de la discussion générale, Christophe Béchu a reconnu qu'il restait des marges d'amélioration. Et de citer parmi celles possibles, après les interpellations des orateurs des différents groupes politiques : le soutien et l'ingénierie des communes rurales, une fiscalité pénalisant l'artificialisation de nouvelles terres, un plan friches à la hauteur de la priorité donnée à la dépollution, ainsi qu'une « vision de l'aménagement du territoire qui aille au-delà de l'échéance de 2031 ».

“ C'est un texte de compromis écrit avec les territoires, dans le respect du travail des sénateurs et de la loi Climat et résilience. ” Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique
« Pouvons-nous sérieusement penser que 750 millions d'euros suffiront à régler la question des 100 000 hectares que représentent les 8 300 friches industrielles de notre pays, monsieur le ministre ? Avec 27 000 euros par friche, le compte n'y est pas », avait lancé le député Sébastien Jumel (GDR – Nupes) lors de l'explication de vote.

« La lutte contre l'artificialisation des sols va profondément bouleverser la fiscalité locale, avait également alerté Paul Molac (Liot). « La dotation globale de fonctionnement (DGF) versée aux collectivités est corrélée de manière directe à la croissance et au développement d'une collectivité. Plus elle a d'infrastructures, de voiries et de services, plus sa DGF est élevée. De la même manière, plus une commune dispose de bâti, plus elle perçoit de taxe foncière. Quelle refonte de la fiscalité pourrons-nous mettre en place pour pallier les pertes attendues de ces ressources ? » avait interrogé le député.

Sraddet non prescriptifs

À l'occasion d'une conférence de presse, le 21 juin, Christophe Béchu avait estimé que la réforme reposait sur quatre « murs porteurs », dont les dispositions figurent à la fois dans la proposition de loi et dans les deux projets de décrets actuellement soumis à la consultation du public.

Le premier des piliers de la réforme, porté par l'un des décrets, concerne le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet), dont l'exécutif a accepté, sous la pression de l'Association des maires de France (AMF), qu'il ne soit pas prescriptif. Il existera seulement un rapport de prise en compte par les documents d'urbanisme. « Ça n'empêche pas, à la fin, le respect des trajectoires ; ça rendra simplement les Régions un peu plus libres du fait de savoir jusqu'où elles voudront aller dans les coordinations et dans les trajectoires », estime le ministre. La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) y voit, quant à elle, un vrai recul.  « La simple "prise en compte" des objectifs régionaux du ZAN dans les documents d'urbanisme des collectivités locales constitue ainsi un recul important, alors qu'un rapport de compatibilité stricte permettrait un réel impact », estime l'association de protection de la nature.

Le deuxième pilier est constitué, selon le ministre, du projet de décret sur la nomenclature des espaces artificialisés et non artificialisés. « Nous réintégrons les parcs et jardins publics dans les espaces non artificialisés », explique Christophe Béchu, revenant ainsi sur l'une des principales critiques des décrets actuels, qui avait justifié le moratoire décidé durant l'été 2022. « Il existe un gros point noir dans cette nomenclature : les surfaces exploitées par des activités extractives sont considérées comme non artificialisées », pointe toutefois Maxime Paquin, chef de projet biodiversité et territoires chez France Nature Environnement (FNE). De même, ajoute-t-il, les seuils de surface qui font qu'une parcelle est considérée, ou non, comme artificialisée sont trop hauts. « Les espaces pauvres en biodiversité telles que les pelouses urbaines ou les terrains de sports seront bien comptabilisés parmi les surfaces artificialisées », salue en revanche la LPO.

Un hectare par commune

Le troisième fondement de la réforme, selon le ministre, est la garantie rurale, qui doit permettre de préserver une capacité de développement pour chaque commune. Nous nous sommes ralliés à la position du Sénat qui proposait un hectare par commune, a expliqué le ministre, pourtant plus favorable à une proportion (1 % du territoire). Cette garantie « ne sera pas conditionnée à une impossibilité de densifier », déplore cependant la LPO. « Nous avons des craintes sur cette surface minimale, qui pourrait pousser à la consommation et pour laquelle il y aurait des possibilités de mutualisation », pointe aussi Maxime Paquin de FNE.

Le dernier pilier de la réforme pour Christophe Béchu est celui des grands projets d'envergure nationale (GPEN) et des projets industriels verts (PIV) dont l'artificialisation va être comptée dans une enveloppe nationale à laquelle est affectée 15 000 hectares, qui seront répartis entre les régions couvertes par un Sraddet selon un coefficient de péréquation. Ce qui laisse 110 000 hectares à répartir entre les collectivités territoriales, sur les 125 000 hectares de droits à artificialiser prévus par le dispositif de la loi Climat et résilience sur la période 2021 à 2031. Si la LPO salue le maintien de cette limite maximale, elle reste sceptique sur la prise en compte de l'artificialisation des grands projets. « Les projets industriels considérés comme "verts" seront (…) exclus du décompte, tandis que les zones de montagne et du littoral, déjà parmi les plus artificialisées en France, pourront bénéficier de régimes dérogatoires au nom du développement touristique », assure l'association.

« On ne peut pas imposer des restrictions importantes à nos communes tout en laissant faire les extensions d'aéroports, les projets autoroutiers, les plateformes logistiques XXL, les fermes-usines, les LGV – lignes à grande vitesse –, et j'en passe. C'est pourtant ce que vous faites en défendant vos projets d'intérêt national, derrière lesquels se cachent bien souvent de grands projets inutiles et imposés », a également critiqué la députée écologiste Marie Pochon durant l'explication de vote.

« Les différentes régions n'ont pas la même réglementation, c'est difficilement compréhensible », pointe par ailleurs Maxime Paquin, de FNE. Celles qui ne sont pas couvertes par un Sraddet, explique ce dernier, soit l'Île-de-France, la Corse et les outre-mer, ne sont pas concernées par l'objectif à 2031 de la loi Climat et résilience, ne se voient pas appliquer le coefficient de péréquation du forfait national de 15 000 hectares, voire n'auront aucune contrainte si les objectifs de réduction ne sont pas inscrits dans les Sraddet avec une valeur contraignante.

La majorité confortable obtenue sur la proposition de loi à l'Assemblée est donc loin de démobiliser les parties prenantes, qui resteront très attentives à l'examen du texte en commission mixte paritaire prévue le 6 juillet, tout comme à la rédaction finale des décrets d'application.

1. Télécharger la proposition de loi telle qu'adoptée par l'Assemblée nationale
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42084-zan-proposition-loi-assemblee-nationale.pdf

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