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PFAS : les propositions d'un député au Gouvernement pour « faire machine arrière »

Chargé par le Gouvernement de compléter le diagnostic sur les PFAS, le député Cyrille Isaac-Sibille propose de différencier les actions selon leurs usages, prioritaires ou non, mais aussi selon l'échelon, européen et national.

Eau  |    |  D. Laperche
PFAS : les propositions d'un député au Gouvernement pour « faire machine arrière »

« Mon rapport (1) est un rapport positif, car il est possible de faire machine arrière, a assuré Cyrille Isaac-Sibille, député Modem chargé par le Gouvernement d'une mission temporaire sur les composés per-et polyfluoroalkylés (PFAS) (2) , à l'occasion de sa présentation devant les commissions du développement durable et des affaires sociales de l'Assemblée nationale, mardi 6 février. Nous devons agir avec l'Europe concernant la recherche sur la toxicité et les normes, la restriction ou l'interdiction en fonction des usages. Nous pouvons agir au niveau national concernant l'arrêt des rejets et le traitement des pollutions historiques. »

À la suite de la mise en lumière médiatique de la contamination aux PFAS de la Vallée de la chimie, Élisabeth Borne, alors Première ministre, a confié, en juillet 2023, au député le soin de compléter le diagnostic sur les usages et l'imprégnation dans les différents milieux. Remis début 2024, son rapport affine l'état des lieux et montre à quel point les PFAS ont diffusé dans notre quotidien et notre économie.

Une production européenne de 250 000 tonnes par an

Même s'il est difficile de dresser une liste exhaustive, ces substances seraient présentes aussi bien dans le secteur du textile (pour la maison, les vêtements ou encore des applications professionnelles), de la santé (dispositifs médicaux et médicaments), des transports (par exemple les carrosseries, le système de freinage), des matériaux et emballages en contact avec des denrées alimentaires (poêles et moules antiadhésifs, emballages alimentaires, etc.), des nettoyants (décapants pour sols, produits de nettoyage à sec, aide au rinçage des lave-vaisselle, liquides pour essuie-glace…), du fartage des skis, de l'électronique et des semi-conducteurs, des cosmétiques (soin de la peau, capillaires, parfum, etc.) des mousses anti-incendies, des produits phytosanitaires, mais également du secteur de la transition énergétique avec, par exemple, les gaz fluorés utilisés dans les pompes à chaleur, les batteries au Li-ion, les piles à combustibles ou les panneaux solaires.

Sur le plan européen, une valeur médiane de 250 000 tonnes serait avancée pour la production de PFAS par an. Leur suivi le long de la chaîne jusqu'au consommateur n'est pas évident. D'une part, « de nombreuses entreprises ignoraient qu'elles utilisaient des PFAS, ce dont elles prennent progressivement conscience au fil du temps, souligne le rapport de la mission. D'autre part, lors de la consultation conduite par l'Echa [Agence européenne des produits chimiques], des usages apparemment non mentionnés par le dossier initial ont été rapportés. »  Il n'existerait en effet pas de mécanisme qui obligeraient les fournisseurs à mentionner l'utilisation de PFAS.

De multiples voies de contamination de l'environnement

La diffusion de ces molécules dans l'environnement se fait par les rejets des industriels, les stations d'épuration, lors de l'utilisation de produits ou l'élimination de déchets qui en contiennent.  « Les déchets de consommation courante contenant des PFAS sont incinérés à des températures peu élevées, qui ne permettent pas nécessairement l'élimination des PFAS, qui se retrouvent ainsi dans les rejets des usines d'incinération », précise la mission.

“ Interdire les rejets de PFAS dans l'environnement est l'une des priorités de ces prochains mois ” Cyrille Isaac-Sibille, député
Des campagnes d'analyses, dont notamment le programme Esteban, ont estimé l'imprégnation de la population : les contributeurs les plus importants, le PFOA et le PFOS, ont été quantifiés à 100 % aussi bien chez les enfants que chez les adultes testés. « La contamination se fait principalement par l'eau et les aliments et, a priori, plus sur ces derniers et même davantage sur les protéines comme les œufs, les poissons », a noté Cyrille Isaac-Sibille.

Stopper les rejets des industriels dans les milieux aquatiques

Concernant les rejets industriels et des stations d'épuration urbaines, le plan d'action du ministère de la transition écologique prévoit que l'Anses détermine « pour les principaux PFAS » les valeurs maximales de concentrations à respecter dans les milieux. En outre, en juin dernier, un arrêté imposait à 5 000 exploitants d'ICPE de rechercher dans leurs rejets ces PFAS. Les résultats devraient être connus d'ici au mois de juillet, selon le député. Ce dernier appelle le Gouvernement à aller plus loin et à interdire les rejets dans l'environnement avec des échéances à trois, six et neuf mois. « Interdire les rejets de PFAS dans l'environnement est l'une des priorités de ces prochains mois », a recommandé le député.

À propose de l'interdiction de l'utilisation des PFAS, Cyrille Isaac-Sibille préconise une approche par utilisations. « Il est impossible d'interdire tous les PFAS, notamment par rapport à certains usages dans le domaine de la santé ou l'énergie, a-t-il argumenté. Pour d'autres, nous pourrions progresser plus rapidement : par exemple les pompiers n'utilisent plus de PFAS à chaînes longues et limitent ceux à chaînes courtes de façon temporaire pour éteindre les feux, mais plus pour les exercices. »

Soutenir la proposition de restriction européenne

Le député compte néanmoins sur l'échelon européen pour assurer la sortie des PFAS. Certaines limitations sont sur les rails, comme pour les mousses anti-incendies ou les emballages en contact avec des denrées alimentaires. Sur le plan national, une proposition de loi restreignant les usages du plastique veut ainsi interdire l'ajout de PFAS dans différents produits, dont les emballages alimentaires. Une proposition similaire a également été introduite dans le cadre du règlement européen Emballage en discussion.

Mais la proposition qui suscite beaucoup d'attentes est celle portée par cinq États membres (Allemagne, Pays-Bas, Norvège, Suède et Danemark) de restriction européenne sur les PFAS, avec des dérogations possibles en fonction des usages. Cyrille Isaac-Sibille appelle le Gouvernement à soutenir cette initiative. « Au niveau européen, tout le monde a pris conscience du sujet. Cela va avancer, mais cela va prendre du temps, a-t-il toutefois modéré. Faut-il attendre deux ans que l'Echa ait rendu ses décisions, je pense que non. Il faudrait qu'elle puisse donner des résultats intermédiaires pour que nous avancions plus rapidement par rapport à certains usages. »

Pour plusieurs députés présents lors de l'audition, les échéances européennes sont effectivement trop lointaines. Ils appellent à ce que la France prenne des actions anticipées. « Agir au niveau européen est indispensable, mais pas suffisant : deux exemples, le TFA mesuré à des taux considérables dans le Gard n'est pas inclus dans la directive européenne sur la qualité des eaux. La restriction Reach de la famille des PFAS aboutira au mieux en 2028, alors qu'il existe des alternatives aux PFAS dans les emballages alimentaires ou le textile par exemple, a développé Nicolas Thierry, député écologiste de Bordeaux. Il faut traduire l'urgence que vous décrivez en politique publique. »

Améliorer la connaissance

Dans son rapport, Cyrille Isaac-Sibille invite à améliorer la connaissance sur la diffusion des PFAS, mais également sur leur toxicité avec une exposition chronique. « Nous savons que, dès la naissance, nous en ingurgitons, mais la question c'est : à quelle dose et au bout de combien de temps, cela devient nocif ? », interpelle le député. Il recommande d'anticiper les publications scientifiques qui devraient conduire à un abaissement des valeurs toxicologiques de référence (VTR).

« Il va y avoir, jour après jour, semaine après semaine, des révélations de contaminations aux PFAS. Il faut que nous ayons une stratégie, notamment par rapport à l'eau potable », a également souligné le député. À l'échelle européenne, le coût total du traitement de l'eau potable et des eaux usées pour éliminer les PFAS a été estimé à 238 milliards d'euros par an.

Le député propose, entre autres, de mettre en application le principe du pollueur payeur. « À la question, comment fait-on contribuer le pollueur, je n'ai pas la réponse », a toutefois reconnu Cyrille Isaac-Sibille. Autre proposition : créer un Fonds PFAS pour financer les études et les analyses, mais également pour aider les collectivités à financer des solutions de dépollution des eaux destinées à la consommation humaine.

Reste à voir comment ces propositions seront entendues et traduites en mesures concrètes par le Gouvernement.

1. Télécharger le rapport Per-et polyfluoroalkylés (Pfas), pollution et dépendance : comment faire marche arrière
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-43441-rapport-cyrille-isaac-sibille-pfas-mission.pdf
2. Lire PFAS : une pollution qui redevient visible<br /><br />
https://www.actu-environnement.com/dossier-actu/PFAS-eau-industries-villes-reach-polluants-eternels-mousses-anti-incendie-vallee-chimie-95

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