Alors que la Cour des comptes a pointé le 25 juillet la cherté des tarifs d'achat français de l'électricité photovoltaïque, Thierry Mueth, président d'Enerplan, syndicat des professionnels du solaire, a mis en cause l'impact d'une mauvaise gestion de l'Etat sur ces coûts, dans une interview accordée à l'hebdomadaire Le Point (1) parue le 29 juillet.
"Le rapport de la Cour des comptes sorti la semaine dernière dit : "Le solaire a coûté cher." Pourquoi ? Parce qu'il a été géré n'importe comment par l'État (le rapport portait sur la période 2005-2011, NDLR), avec des tarifs trop élevés, puis un coup d'arrêt mis au marché. Des hausses puis des baisses de subventions et, pour finir, des destructions d'emplois (15.000 en deux ans). Beaucoup de fabricants de modules en France - qui représentent un tiers de la filière - sont en attente d'un repreneur, d'autres ont disparu", a déclaré Thierry Mueth au Point.
La Cour des comptes a également pointé l'impact d'un "mauvais calibrage" des tarifs d'achat de l'électricité photovoltaïque : "Une mauvaise fixation du tarif de rachat a conduit à une bulle photovoltaïque en 2009 et 2010, coûteuse pour le consommateur, via la CSPE [contribution au service public de l'électricité] et dommageable pour la balance commerciale. Son traitement tardif et vigoureux a désorganisé la filière photovoltaïque et détruit des emplois", a critiqué le premier président de la Cour, Didier Migaud.
Alors que la Cour chiffre "un coût du solaire photovoltaïque situé entre 114 et 547 euros le mégawatt horaire, ce dernier chiffre date de l'été 2006 ! Aujourd'hui, les prix se situent entre 110 et 200 euros (hors équipement pour particuliers, à 250 euros). C'est tout bonnement étonnant", pointe le président d'Enerplan en regrettant que la Cour n'ait pas relevé un coût du solaire "divisé par cinq en cinq ans", selon lui.
"Abandon" du photovoltaïque français ?
Même son de cloche pour le syndicat des installateurs photovoltaïque du résidentiel (SIPR) qui a déploré le 29 juillet "l'abandon de la filière photovoltaïque préconisé par la Cour des comptes", dans un communiqué. Pour David Haiun, président du SIPR, "alors que la Cour des comptes reconnaît l'étendue du retard français par rapport à ses voisins européens en matière de photovoltaïque, elle préconise de tuer le photovoltaïque français, meilleur élève de la transition énergétique".
Si le rapport de la Cour reconnaît "l'éloignement des objectifs 2020 en termes de production d'énergie photovoltaïque", il recommande pourtant "l'abandon du soutien au solaire photovoltaïque intégré au bâti et la révision du niveau de soutien public à cette filière", dénonce le syndicat. "La Cour des comptes s'inquiète du retard français, mais propose de l'aggraver. Elle ne propose aucune piste pour accompagner la transformation de la filière photovoltaïque et sa compétitivité à l'international", fustige-t-il.
Révision tarifaire
Le président d'Enerplan doit rencontrer fin août le ministre en charge de l'Energie Philippe Martin. "Il faut redonner une place et de la visibilité au secteur des énergies renouvelables. J'attends de lui une vision sur trois ans, sans changement des règles, avec des révisions concertées tous les ans sur les tarifs. Si on veut que la France investisse et prenne des risques dans ce marché, il faut ce calendrier", a demandé le président d'Enerplan, dans son interview au Point.
"La solution ne se trouve justement pas dans de nouvelles dispositions mais à l'inverse dans un cadre juridique et tarifaire stable [comme le suggère la Cour] qui permettra aux entreprises du photovoltaïque de mettre en œuvre la transition énergétique", estime le SIPR.