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Restauration de la nature : un compromis qui remet la réglementation européenne sur les rails

Le texte qui fixe des objectifs contraignants pour la restauration de la nature dans l'UE a fait l'objet d'un accord entre le Conseil et le Parlement européen. Son ambition initiale a toutefois été rognée après la fronde d'eurodéputés conservateurs.

Biodiversité  |    |  L. Radisson
Restauration de la nature : un compromis qui remet la réglementation européenne sur les rails

« Un succès collectif important. » C'est par ces mots que César Luena, eurodéputé socialiste et rapporteur du texte, a salué l'accord trouvé, jeudi 9 novembre au soir, entre la présidence du Conseil de l'UE et les représentants du Parlement européen sur la proposition de règlement sur la restauration de la nature. « Jusqu'à présent, nous avions des règles pour protéger les espaces naturels les plus remarquables, mais nous n'en avions pas pour restaurer la nature là où elle est déjà dégradée. C'est maintenant le cas avec cette loi inédite », se félicite Pascal Canfin, président de le commission environnement du Parlement européen.

L'obtention d'un accord sur ce texte est en effet une bonne nouvelle pour ceux qui le portent tant il a été contesté par les eurodéputés de droite et d'extrême droite. « La nouvelle législation aidera l'UE et ses États membres à atteindre les objectifs qu'ils se sont engagés à respecter au titre du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, lors de la COP 15 sur la biodiversité, en décembre 2022 », salue également la Commission européenne.

Mais le compromis trouvé s'est fait au prix d'une révision à la baisse de l'ambition affichée par cette dernière lorsqu'elle a présenté sa proposition en juin 2022. « Même si cet accord est plus ambitieux que la faible position du Parlement, il est encore loin de ce que la science nous dit qu'il est nécessaire de faire face aux urgences liées au climat et à la biodiversité. Pourtant, compte tenu de l'opposition farouche à la loi, nous sommes soulagés qu'un accord ait été trouvé. Sans cela, la crédibilité internationale de l'UE en aurait gravement souffert », réagit ainsi Sabien Leemans du WWF.

Objectifs juridiquement contraignants

« La proposition vise à mettre en place des mesures visant à restaurer au moins 20 % des zones terrestres et maritimes de l'UE d'ici à 2030, ainsi que tous les écosystèmes nécessitant une restauration d'ici à 2050. Elle fixe des objectifs et des obligations spécifiques et juridiquement contraignants pour la restauration de la nature dans chacun des écosystèmes répertoriés, des terres agricoles et des forêts aux écosystèmes marins, d'eau douce et urbains », résume le Conseil.

“ Nous avons organisé la restauration de la nature pour les prochaines décennies et avons créé pour la première fois en Europe une gouvernance de la restauration de la nature ” Pascal Canfin, eurodéputé
Pour atteindre les objectifs généraux, les États membres seront tenus de restaurer au moins 30 % des types d'habitats visés par le règlement, 60 % d'ici à 2040 et 90 % d'ici à 2050. Chacun d'entre eux devra adopter un plan de restauration qui sera évalué par la Commission européenne. « Comme avec la législation climatique européenne, nous avons organisé la restauration de la nature pour les prochaines décennies et avons créé pour la première fois en Europe une gouvernance de la restauration de la nature », se félicite Pascal Canfin.

La priorité des politiques de restauration sera placée sur les sites Natura 2000 jusqu'à 2030. Les États membres devront s'assurer que les zones, une fois restaurées, sont protégées de toutes dégradations. Mais cela ne va pas entraver l'installation de capacités de production d'énergies renouvelables, veut rassurer M. Canfin. En cas de dégradation inévitable, des mesures de compensation sur des types d'habitats équivalents devront être mises en œuvre.

Les terres agricoles également concernées

« Les terres agricoles seront couvertes par la législation », se félicite Pascal Canfin, alors que l'article les visant avait été supprimé par une majorité d'eurodéputés en juillet dernier. Pour restaurer les terres agricoles, les États membres devront obtenir, d'ici à 2030, puis tous les six ans, une évolution positive de deux des trois indicateurs suivants : indice des papillons de prairie, part des terres agricoles présentant des particularités topographiques à haute diversité, stock de carbone organique dans les sols. Ils devront prendre obligatoirement des mesures pour protéger les pollinisateurs. L'accord fixe également des objectifs pour augmenter l'indice des oiseaux communs des milieux agricoles sur le plan national.

Les États membres seront également tenus de mettre en place des mesures de restauration de 30 % des tourbières drainées d'ici à 2030, 40 % d'ici à 2040 et 50 % d'ici à 2050. Une procédure « d'arrêt d'urgence » de la législation en cas de menace sur la souveraineté alimentaire a toutefois été actée dans le compromis trouvé. « La proposition initiale de la Commission était complètement hors sol. L'accord trouvé ce soir permet de remettre la sécurité alimentaire au centre de nos priorités (…). Le gel de 10 % de terres agricoles a été supprimé, les obligations de résultat ont été remplacées par des obligations de moyens », se félicite Anne Sander, eurodéputée PPE.

« Opposer la sécurité alimentaire et la biodiversité n'a pas de sens, estime de son côté Christophe Clergeau, eurodéputé socialiste. « Qui peut croire que les rendements seront les mêmes s'il n'y a plus de pollinisateurs ? Reconstruire la souveraineté alimentaire de l'Union européenne doit être une priorité, mais ce n'est pas en suspendant les mesures de restauration de la nature qu'il faut procéder. C'est en réhabilitant les outils de régulation des marchés agricoles comme les stocks alimentaires », estime l'élu chargé des questions environnementales et agricoles.

Planter 3 milliards d'arbres

Concernant les écosystèmes forestiers, les États devront mettre en place d'ici à 2030 des mesures visant à obtenir une évolution positive de plusieurs indicateurs. « Dans le même temps, trois milliards d'arbres supplémentaires devront être plantés dans l'UE », expliquent les services du Parlement. Concernant les rivières, au moins 25 000 km de linéaires devront être renaturés. Le règlement vise également les écosystèmes urbains avec l'objectif de zéro perte nette de superficie nationale en 2030 par rapport à 2021, puis leur augmentation ensuite.

« Nous avons mis fin à une incohérence en matière de protection des écosystèmes marins. Demain, les États auront l'obligation de s'entendre sur des mesures communes », se félicite par ailleurs le président de la commission environnement du Parlement. Et de citer l'exemple des mesures de protection des dauphins prises par la France dans le golfe de Gascogne qui ne s'appliquent actuellement pas aux pêcheurs espagnols.

Enfin, le règlement prévoit des mesures en termes de financement et de révision. Dans un délai de douze mois après son entrée en vigueur, la Commission devra évaluer les écarts entre les besoins financiers et les financements disponibles, et étudier les solutions pour remédier aux éventuelles insuffisances. En 2033, elle devra examiner et évaluer l'application du règlement, en particulier ses impacts sur les secteurs de l'agriculture, de la pêche et de la foresterie.

Le parcours législatif du texte n'est toutefois pas terminé. L'accord provisoire va être soumis aux représentants des États membres au sein du Conseil (Coreper) et à la commission environnement du Parlement pour approbation. Un passage délicat au sein de cette dernière où une parfaite égalité de voix avait été constatée en juin dernier.

Il devra ensuite être formellement adopté par les deux institutions avant sa publication et son entrée en vigueur. Puis, si le parcours s'est poursuivi sans anicroche, viendra l'étape de sa mise en œuvre par les États membres. « Le fait de savoir si nous respecterons nos engagements internationaux en matière de restauration de la nature et si nous mettrons fin au déclin de la biodiversité dépendra largement du bon vouloir des gouvernements nationaux », souligne à cet égard l'eurodéputée écologiste Caroline Roose.

Réactions1 réaction à cet article

Une avancée certes mais sérieusement revue à la baisse du fait des conservateurs rétrogrades et pour l'instant encore hypothétique. Attendons de voir la suite.
Cet épisode a néanmoins le mérite de démontrer très clairement que les affirmations d'une certaine droite claironnant qu'elle fait de l'écologie aussi bien que les écologistes n'est jamais qu'une n-ième tromperie à la sauce écoblanchiment.
J'ai cependant cru comprendre qu'un nombre croissant de jeunes militants LR, inquiets des effets de plus en plus évidents du changement climatique, peine à se retrouver dans le déni écologique de leur parti. Rien que cela devrait pousser les vieux barons qui tiennent les rênes à se poser les bonnes questions et à modifier en profondeur leur algorithme de réflexion, ne serait-ce que dans l'intérêt de leur propre formation politique...

Pégase | 13 novembre 2023 à 11h27 Signaler un contenu inapproprié

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