En réaction au recul de Donald Trump sur le climat, Emmanuel Macron avait annoncé que la France entendait accélérer pour mettre en œuvre ses engagements dans le cadre de l'Accord de Paris sur le climat, voire aller plus loin. Le ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot a présenté ce jeudi 6 juillet le très attendu Plan climat, censé détailler comment la France comptait s'y prendre.
"Ce plan n'est pas une fin en soi, a prévenu Nicolas Hulot, anticipant les critiques. C'est un programme qui va se structurer au fil du temps du quinquennat. C'est un cadre, une colonne vertébrale à laquelle on pourra greffer d'autres éléments". Ces mesures seront déclinées dans les prochaines programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et stratégie bas carbone, annoncées pour fin 2018.
Réduire et réorienter les consommations énergétiques
Dans les bâtiments - La rénovation énergétique est l'un des premiers chantiers qui sera lancé par le gouvernement. Une feuille de route sera publiée en septembre et traduite dans la loi de Finances. Les objectifs sont clairs : supprimer les sept millions de passoires thermiques grâce à une enveloppe de 4 milliards d'euros. "Un accompagnement sera proposé à tous les propriétaires et occupants en situation de précarité énergétique afin de proposer à chacun une solution de rénovation et de financement adapté", indique le ministère, qui précise que les premiers audits seront menés début 2018 pour un engagement des travaux avant l'hiver 2018-2019. L'Etat accélèrera également le chantier de la rénovation des bâtiments publics.
Nicolas Hulot veut également amplifier le succès de l'autoconsommation individuelle mais aussi collective : "On peut aller beaucoup plus vite, beaucoup plus loin", estime-t-il.
Dans les transports - D'ici la fin du quinquennat, le gouvernement entend faire converger la fiscalité de l'essence et du diesel. Une prime à la transition sera mise en place pour aider les ménages à remplacer les véhicules qui ne sont pas éligibles à la vignette Crit'air (véhicules essence d'avant 1997 et diesel d'avant 2001). Cette mesure devrait être intégrée au bonus-malus. Mais ce n'est qu'un début : Nicolas Hulot a annoncé la fin des ventes des voitures essences et diesel d'ici 2040. Les Assises de la mobilité, qui seront organisées à l'automne, devront permettre "de donner un coup d'accélérateur à la mobilité douce, aux transports en commun" et au report modal dans le fret.
Dans les entreprises - Le gouvernement publiera en 2018 une feuille de route pour l'économie circulaire qui comprendra des mesures sur la fiscalité des déchets, l'écocontribution ou la responsabilité élargie des producteurs. Mais il veut d'ores et déjà donner aux petites entreprises les moyens de faire des économies de matière et d'énergie. "L'Ademe généralisera une offre d'accompagnement gratuit à destination des petites entreprises pour optimiser leurs flux matière-énergie-eau et un dispositif clé en main financé par le partage des gains réalisées pour les plus grandes".
Mettre fin aux fossiles et accélérer sur les ENR
Charbon - Nicolas Hulot veut "cesser, d'ici 2022, la production d'électricité à partir de charbon". L'enjeu social sera appréhendé, a-t-il affirmé, via la mise en place de contrats de transition écologique qui associeront les parties prenantes pour permettre un reclassement optimal des salariés. Ces contrats seront également déployés dans les autres secteurs en transition.
Hydrocarbures - Le ministre de la Transition écologique et solidaire confirme que le gouvernement ne délivrera plus de permis d'exploration et d'exploitation pour le gaz, le pétrole, le charbon et les énergies non conventionnelles. Cela se traduira "par la sortie progressive de la production d'hydrocarbures sur le territoire français à l'horizon 2040" (date qui coïncide avec la fin annoncée des voitures essence et diesel).
ENR - Pour atteindre l'objectif de 32% d'énergies renouvelables en 2030, Nicolas Hulot veut simplifier le cadre réglementaire. "Des mesures seront prises dans le projet de loi relatif à la transformation des relations entre l'administration et le public", précise le ministère. Une augmentation des moyens du Fonds chaleur sera étudiée. Il publiera, dans le cadre des assises de l'outre-mer, une liste des appels d'offres qui seront lancés dans ces territoires dans les prochaines années.
Nucléaire - Avec l'augmentation de la part des énergies renouvelables et la baisse des consommations, la part du nucléaire devra mécaniquement être réduite à 50% d'ici 2025, comme le prévoit la loi relative à la transition énergétique. Nicolas Hulot a indiqué qu'il allait entamer des travaux en vue de planifier la "fermeture de certains réacteurs", se basant sur des critères de sécurité, sociaux mais aussi économiques.
Stocker le carbone et s'adapter
Sols et agriculture - Le gouvernement entend transformer les systèmes agricoles pour réduire les émissions et améliorer le captage du carbone par les sols. "Il y a des marges de progression assez évidentes en matières d'intrants", a souligné Nicolas Hulot. Les Etats généraux de l'alimentation, qui seront lancés en juillet, devraient également plancher sur les pratiques de consommation alimentaire, un plan d'action pour la protection des sols et des mesures pour renforcer la séquestration du carbone dans les sols. Interrogé sur les grands projets d'infrastructure comme Europa city, qui artificialisent des terres agricoles, le ministre a été clair : "Cette gourmandise que nous avons à consommer des terres agricoles est incompatible avec nos objectifs".
Déforestation - Pour éviter de contribuer à la déforestation dans d'autres zones du monde, le gouvernement publiera d'ici mars 2018, une stratégie nationale pour mettre fin à l'importation de produits forestiers ou agricoles contribuant à la déforestation (huile de palme, soja…).
Adaptation - Un nouveau plan d'adaptation au changement climatique (Pnacc) sera publié d'ici la fin de l'année,après une période de consultation.
Fiscalité : envoyer les bons signaux
Prix carbone - Outre la convergence de la fiscalité diesel/essence, le gouvernement entend accélérer la trajectoire d'augmentation du prix carbone, fixée à 100€ la tonne en 2030. Son niveau sera défini dans la prochaine loi des Finances. Son périmètre sera élargi aux hydrofluorocarbures (HFC), utilisés notamment dans la climatisation et la réfrigération. La France poursuivra son engagement dans la coalition mondiale pour un prix carbone qui vise à faire converger ce prix carbone et à couvrir 25% des émissions mondiales en 2020 et 50% en 2030.
Finance verte - Le gouvernement soutiendra les émissions d'obligations vertes par les acteurs publics et les créations de labels pour la finance. Il continuera ses travaux sur la prise en compte du risque climatique par la finance et la communication extra-financière.