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La nouvelle stratégie nationale biodiversité face au défi de sa mise en œuvre

Le Gouvernement a présenté sa feuille de route pour la biodiversité à l'horizon 2030. L'enjeu est celui de la traduction effective de ce document théorique alors que les stratégies précédentes n'ont pas réussi à enrayer l'érosion du vivant.

Biodiversité  |    |  L. Radisson
La nouvelle stratégie nationale biodiversité face au défi de sa mise en œuvre
Actu-Environnement le Mensuel N°438
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°438
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C'est en plein remaniement ministériel que le Gouvernement a présenté, jeudi 20 juillet, la Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) à l'horizon 2030 aux membres du Comité national de la biodiversité (CNB). C'est donc la nouvelle secrétaire d'État à la Biodiversité, Sarah El Haïry, qui va se charger de sa mise en œuvre après avoir occupé précédemment le poste de secrétaire d'État à la Jeunesse dans les gouvernements Castex, puis Borne.

Le premier volet de cette stratégie avait été dévoilé en mars 2022 par sa prédécesseure, Bérangère Abba, dans l'attente de la 15e Conférence des parties à la Convention sur le diversité biologique (COP 15). La stratégie aujourd'hui présentée prend en compte l'Accord de Kunming-Montréal obtenu lors de cette COP et qui fixe un nouveau cadre mondial pour la biodiversité d'ici à 2030.

« Document plus précis »

« Partie intégrante de la planification écologique, notre stratégie nationale biodiversité suit une ambition forte : stopper, puis inverser en une décennie, l'effondrement du vivant », résume la Première ministre, Élisabeth Borne.

À la suite d'un travail interministériel, la structure de la stratégie a été simplifiée. Elle compte désormais 39 mesures, articulées autour de quatre axes (réduire les pressions, restaurer la biodiversité dégradée, mobiliser les acteurs, garantir les moyens d'atteindre ces ambitions), en lieu et place des 72 mesures présentées avec le premier volet. « Chaque mesure fait l'objet d'une fiche-mesure (1) dédiée », vante le ministère de la Transition écologique. Des fiches qui précisent notamment le ministère ou l'opérateur pilote, l'objectif et la description de l'action, les indicateurs de suivi et une trajectoire.

“ On a l'expérience de stratégies nationales qui sont validées et publiées, mais qui sont très rapidement amoindries et enlisées. ” Jean-David Abel, France Nature Environnement
Il faut dire que les indicateurs en matière de biodiversité sont toujours dans le rouge alors que le bilan de la stratégie précédente (2011-2020), réalisé par l'Office français pour la biodiversité (OFB), était peu flatteur : insuffisance dans la mise en cohérence de l'action publique, absence de transformation des politiques sectorielles à l'origine des pressions, absence d'objectifs clairs, de cibles chiffrées et de plans d'action pour les atteindre, portage politique et gouvernance interministérielle faibles, absence de clarté dans la répartition des rôles, absence de dispositif de suivi et d'évaluation.

« Le document est plus costaud, plus systémique, plus précis que les précédentes stratégies, sur les cibles, les mesures, la prise en compte des objectifs de Montréal ou les financements nouveaux », salue Jean-David Abel, de France Nature Environnement (FNE). « Mais la question est celle de la gouvernance : comment est-ce suivi ? Par qui ? Quelles sont les phases de reporting ? Devant le CNB, le Parlement ? C'est Matignon qui pilote ? C'est l'OFB qui est son bras armé ? On n'a pas eu de réponse », regrette le représentant de FNE.

Le Gouvernement prévoit en tout cas de décliner cette stratégie nationale dans les territoires, sous le pilotage des préfets, mais en synergie avec les Régions. Celles-ci ont été désignées cheffes de file biodiversité par la loi de reconquête de la biodiversité de 2016 et sont à l'origine, en lien avec l'OFB, des onze agences régionales de la biodiversité (ARB) existantes.

La réduction des dépenses dommageables dans le flou

En termes de financement, Bérangère Couillard, alors secrétaire d'État à l'Écologie, avait annoncé, le 12 juillet, 1 milliard d'euros (Md€) consacrés à la biodiversité en 2024, en cumulant le Fonds friches, le Plan eau, les crédits du Fonds restauration, auxquels s'ajoute une nouvelle enveloppe de 264 millions d'euros (M€). Une mission d'inspection, dont le rapport a été dévoilé en janvier dernier, pointait l'insuffisance de financement de la politique biodiversité. Une insuffisance sur laquelle avait déjà alerté les treize associations constituant le collectif CAP Nature et biodiversité.

Véronique Andrieux, directrice générale du WWF France, salue aujourd'hui « le réel effort » que représente ces 264 M€ supplémentaires pour 2024, mais elle regrette l'absence de trajectoire financière jusqu'en 2027. Autre regret de la directrice du WWF : la réduction des subventions dommageables qui reste dans le flou. « Ils renvoient à une nouvelle mission sur ce point alors que l'on sait déjà qu'il y a plus de 10 Md€ directs de soutiens publics ou de mesures fiscales qui concourent à dégrader la biodiversité, abonde Jean-David Abel, de FNE. C'est un peu shadokien de continuer, d'un côté, à dégrader, notamment dans le domaine agricole, forestier ou des infrastructures, et, de l'autre, de mettre des fonds pour mieux préserver ou restaurer. Il est temps de mettre en cohérence l'ensemble des politiques publiques. »

« La révision du plan stratégique national, qui décline la politique agricole commune en France, n'est pas mentionnée alors que ce plan représente, toujours selon les inspections, 63 % des subventions dommageables à la biodiversité en France, soit 6,5 Md€ par an », pointe ainsi Véronique Andrieux. « Le travail actuel de Marc Fesneau sur les pesticides va complètement à l'encontre de la stratégie », relève aussi Jean-David Abel.

Après le jugement du 29 juin 2023 du tribunal administratif de Paris, qui reconnaît la responsabilité de l'État dans l'effondrement de la biodiversité du fait de ses manquements en matière de gestion des pesticides, il est d'ailleurs intéressant de se pencher sur la mesure 6 de la SNB, qui vise la réduction des pollutions diffuses d'origine agricole. Cette mesure, dont le ministère pilote est celui de l'Agriculture, prévoit six actions, dont celle de « réduire les utilisations, les risques et les impacts des produits phytopharmaceutiques pour préserver la santé humaine et l'environnement ». Mais l'indicateur renvoie à ceux du futur plan Ecophyto 2030, dont les travaux n'ont été lancés que le 12 juillet dernier.

« Document théorique sans valeur réglementaire »

« On a l'expérience de stratégies nationales qui sont validées et publiées, mais qui sont très rapidement amoindries et enlisées parce que ce ne sont que des feuilles de route », déplore Jean-David Abel. « C'est un document théorique qui n'a aucune valeur réglementaire. On demande donc à ce que la SNB soit approuvée par le Premier ministre via un décret pour qu'elle puisse s'appliquer réellement à l'ensemble des départements ministériels. » « C'est tout le sens de la planification écologique », appuie Véronique Andrieux, qui, à cet égard, salue le fait que SNB soit placée sous la supervision du Secrétariat général à la planification écologique.

« Nous allons réduire toutes les pressions qui s'exercent sur la biodiversité. Nous travaillerons avec tous les acteurs et les professionnels, avec une attention particulière pour les secteurs qui ont le plus d'impact sur la biodiversité, notamment l'agriculture, la pêche, l'énergie ou la construction », assure de son côté Élisabeth Borne. Mais si l'intention de la Première ministre est sincère, encore faut-il qu'elle soit suivie d'effet et que la pérennité de son action soit assurée.

1. Télécharger le Classeur des fiches mesures de la SNB 2030
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-42272-snb-fiches-mesures.pdf

Réactions3 réactions à cet article

"Nous travaillerons avec tous les acteurs et les professionnels, avec une attention particulière pour notamment l'agriculture,"
J'adore me répéter :
En France, 84 % des surfaces classées en " haute valeur naturelle " correspondent à des zones d'élevage en plein air"
CNRS
"Le pastoralisme constitue un exemple de secteur d’investissement au sein duquel le double objectif de développement et de conservation de la biodiversité peut être atteint par la reconnaissance de la contribution importante de ce système aux cultures, traditions, moyens d’existence et services des écosystèmes." convention sur la diversité biologique.
Le pastoralisme est vital pour conserver les grandes zones d’habitat naturel et semi naturel. Ce faisant l’abandon du pastoralisme constitue une menace pour la biodiversité.UICN

Et pourtant, la FNE et le WWF qui donnent systématiquement leur point de vue l'affirment par ailleurs:
"Le pastoralisme n’est pas forcément synonyme d’entretien du paysage. Ecologiquement, la montagne n’a pas besoin de moutons Les éleveurs ont besoin d’alpages, mais l’inverse n’est pas vrai. L’idée que le bétail serait utile pour " entretenir " la montagne renvoie à une image symbolique de celle-ci, mais ne correspond à aucune réalité biologique ou écologique."

ouragan | 24 juillet 2023 à 12h56 Signaler un contenu inapproprié

Bonsoir ! beaucoup d'efforts sont déployés par la France, hélas ces efforts sont limités au territoire Français alors qu'ils auraient du être intégré à toute la région Méditerranéenne. c'est pourquoi toute lutte contre le réchauffement et ses conséquences sur les dérèglements climatiques devrait mobiliser les Pays de cette région sous la supervision de la France. nous suggérons cependant aux Français d'enrichir leur programme par l'introduction la création de puits de carbone aux cotés des actions tendant à limiter les émanations du CO2 dont les résultats attendus seraient plus significatifs. A+

DAOUD | 24 juillet 2023 à 21h03 Signaler un contenu inapproprié

Moi aussi je sais faire des phrases en alignant des mots les uns derrière les autres...comme E. Borne, comme M. Fesneau...comme E. Macron.

gaïa94 | 08 août 2023 à 11h34 Signaler un contenu inapproprié

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