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Affaire du siècle : la réparation du préjudice écologique jugée incomplète mais l'astreinte inutile

Saisi en tant que juge de l'exécution, le tribunal administratif de Paris estime que la réparation du préjudice écologique est incomplète mais refuse de prononcer une astreinte à l'encontre de l'État compte tenu des mesures prises.

Gouvernance  |    |  L. Radisson
Affaire du siècle : la réparation du préjudice écologique jugée incomplète mais l'astreinte inutile
Droit de l'Environnement N°329
Cet article a été publié dans Droit de l'Environnement N°329
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« La justice administrative vient de confirmer que parler d'inaction climatique de la France était une contre-vérité, en confirmant que la France respecte ses objectifs de baisse d'émissions de gaz à effet de serre, et compense même les excès d'émissions passés », se félicite Christophe Béchu. Ce satisfecit du ministre de la Transition écologique fait suite au nouveau jugement rendu vendredi 22 décembre par le tribunal administratif de Paris dans L'Affaire du siècle, ce grand contentieux climatique contre l'État français lancé en 2019 par quatre ONG.

Trois d'entre elles (Oxfam, Notre Affaire à tous, Greenpeace) avaient, en juin 2023, déposé de nouveaux mémoires devant cette juridiction en vue de faire exécuter le jugement du 14 octobre 2021. Par cette décision, le tribunal avait enjoint au Gouvernement de prendre, avant le 31 décembre 2022, toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique et à prévenir l'aggravation des dommages à hauteur de la part non compensée d'émissions de gaz à effet de serre (GES) émis lors du premier budget carbone (2015-2018), estimée à 15 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2eq).

Les associations requérantes estimaient que la baisse des émissions de GES constatée sur l'année 2022 (-2,7 % par rapport à 2021) était en trompe-l'œil car liée à des facteurs conjoncturels : ralentissement économique lié à la crise du Covid-19, crise énergétique résultant de la guerre en Ukraine, hiver très doux. Elles avaient par conséquent demandé des mesures d'exécution du jugement : injonction à prendre toutes mesures sectorielles utiles permettant de procéder à son exécution complète, et d'assurer la réparation du préjudice écologique et de prévenir son aggravation ; prononcé d'une astreinte de 1,1 milliard d'euros à l'issue du premier trimestre 2023 et de 122,5 millions d'euros pour chaque semestre de retard d'exécution du jugement à venir.

Une partie du préjudice réparée

Le tribunal relève que l'exécution du jugement est en cours « dès lors qu'une partie du préjudice a fait l'objet d'une réparation ». Concernant l'existence d'événements exogènes, les juges estiment qu'ils n'ont pas à être écartés dès lors que la réaction du Gouvernement à ces événements s'est traduite par des décisions qui ont contribué à réparer le préjudice écologique et à prévenir l'aggravation des dommages. Les juges relèvent par ailleurs que plusieurs mesures ont été déployées par l'État en vue de concourir à la baisse des émissions de GES dans différents secteurs : transport, bâtiment, industrie, déchets, énergie. « L'ensemble des éléments produits au cours de l'instruction, mis en perspective avec la part du préjudice restant à réparer, permet suffisamment d'établir que l'État, conformément à l'injonction du tribunal, a adopté et mis en œuvre des mesures en vue de compenser le préjudice écologique », juge le tribunal parisien.

En dépit de la mise en œuvre de ces mesures, la réparation du préjudice ne peut toutefois « être regardée comme étant complète » au 31 décembre 2022, un préjudice de 3 ou 5 Mt CO2eq, selon les chiffres retenus, restant à réparer. Mais le tribunal rejette toutefois les demandes d'exécution présentées par les ONG. Compte tenu du rythme constaté de diminution des émissions de GES au premier trimestre 2023 par rapport à 2022 (-5 Mt CO2eq, soit -4,2 %) et de la part indicative d'émissions fixée pour 2023 (396 Mt CO2eq), mis en perspective avec le quantum du préjudice restant à réparer, « il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est pas plus allégué, que cette tendance serait susceptible de connaître un infléchissement tel au cours de l'année 2023 que la réparation du préjudice en serait remise en cause ».

Vers une procédure d'appel

« Cette décision vient confirmer l'accélération de l'action déterminée du Gouvernement ces six dernières années pour remettre la France sur la bonne trajectoire climatique », réagit le ministère de la Transition écologique dans un communiqué. Celui-ci met en avant ses « grandes lois structurantes » et des « moyens budgétaires sans équivalent jusqu'alors ». « La baisse annuelle indéniable de nos émissions, récemment confirmée par le Citepa pour les neuf premiers mois de l'année 2023, avec une baisse de 4,6 %, confirme cette trajectoire », s'enorgueillit le ministère.

Le son de cloche est bien différent du côté des ONG. « Le tribunal administratif de Paris rend une décision qui fait volontairement l'impasse sur le non-respect de l'échéance fixée en 2021, sur le retard climatique pris depuis la condamnation, en raison de l'effondrement des puits de carbone, et sur l'origine des baisses récentes d'émissions de gaz à effet de serre, liées à des facteurs conjoncturels et extérieurs à l'action de l'État », déplorent les trois ONG dans un communiqué commun. Celles-ci indiquent se réserver le droit de faire appel du jugement.

« Nous sommes plus que jamais déterminé·es à faire respecter la condamnation de l'État de 2021, ainsi que les engagements climatiques de la France, confirme Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France. L'action de l'État est bien trop timide et parfois même climaticide comme en témoignent les récents reculs concernant le terminal méthanier du Havre ou la sortie du charbon. »

Réactions2 réactions à cet article

L'affaire du siècle nous avait gratifié d'une vidéo expliquant comment suvaer la planète!
Ce que j'ai entendu dans cette vidéo, c'est qu'il faut manger moins de viande, comme on l’entend dire dans tous les médias. Mais je n'ai pas entendu qu'il ne faut plus prendre l'avion ni aller au skis, ni arrêter pour la France l'artificialisation annuelle de plus de 70 000 ha de terre agricole et de forets. Encore moins d’arrêter les transports pour les importations massives de produits qui ne respectent pas nos normes et sont fabriqués par des ouvriers esclaves à l'autre bout du monde.

A propos de la restriction des produits d'origine animale, la solidarité avec les paysans et la planète ne passe pas par la disparition du pastoralisme. Elle passe par le refus catégorique d’un élevage industriel, fondé sur la technologie tous azimuts, avec insémination artificielle, puçage et « nutrition de précision ». Mais ça personne n'en parle, tout les évangélistes font l’amalgame.
« Si l’élevage est une telle calamité pour l’environnement, comment se fait-il qu’il existe depuis dix millénaires et qu’il soit consubstantiel de la majorité des sociétés humaines ? »

ouragan | 27 décembre 2023 à 09h05 Signaler un contenu inapproprié

Commentaire très intéressant.

Erikk | 16 janvier 2024 à 17h24 Signaler un contenu inapproprié

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