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Les conditions pour que l'agriculture biologique devienne majoritaire

L'Inrae explore les leviers et les obstacles à dépasser pour un développement de l'agriculture biologique jusqu'à ce qu'elle devienne majoritaire. Zoom sur les points sensibles qui conditionnent ce virage.

Agroécologie  |    |  D. Laperche
Les conditions pour que l'agriculture biologique devienne majoritaire

Parvenir à une offre majoritaire de produits biologiques en France, une utopie ? C'est en tout cas un sujet d'étude pour l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), notamment à travers son métaprogramme Metabio. Ce dernier se penche sur l'ensemble des changements que ce basculement nécessiterait. « L'objectif proposé par l'Union européenne vise 25 % de la surface agricole en bio en 2030. L'attente des citoyens est forte, la consommation augmente, nous sortons de la niche, a exposé Philippe Mauguin, président-directeur général d'Inrae, lors d'une conférence de presse consacrée au sujet. À l'Inrae, nous nous interrogeons sur la façon de favoriser ce déploiement. »

Et les questions pour atteindre cet objectif sont nombreuses. L'agriculture bio représente actuellement 8,5 % de la surface agricole en Europe et 9,5 % en France. « Une étude de l'Iddri montre que 100 % de bio à l'horizon 2050 serait possible avec des changements forts : des éléments démographiques à prendre en compte, la réduction de la consommation de viande et l'abaissement fort des pertes et gaspillages, rapporte Philippe Mauguin. L'étude propose une réorganisation intéressante mais compliquée : par exemple faire évoluer les grandes plaines céréalières en polycultures avec des haies. C'est très difficile à atteindre aujourd'hui. »

Sécuriser la fertilisation des sols

Parmi les principaux points à prendre en compte pour amorcer le virage, selon l'Inrae, figure la fertilisation des sols. « Les agriculteurs sont confrontés à une raréfaction des ressources minérales, dont le phosphore, mais également à une baisse de la qualité des minerais extraits », souligne Claire Jouany, chargée de recherche au sein de l'unité mixte agroécologie innovation et territoires (Agir) à Toulouse. Soumis à une forte concurrence, le coût des engrais organiques augmente et va peser d'autant sur le prix de revient des agriculteurs bio, qui se passent d'engrais chimiques. Cette question se pose d'autant plus dans un contexte d'arrêt prévu de l'utilisation des fientes et lisiers d'élevages industriels.

Pour que les agriculteurs puissent dépasser cet obstacle, les scientifiques testent et adaptent pour la bio des outils utilisés en agriculture conventionnelle, comme les analyses de sols. Ils explorent également les associations végétales : par exemple des cultures, comme le blé, associées à des légumineuses, comme les pois ou les luzernes, qui fixent l'azote atmosphérique dans le sol et peuvent dans certains cas mobiliser le phosphore présent dans la terre. « Améliorer la fertilisation des sols peut asseoir la durabilité d'un produit, souligne Lionel Alletto, directeur de recherche à l'UMR Agir. Toutefois ces plantes utilisées en association végétale s'installeront entre deux cultures marchandes normalement consacrées à l'entretien des sols pour la gestion des bioagresseurs. Il faut donc également travailler sur ce qu'elles peuvent apporter ». Derrière cette diversification, des filières de transformation des légumineuses par exemple doivent être mises en place.

Un autre levier pour fertiliser les sols, selon les scientifiques, pourrait également passer par le développement associé de polycultures et d'élevage. « L'agriculture biologique se constitue en mosaïque avec l'agriculture conventionnelle : il faudrait une organisation des paysages et un développement des solutions de biocontrôle dans des zones majoritairement bio », estime Philippe Mauguin.

Les propriétés nutritionnelles et sanitaires des produits en soutien de la demande

« Une des raisons de l'acte d'achat du bio pour les consommateurs est qu'il est considéré comme un produit santé », pointe Françoise Médale, directrice du métaprogramme Metabio. Pour maintenir le développement de l'agriculture biologique, cette question s'avère donc importante.

Mais en fonction des types de cultures et d'élevage, la meilleure qualité nutritionnelle et sanitaire du bio par rapport au conventionnel n'est pas garantie, selon l'Inrae. Par exemple, concernant les élevages, l'agriculture biologique permet de réduire les risques de présence de résidus de médicaments et donc de l'antibiorésistance. Mais comme les animaux sont élevés en grand partie en plein air, ils sont également davantage soumis aux pollutions industrielles ou liées à l'incinération des déchets (dioxine et PCB). « Des éléments comme les antioxydants et les acides gras oméga 3 sont liés à l'alimentation de l'animal : plus il y a d'herbes pâturées, plus ils seront présents, mais si la bio se "conventionnalise" avec des pratiques intensives, les avantages vont se réduire, souligne Sophie Prache, ingénieur de recherche au sein du département physiologie animale et système d'élevage.

L'autre pendant, pour garantir la demande, est le consentement à payer des consommateurs. « La part du budget consacré à l'alimentation a baissé fortement et est descendu bas, note Philippe Mauguin. Mais cette massification du bio ne doit pas être clivante socialement. » Des scientifiques travaillent précisément sur la réduction des coûts de production de l'agriculture biologique. Les actions publiques auront également un rôle à jouer pour répondre à cette question. « Ce n'est pas forcément la PAC qui doit porter cela, mais également les politiques sociales », juge Cécile Détang-Dessendre, économiste, directrice scientifique adjointe agriculture.

Reste à voir ce qu'indiqueront les résultats du métaprogramme Metabio, qui devraient sortir entre 2025 et 2028.

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