Il n'existe pas de substitut universel pour remplacer le bisphénol A, selon l'Anses qui alerte sur l'usage par les industriels de trois bisphénols alternatifs aux mêmes propriétés oestrogéniques potentiellement toxiques pour le consommateur.
Après avoir confirmé les risques sanitaires du bisphénol A mardi 9 avril chez les femmes enceintes et les caissières, l'Agence de sécurité sanitaire (Anses) a appelé à "la prudence" pour les produits de substitution à cette substance chimique de synthèse perturbatrice endocrinienne, utilisée par l'industrie pour la fabrication industrielle de plastiques alimentaires (polycarbonate et polyépoxy ou résines époxydes) ou l'impression de papiers de type tickets de caisse. L'Anses pointe en particulier l'impact des substituts via d'autres bisphénols dont "l'activité oestrogénique commune à cette famille de composés pourrait s'avérer néfaste pour le consommateur".
Pour rappel : à la suite d'un avis publié fin septembre 2011 pointant déjà des risques sur la fertilité féminine à de faibles niveaux d'exposition, l'agence avait lancé un appel à contributions à destination des industriels afin ''de recueillir des données scientifiques sur les produits de substitution au BPA disponibles et si possible sur leur innocuité" en priorité dans les matériaux au contact des aliments, principale voie d'exposition des populations "les plus sensibles" parmi les femmes enceintes, allaitantes et nourrissons.
73 substituts possibles recensés
Au total, 73 alternatives possibles au BPA ont été identifiées jusqu'en février 2012 par l'Anses via ses différents usages : résines epoxy ou polycarbonate dans les contenants alimentaires (canettes, conserves, bouteilles...) mais aussi papiers thermo sensibles (tickets de caisse, reçus de cartes bancaires…). L'objectif de l'agence était, via ce recensement, de réaliser "un premier état des lieux" des alternatives potentielles existantes mais "en aucun cas de les évaluer" sur "leur faisabilité technologique" et "les enjeux sanitaires" à ces substitutions, souligne l'Anses.
Sur les 73 familles d'alternatives, 21 ont ainsi été identifiées pour le polycarbonate, 18 pour les résines époxydes ou encore 34 pour le papier thermique. Ces substituts au BPA sont "divers" : substitution directe du bisphénol A par une autre substance, remplacement par une autre matière plastique ou un autre polymère présentant des propriétés similaires au polymère de départ, substitution par un autre matériau ou type de conditionnement et, enfin via un nouveau procédé, explique l'agence.
Pas de garantie d'innocuité sous Reach
L'Anses précise que certaines alternatives sont "actuellement utilisées sur les marchés européen ou non européen" - couvertes pour la plupart par le règlement Reach sur les produits chimiques - quand d'autres n'en sont encore qu'à un stade de recherche et développement. Alors que cet inventaire d'alternatives n'est "probablement pas exhaustif", il n'existe pas "un produit universel pour se substituer au BPA dans tous ses usages" actuels, estime Marc Mortureux, directeur général de l'Anses.
Au vu des données disponibles sur la toxicité, "même si la plupart de ces composés chimiques ont été (pré)enregistrés sous Reach, ceux-ci n'ont pas pour autant fait l'objet d'essais complets dans le domaine de la toxicologie, notamment vis-à-vis de la reproduction et/ou leurs caractères de perturbateur endocrinien", prévient l'agence.
Les interrogations autour des dangers des substituts et de leur pertinence technologique demeurent donc, les données toxicologiques actuelles "n'étant pas suffisantes pour prouver leur innocuité", a reconnu M. Mortureux. "Il existe peu de données sur les molécules en cours de stabilisation ou de développement, quant à leurs effets potentiels sur la santé", avait déjà précisé Dominique Gombert, directeur des évaluations des risques à l'Anses en novembre 2012, au cours d'une audition des députés à l'Assemblée nationale.
En conséquence : l'agence appelle à ''la plus grande prudence en matière de substitution par ces composés'' en particulier via d'autres bisphénols. "Nous préconisons d'éviter les substitutions pour lesquelles nous n'avons pas toutes les garanties d'innocuité", selon Marc Mortureux. "Il est de la responsabilité des industriels d'en faire la démonstration". En l'absence de données scientifiques complémentaires, l'agence n'encourage pas la substitution au BPA ''par l'utilisation d'autres bisphénols en particulier le bisphénol S" (BPS), retrouvé dans les tickets de caisse, a prévenu Dominique Gombert, et qui peut être tout aussi nocif en migrant par voie cutanée.
Bisphénol S : même propriétés oestrogéniques potentiellement nocives
Trois composés de la famille du BPA dont le bisphénol S mais aussi le bisphénol AF et AP ont ainsi été recensés parmi les 73 substituts dont l'agence appelle à la "plus grande précaution dans leur utilisation", ''au regard de leurs analogies structurales avec le BPA et de leur potentiel oestrogénique'', similaire aux hormones féminines et pouvant s'avérer néfaste.
Or, les trois bisphénols S, AF et AP sont utilisés comme substituts au BPA en tant que "révélateur dans les papiers thermiques". Le BPS sert également de "monomère de départ pour la synthèse du polyéthersulfone (PES)", qui est notamment utilisé pour la fabrication de biberons et de vaisselle pour enfants, s'inquiète l'Anses. Une préoccupation partagée par Yannick Vicaire, chargé de mission au Réseau Environnement Santé (RES) alors que plusieurs marques de biberons auraient déjà adopté le PES à base de BPS, selon lui, après l'interdiction du BPA depuis juin 2010 en France…
Tandis que le bisphénol S est aussi très employé comme alternative dans les reçus de caisse, la proposition d'interdiction du BPA dans les tickets thermiques par la ministre de l'Ecologie semble elle déjà dépassée. "On a remplacé la peste par le choléra ! Le Bisphénol S moins connu et surtout moins médiatisé, n'effraie pas le consommateur et n'est pas dans le viseur de la loi. Les industriels ne sont même pas tenus d'afficher qu'ils en ont utilisé !", prévient le Dr Patrice Halimi, secrétaire général de l'association Santé Environnement France (Asef).
L'agence réitère aux industriels "d'évaluer l'innocuité de ces alternatives avant toute utilisation" et leur mise sur le marché, les rappelant à leur responsabilité. Au vu des profils toxicologiques, "il est nécessaire de réaliser des études supplémentaires de toxicité de la reproduction" pour les autres bisphénols afin d'"évaluer de façon satisfaisante les effets sur la santé humaine", insiste l'Anses. Pour le RES : "Les consommateurs ne pourront avoir confiance que lorsque l'industrie chimique cessera ce petit jeu cynique où un toxique chasse l'autre".
Développer des substituts sans nouveaux risques reprotoxiques relèverait encore du défi pour les industriels alors que le BPA sera interdit en 2015 pour les autres contenants alimentaires en France. Une date butoir qui n'est "pas jugée réaliste", pour le secteur de la chimie. "Pour une évaluation sereine et une mise au point des possibilités de substitution, il faut au minimum deux à trois ans", avait estimé en octobre 2012, Franck Garnier, vice-président de l'Union des industries chimiques chargé de la santé et de l'environnement, selon Le Télégramme. Des travaux de recherche menés notamment par l'équipe d'Hélène Fulcrand de l'Inra Montpellier sur la synthèse de résine époxy à base de polyphénols biosourcés prouveraient néanmoins la faisabilité scientifique d'une production de substituts technologiquement fiables à partir de biomasse. De son côté, le syndicat des fabricants de boîtes et emballages métalliques a assuré aux Echos "travailler sur quatre familles de résines d'époxy conformes à la réglementation européenne s'agissant du contact avec les produits alimentaires".
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