Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Des pistes pour optimiser les transitions professionnelles induites par la mutation énergétique

La réussite de la transition énergétique dépend du maintien de l'emploi dans les secteurs impactés, prévient le groupe de travail "transitions professionnelles" qui appelle à anticiper et sécuriser les besoins en compétences et reconversions.

Gouvernance  |    |  R. Boughriet

Créé dans la foulée du débat fin mars dernier, le groupe de travail visant à répondre aux enjeux d'emplois et d'accompagnement professionnel de la transition énergétique, a présenté le 23 mai une vingtaine de recommandations dans un rapport. (1) Les emplois de la transition énergétique figurent parmi les priorités nationales "majeures" au menu de la prochaine conférence environnementale de septembre, a annoncé la ministre de l'Ecologie Delphine Batho le 22 mai, à la veille de la remise du rapport du groupe, élaboré en moins de deux mois.

Les questions sociales liées à cette transition, source de création et de maintien d'emplois dans les territoires, et ses enjeux en matière de reconversions et de formations, étaient au cœur des travaux du groupe coordonné par Dominique Olivier, secrétaire confédéral du syndicat CFDT  (2) en charge du développement durable. Outre les syndicats (CGT, CFE-CGC (3) , CFDT), figuraient également dans ce groupe, les représentants du patronat (CGPME, Medef, Fnsea) (4) , des ONG (FNE, Cler, ESF (5) ), des fédérations de chambres de commerce (CCI France) et des universités du pays (CPU (6) ) ainsi que des collectivités locales (ARF (7) ) et des services de l'Etat concernés (Ademe, ministères du Travail et du Redressement productif).

Mais faute de temps imparti, le groupe de travail a surtout "centré ses réflexions sur les conditions de réussite de la conduite des changements « humains » et les aspects méthodologiques d'accompagnement de la transition énergétique, en basant ses travaux sur les scénarios (énergétiques ndlr) les plus probables (socles de convergences) sans qu'il soit en mesure d'évaluer de manière précise les conséquences « emploi », positives ou négatives, liées à cette transition",  a-t-il toutefois déploré, en préambule du rapport. Les travaux se sont ainsi heurtés "à deux types de difficultés : une intervention tardive dans le débat et donc un temps de réflexion insuffisant et la méconnaissance des scénarios stratégiques retenus (exercice en aveugle)", souligne le groupe.

Flou actuel autour des gisements d'emplois potentiels

Néanmoins, les "opportunités/menaces" sur les activités des filières impactées par la mutation énergétique ont été répertoriées par le groupe. Et de rappeler : certains emplois sont directement menacés dans les énergies fossiles ("hors gaz"), le nucléaire (fermeture de la centrale  (8) de Fessenheim en 2016 confirmée par le Président Hollande notamment), l'automobile et "indirectement touchés" dans les secteurs de la chimie ou du papier-carton. Quand d'autres emplois seront créés dans la rénovation thermique des bâtiments, les énergies renouvelables (solaire, éolien, énergie marine, biomasse…), les transports en communs ou encore les réseaux électriques intelligents (smart grids).

Les études macro-économiques présentées au cours du débat convergent sur des gains d'emplois potentiels très positifs liés à la transition, avec, pour les scénarios les plus ambitieux, plus de 630.000 emplois en 2030 selon une étude du CIRED-CNRS mettant en œuvre le scénario énergétique proposé par l'association NégaWatt voire plus de 740.000 emplois en 2050, d'après l'Observatoire français des conjonctures économiques et l'Ademe. En revanche, le groupe Areva estime que la réduction de la part du nucléaire à 50% d'ici 2025, prévue par le gouvernement, détruirait 250.000 emplois directs et indirects. Le Syndicat des énergies renouvelables pense de son côté que porter la part du renouvelable à 25% permettrait de créer 124.000 emplois à cette échéance.

Mais ces estimations pour l'heure, dans l'attente de trajectoire énergétique décidée "ne permettent pas de dégager une vision claire" sur les conséquences "positives ou négatives" de la transition sur la création d'emplois, nuance le groupe de travail. Si les chiffrages "ne donnent pas de visibilité suffisante, il est important aujourd'hui de ne pas se focaliser uniquement sur le binôme « création et destruction » mais de s'intéresser au « maintien de l'emploi » dans les territoires", prévient le rapport. Les domaines d'activité les plus concernés étant les énergies thermiques, l'énergie hydraulique et nucléaire mais aussi le transport de gaz et d'électricité et la distribution, énumère-t-il. "L'anticipation et la sécurisation des parcours professionnels, l'évolution des compétences et des qualifications" constituent des priorités, résume Dominique Olivier, le coordinateur. Et autant "de défis à relever dans ces secteurs".

"Anticiper et sécuriser les parcours professionnels"

Alors comment anticiper et accompagner les conséquences sur l'emploi ? Dès le scénario énergétique retenu, des études prospectives devront être initiées par ces filières directement ou indirectement impactées et par territoires, préconise le groupe de travail aux partenaires économiques et sociaux. Ces études devront introduire "plutôt des fourchettes de chiffres de pertes/gains d'emplois et tenir compte des transferts d'emploi entre filières (sauvegarde de l'emploi)". Pour réaliser ces analyses sectorielles, "nous avons soumis aux branches professionnelles concernées une méthode qui s'appuie sur des outils qui fonctionnent déjà. Il s'agit de généraliser les observatoires prospectifs des métiers et des qualifications (OPMQ) de branche ainsi que les contrats d'études prospectives sur l'évolution des compétences (CEP) qui devront être actualisés en profondeur", explique M. Olivier.

Ces travaux prospectifs doivent aussi permettre d'identifier les secteurs dont l'activité est amenée à décliner, et d'anticiper les besoins de reconversion des salariés et les priorités d'action de la formation professionnelle (AFPA, (9) Pôle emploi,…). Il s'agit de repérer les compétences des salariés qui peuvent être mises à profit dans les activités en développement. "Il ya des métiers qui ne vont pas changer fondamentalement mais des briques de compétences environnementales et énergétiques vont être ajoutées. Nous préconisons d'identifier les compétences clés pour faciliter les passerelles entre postes de travail et les compétences transversales et transférables entre secteurs", précise M. Olivier.

La "sécurisation des parcours professionnels" vise donc à anticiper les besoins en compétences (techniciens, ingénieurs…) et déterminer les offres de formations initiales et continues adaptées (10) . Il s'agit de "rendre plus effectifs les dispositifs existants mal ou pas connus, et sous utilisés : DIF, passeport orientation formation, entretien professionnel, bilan d'étape professionnel, Validation des acquis de l'expérience (VAE)…". Le groupe de travail recommande également de réorienter le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels davantage vers ces problématiques de mutation énergétique. Des nouveaux financements pourraient être mis en place pour faire évoluer les contenus et dispositifs de formation "en partenariat avec les pouvoirs publics, le fonds social européen, les entreprises privées ou des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA)", ajoute Dominique Olivier. Les transitions professionnelles ''dépendront fortement de la qualité de toutes ces anticipations et il faudra donc regarder, secteur par secteur, filière par filière, quelles sont les pistes de conversion les plus soutenables et durables'', réitère le groupe de travail.

"Le dialogue social doit conduire toutes ces transitions" et se poursuivre lors de la Grande conférence sociale pour l'emploi des 20 et 21 juin prochains, insiste M. Olivier. A l'occasion de cette conférence, l'État "pourrait interpeller les partenaires sociaux pour leur demander d'ouvrir une négociation collective sur les impacts économiques, sociaux et professionnels de la transition énergétique. Les branches professionnelles prendraient le relais des négociations pour inscrire à l'ordre du jour début 2014 les impacts de la transition sur leur secteur'', poursuit-il.

Le "volet social de la transition" pourrait être suivi par une nouvelle commission "emplois, formation et transition professionnelle" qui y serait dédiée, ajoute M. Olivier. Cette commission "phare" pourrait alors être intégrée dans le Conseil national de la transition écologique (CNTE) prévu pour juillet, préconise le groupe.

1. Pour télécharger le rapport du groupe de travail transitions professionnelles
http://www.transition-energetique.gouv.fr/sites/default/files/dnte_gt6_rapport_projet_04b.pdf
2. Confédération française démocratique du travail3. Confédération générale du travail, Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres.4. Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, Mouvement des entreprises de France, Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles.5. Comité de Liaison Energies Renouvelables, Economie Sociale et Familiale.6. Conférence des présidents d'université7. Association des régions de France8. La fermeture progressive de 24 réacteurs d'ici 2025 au total est prévue par l'accord 2012-2017 signé entre les socialistes et les écologistes lors des Présidentielles.9. Association nationale pour la formation professionnelle des adultes10. Formations en énergies durables et performance énergétique labellisées Format'eree ou Effinergie, cite par exemple le rapport.

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question à la journaliste Rachida Boughriet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires